9
1 ère STL B Oral Blanc Mercredi 26 mars 2019 OBJET DETUDE : ECRITURE POETIQUE ET QUETE DU SENS DU MOYEN AGE A NOS JOURS. SEQUENCE N°1 : « FIAT LUX ». Problématiques : Comment les poètes disent la lumière ? Éclairer le monde par l’alchimie des mots. TEXTE N°1 : Vincent Voiture, Sonnets, La Belle matineuse, 1635. Des portes du matin l'Amante de Céphale 1 Ses roses épandait dans le milieu des airs 2 Et jetait sur les Cieux nouvellement ouverts Ses traits d'or et d'azur qu'en naissant elle étale 4 Quand la Nymphe 2 divine, à mon repos fatale 3 , Apparut, et brilla de tant d'attraits divers, 6 Qu'il semblait qu'elle seule éclairait l'Univers, Et remplissait de feux la rive orientale. 8 Le Soleil se hâtant pour la gloire des Cieux, Vint opposer sa flamme à l'éclat de ses yeux, 10 Et prit tous les rayons dont l'Olympe 4 se dore ; L'onde 5 , la terre, et l'air s'allumaient à l'entour : 12 Mais auprès de Philis 6 on le prit pour l'Aurore, Et l'on crut que Philis était l'Astre du jour. 14 1 La déesse de l’aurore, amoureuse du Grec Céphale 2 Nymphe : divinité de la nature 3 « A mon repos fatale » : Fatale à mon repos 4 Olympe : montagne où demeurent les Dieux (dans la mythologie grecque). 5 L’onde : nom poétique pour désigner l’eau (la mer, la rivière…) 6 Philis : Nom donné à la femme aimée dans la poésie précieuse à cause de la racine grecque « phil » qui exprime l’idée d’amour.

TE EXXTE NN°°11 - WordPress.com · 2019. 3. 11. · Victor Hugo, Les Châtiments, « Lux », 1853. Lux Temps futurs ! vision sublime ! Les peuples sont hors de l’abîme. Le désert

  • Upload
    others

  • View
    5

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: TE EXXTE NN°°11 - WordPress.com · 2019. 3. 11. · Victor Hugo, Les Châtiments, « Lux », 1853. Lux Temps futurs ! vision sublime ! Les peuples sont hors de l’abîme. Le désert

1ère STL B – Oral Blanc – Mercredi 26 mars 2019

OOBBJJEETT DD’’EETTUUDDEE :: EECCRRIITTUURREE PPOOEETTIIQQUUEE EETT QQUUEETTEE DDUU SSEENNSS DDUU MMOOYYEENN AAGGEE AA NNOOSS JJOOUURRSS.. SEQUENCE N°1 : « FIAT LUX ». Problématiques :

Comment les poètes disent la lumière ?

Éclairer le monde par l’alchimie des mots.

TTEEXXTTEE NN°°11 ::

Vincent Voiture, Sonnets, La Belle matineuse, 1635.

Des portes du matin l'Amante de Céphale1

Ses roses épandait dans le milieu des airs 2

Et jetait sur les Cieux nouvellement ouverts

Ses traits d'or et d'azur qu'en naissant elle étale 4

Quand la Nymphe2 divine, à mon repos fatale

3,

Apparut, et brilla de tant d'attraits divers, 6

Qu'il semblait qu'elle seule éclairait l'Univers,

Et remplissait de feux la rive orientale. 8

Le Soleil se hâtant pour la gloire des Cieux,

Vint opposer sa flamme à l'éclat de ses yeux, 10

Et prit tous les rayons dont l'Olympe4 se dore ;

L'onde5, la terre, et l'air s'allumaient à l'entour : 12

Mais auprès de Philis6 on le prit pour l'Aurore,

Et l'on crut que Philis était l'Astre du jour.14

1 La déesse de l’aurore, amoureuse du Grec Céphale 2 Nymphe : divinité de la nature 3 « A mon repos fatale » : Fatale à mon repos 4 Olympe : montagne où demeurent les Dieux (dans la mythologie grecque). 5 L’onde : nom poétique pour désigner l’eau (la mer, la rivière…) 6 Philis : Nom donné à la femme aimée dans la poésie précieuse à cause de la racine grecque « phil » qui exprime l’idée d’amour.

Page 2: TE EXXTE NN°°11 - WordPress.com · 2019. 3. 11. · Victor Hugo, Les Châtiments, « Lux », 1853. Lux Temps futurs ! vision sublime ! Les peuples sont hors de l’abîme. Le désert

TTEEXXTTEE NN°°22 :: Victor Hugo, Les Châtiments, « Lux », 1853.

Lux

Temps futurs ! vision sublime ! Les peuples sont hors de l’abîme. Le désert morne est traversé. Après les sables, la pelouse ; Et la terre est comme une épouse, 5 Et l’homme est comme un fiancé !

Dès à présent l’œil qui s’élève Voit distinctement ce beau rêve Qui sera le réel un jour ; Car Dieu dénoûra toute chaîne, 10 Car le passé se nomme haine Et l’avenir s’appelle amour !

Dès à présent dans nos misères Germe l’hymen des peuples frères ; Volant sur nos sombres rameaux, 15 Comme un frelon que l’aube éveille, Le progrès, ténébreuse abeille, Fait du bonheur avec nos maux.

Oh ! voyez ! la nuit se dissipe ; Sur le monde qui s’émancipe, 20 Oubliant Césars et Capets, Et sur les nations nubiles, S’ouvrent dans l’azur, immobiles, Les vastes ailes de la paix !

Ô libre France enfin surgie ! 25 Ô robe blanche après l’orgie ! Ô triomphe après les douleurs ! Le travail bruit dans les forges, Le ciel rit, et les rouges-gorges Chantent dans l’aubépine en fleurs ! 30

La rouille mord les hallebardes. De vos canons, de vos bombardes, Il ne reste pas un morceau Qui soit assez grand, capitaines, Pour qu’on puisse prendre aux fontaines 35 De quoi faire boire un oiseau.

Les rancunes sont effacées ; Tous les cœurs, toutes les pensées, Qu’anime le même dessein, Ne font plus qu’un faisceau superbe ; 40 Dieu prend pour lier cette gerbe La vieille corde du tocsin.

Au fond des cieux un point scintille. Regardez, il grandit, il brille, Il approche, énorme et vermeil. 45 Ô République universelle, Tu n’es encore que l’étincelle, Demain tu seras le soleil !

Page 3: TE EXXTE NN°°11 - WordPress.com · 2019. 3. 11. · Victor Hugo, Les Châtiments, « Lux », 1853. Lux Temps futurs ! vision sublime ! Les peuples sont hors de l’abîme. Le désert

TTEEXXTTEE NN°°33 :: Francis Ponge, Le Parti pris des choses, « La Bougie », 1942.

LLAA BBOOUUGGIIEE La nuit parfois ravive une plante singulière dont la lueur décompose les chambres meublées

en massifs d'ombres. 2 Sa feuille d'or tient impassible au creux d'une colonnette d'albâtre par un pédoncule très

noir. 4 Les papillons miteux l'assaillent de préférence à la lune trop haute, qui vaporise les bois.

Mais brûlés aussitôt ou vannés dans la bagarre, tous frémissent aux bords d'une frénésie voisine 6 de la stupeur.

Cependant la bougie, par le vacillement des clartés sur le livre au brusque dégagement des 8 fumées originales encourage le lecteur, — puis s'incline sur son assiette et se noie dans son aliment.10

TTEEXXTTEE NN°°44 :: Jacques Réda. « La Bicyclette », Retour au Calme, 1989. Passant dans la rue un dimanche à six heures, soudain, Au bout d’un corridor fermé de vitres en losange, 2 On voit un torrent de soleil qui roule entre des branches Et se pulvérise à travers les feuilles d’un jardin, 4 Avec des éclats palpitants au milieu du pavage Et des gouttes d’or — en suspens aux rayons d’un vélo. 6 C’est un grand vélo noir, de proportions parfaites, Qui touche à peine au mur. Il a la grâce d’une bête 8 En éveil dans sa fixité calme : c’est un oiseau. La rue est vide. Le jardin continue en silence 10 De déverser à flots ce feu vert et doré qui danse Pieds nus, à petits pas légers sur le froid du carreau. 12 Parfois un chien aboie ainsi qu’aux abords d’un village. On pense à des murs écroulés, à des bois, des étangs. 14 La bicyclette vibre alors, on dirait qu’elle entend. Et voudrait-on s’en emparer, puisque rien ne l’entrave, 16 On devine qu’avant d’avoir effleuré le guidon Éblouissant, on la verrait s’enlever d’un seul bond 18 À travers le vitrage à demi noyé qui chancelle, Et lancer dans le feu du soir les grappes d’étincelles 20 Qui font à présent de ses roues deux astres en fusion.

Page 4: TE EXXTE NN°°11 - WordPress.com · 2019. 3. 11. · Victor Hugo, Les Châtiments, « Lux », 1853. Lux Temps futurs ! vision sublime ! Les peuples sont hors de l’abîme. Le désert

SEQUENCE N 2: MOTS DE VOYAGEURS Problématiques : Comment le voyage permet-il d’interroger les notions d’identité et de diversité ? Le voyage et son récit peuvent-ils contribuer à former l'homme ?

TEXTE N°5 : Michel de MONTAIGNE, Essais, « De la vanité », 1588.

Page 5: TE EXXTE NN°°11 - WordPress.com · 2019. 3. 11. · Victor Hugo, Les Châtiments, « Lux », 1853. Lux Temps futurs ! vision sublime ! Les peuples sont hors de l’abîme. Le désert

TEXTE N°6 : Jean de LA FONTAINE, Fables, VI, 5, 1668.

Le Cochet, le Chat, et le Souriceau Un Souriceau tout jeune, et qui n'avait rien vu, Fut presque pris au dépourvu. Voici comme il conta l'aventure à sa mère : J'avais franchi les Monts qui bornent cet Etat, Et trottais comme un jeune Rat 5 Qui cherche à se donner carrière, Lorsque deux animaux m'ont arrêté les yeux : L'un doux, bénin et gracieux, Et l'autre turbulent, et plein d'inquiétude. Il a la voix perçante et rude, 10 Sur la tête un morceau de chair, Une sorte de bras dont il s'élève en l'air Comme pour prendre sa volée, La queue en panache étalée. Or c'était un Cochet dont notre Souriceau 15 Fit à sa mère le tableau, Comme d'un animal venu de l'Amérique. Il se battait, dit-il, les flancs avec ses bras, Faisant tel bruit et tel fracas, Que moi, qui grâce aux Dieux, de courage me pique, 20 En ai pris la fuite de peur, Le maudissant de très bon cœur. Sans lui j'aurais fait connaissance Avec cet animal qui m'a semblé si doux. Il est velouté comme nous, 25 Marqueté, longue queue, une humble contenance ; Un modeste regard, et pourtant l'œil luisant : Je le crois fort sympathisant Avec Messieurs les Rats ; car il a des oreilles En figure aux nôtres pareilles. 30 Je l'allais aborder, quand d'un son plein d'éclat L'autre m'a fait prendre la fuite. - Mon fils, dit la Souris, ce doucet est un Chat, Qui sous son minois hypocrite Contre toute ta parenté 35 D'un malin vouloir est porté. L'autre animal tout au contraire Bien éloigné de nous mal faire, Servira quelque jour peut-être à nos repas. Quant au Chat, c'est sur nous qu'il fonde sa cuisine. 40 Garde-toi, tant que tu vivras, De juger des gens sur la mine.

Page 6: TE EXXTE NN°°11 - WordPress.com · 2019. 3. 11. · Victor Hugo, Les Châtiments, « Lux », 1853. Lux Temps futurs ! vision sublime ! Les peuples sont hors de l’abîme. Le désert

TEXTE N°7 : Denis DIDEROT, Supplément au voyage de Bougainville, 1772.

Page 7: TE EXXTE NN°°11 - WordPress.com · 2019. 3. 11. · Victor Hugo, Les Châtiments, « Lux », 1853. Lux Temps futurs ! vision sublime ! Les peuples sont hors de l’abîme. Le désert

TEXTE N°8 : Jean-Jacques Rousseau, Confessions, Livre IV, 1782

La chose que je regrette le plus dans les détails de ma vie dont j'ai perdu la mémoire est de n'avoir pas fait des journaux de mes voyages. Jamais je n'ai tant pensé, tant existé, tant vécu, tant été moi, si j'ose ainsi dire, que dans ceux que j'ai faits seul et à pied. La marche a quelque chose qui anime et avive mes idées : je ne puis presque penser quand je reste en place ; il faut que mon corps soit en branle1 pour y mettre mon esprit. La vue de 5

la campagne, la succession des aspects agréables, le grand air, le grand appétit, la bonne santé que je gagne en marchant, la liberté du cabaret, l'éloignement de tout ce qui me fait sentir ma dépendance, de tout ce qui me rappelle à ma situation, tout cela dégage mon âme, me donne une plus grande audace de penser, me jette en quelque sorte dans l'immensité des êtres pour les combiner, les choisir, me les approprier à mon gré, sans 10

gêne et sans crainte. Je dispose en maître de la nature entière ; mon cœur, errant d'objet en objet, s'unit, s'identifie à ceux qui le flattent, s'entoure d'images charmantes, s'enivre de sentiments délicieux. Si pour les fixer je m'amuse à les décrire en moi-même, quelle vigueur de pinceau, quelle fraîcheur de coloris, quelle énergie d'expression je leur donne ! On a, dit-on, trouvé de tout cela dans mes ouvrages, quoique écrits vers le déclin de mes 15

ans. Oh ? si l'on eût vu ceux de ma première jeunesse, ceux que j'ai faits durant mes voyages, ceux que j'ai composés et que je n'ai jamais écrits... Pourquoi, direz-vous, ne les pas écrire ? Et pourquoi les écrire ? vous répondrai-je : pourquoi m'ôter le charme actuel de la jouissance, pour dire à d'autres que j'avais joui ? Que m'importaient des lecteurs, un public, et toute la terre, tandis que je planais dans le ciel ? D'ailleurs, portais-je avec moi 20

du papier, des plumes ? Si j'avais pensé à tout cela, rien ne me serait venu. Je ne prévoyais pas que j'aurais des idées ; elles viennent quand il leur plaît, non quand il me plaît. Elles ne viennent point, ou elles viennent en foule, elles m'accablent de leur nombre et de leur force. Dix volumes par jour n'auraient pas suffi. Où prendre du temps pour les écrire ? En arrivant je ne songeais qu'à bien dîner. En partant je ne songeais qu'à bien marcher. Je 25

sentais qu'un nouveau paradis m'attendait à la porte. Je ne songeais qu'à l'aller chercher.

1. En mouvement.

Page 8: TE EXXTE NN°°11 - WordPress.com · 2019. 3. 11. · Victor Hugo, Les Châtiments, « Lux », 1853. Lux Temps futurs ! vision sublime ! Les peuples sont hors de l’abîme. Le désert

Texte n°9 : Montesquieu, Lettres persanes, lettre XXX, 1721.

Les Lettres Persanes est un roman épistolaire qui présente la correspondance de

deux Persans et leurs compatriotes restés en Perse. Ils font part de leurs étonnements

devant le comportement des Parisiens et devant leurs découvertes. Ce procédé permet de

faire passer critique, satire et réflexion philosophique sous une forme agréable. Dans cette

lettre 30, l'un des Persans Rica, raconte une aventure personnelle.

Rica à Ibben, à Smyrne.

Les habitants de Paris sont d’une curiosité qui va jusqu’à l’extravagance. Lorsque

j’arrivai, je fus regardé comme si j’avais été envoyé du ciel : vieillards, hommes, femmes,

enfants, tous voulaient me voir. Si je sortais, tout le monde se mettait aux fenêtres ; si j’étais

aux Tuileries, je voyais aussitôt un cercle se former autour de moi ; les femmes mêmes 5

faisaient un arc-en-ciel nuancé de mille couleurs, qui m’entourait. Si j’étais aux spectacles, je

voyais aussitôt cent lorgnettes1 dressées contre ma figure : enfin jamais homme n’a tant été

vu que moi. Je souriais quelquefois d’entendre des gens qui n’étaient presque jamais sortis

de leur chambre, qui disaient entre eux : « Il faut avouer qu’il a l’air bien persan ». Chose

admirable ! Je trouvais de mes portraits partout; je me voyais multiplié dans toutes les 10

boutiques, sur toutes les cheminées, tant on craignait de ne m’avoir pas assez vu.

Tant d’honneurs ne laissent pas d’être à la charge : je ne me croyais pas un homme si

curieux et si rare ; et quoique j’aie très bonne opinion de moi, je ne me serais jamais

imaginé que je dusse troubler le repos d’une grande ville où je n’étais point connu. Cela me

fit résoudre à quitter l’habit persan, et à en endosser un à l’européenne, pour voir s’il 15

resterait encore dans ma physionomie quelque chose d’admirable. Cet essai me fit connaître

ce que je valais réellement. Libre de tous les ornements étrangers, je me vis apprécié au plus

juste. J’eus sujet de me plaindre de mon tailleur, qui m’avait fait perdre en un instant

l’attention et l’estime publique ; car j’entrai tout à coup dans un néant affreux. Je demeurais

quelquefois une heure dans une compagnie sans qu’on m’eût regardé, et qu’on m’eût mis 20

en occasion d’ouvrir la bouche ; mais, si quelqu’un par hasard apprenait à la compagnie que

j’étais Persan, j’entendais aussitôt autour de moi un bourdonnement : « Ah ! ah ! monsieur

est Persan ? C’est une chose bien extraordinaire ! Comment peut-on être Persan ? »

De Paris, le 6 de la lune de Chalval, 1712.

Page 9: TE EXXTE NN°°11 - WordPress.com · 2019. 3. 11. · Victor Hugo, Les Châtiments, « Lux », 1853. Lux Temps futurs ! vision sublime ! Les peuples sont hors de l’abîme. Le désert

SEQUENCE N 2: MOTS DE VOYAGEURS Problématiques : Comment le voyage permet-il d’interroger les notions d’identité et de diversité ? Le voyage et son récit peuvent-ils contribuer à former l'homme ?

DOCUMENTS COMPLEMENTAIRES

Martin PARR, Touristes à l’Acropole, 1991.