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SOMMAIRE

EDITORIAL

Directeur de la publication:ACHOURI Abdelkader

Directeur de la rédaction:ACHOURI MohamedEmail: [email protected]

Coordinatrice de la rédaction:ACHOURI Amina

Directrice technique:ABDELATIF Rabea

Comité de rédaction:AIT TaninaMAYA HarchaZAHAF Loubna NAHLIL DjaouidaSOLTANE HaniaBADREDINE SawsenRAMZY Chahra HAMDI Rania

Secrétaire de la rédaction:FORTAS Fifi

Conception: BRIKH Kamel

Correction: GHARNAOUT Amar

Pr Djellali LouafiPr Abdelkrim ZerhouniPr Farid HaddoumPr Tahar RayanePr Mustapha BenmansourPr Abderazrak DahdouhPr Mohamed Benabadji

Comité scientifique:

ISSN

2253

-00

6118

8-20

12D

épôt

léga

l

Mars 2014 N° 28

Santé-Mag: Magazine mensuel de la santé  Edité par Media Pub SantéAdresse: Coopérative El Mehdia, Bt N°2, les Vergers, Bir Mourad Raïs, Alger.Tél./Fax: +213 (0) 21 44 91 11Mob.: +213 (0) 550 95 46 53 / +213 (0) 661 49 57 23Site web: www.santemag-dz.comEmail: [email protected]

8911121314

Dr Mohamed-Salah Bali: Nous lançons un appel aux autorités.... Pr Kamel Bouzid: La CNAS doit nous donner les raisons du non-remboursement.... Pr Ahmed Bendib: Le plan cancer doit être inséré au système de santé reformé.... Pr Mohamed Oukkal: Le plan cancer insiste sur la prévention et le dépistagePr Rabah Ferhat: Sans une volonté politique, le plan cancer ne pourra rien régler Pr Djamel Djennaoui: Une plus grande connaissance du cancer du nasopharynx...

Évènement

343739

434648

Approche diagnostique et thérapeutique de la dystrophie musculaire de Duchenne... Lupus érythémateux disséminé (LED) Les Biphosphonates et leur application, dans le cancer du sein métastatique

Diagnostic et traitement de la carence en fer sans anémieThérapie ciblée, dans les cancers colorectaux métastatiques ... Vitrification des gamètes et ovocytes

Recherches médicales

16181922232425262833

Pr Abdelkrim Zerhouni: Le prélèvement d’organe ne peut se faire qu’après accord.... Pr Farid Haddoum: Le “tout hémodialyse” est en totale contradiction... Pr Tahar Rayane: Il y a, donc, beaucoup de facteurs de risques.... Pr Antar Degaichia: Insuffisance rénale; sur le plan préventif, beaucoup reste à faire Les spécialistes regrettent le sous-développement de la greffe rénalePr Mustapha Benmansour: La gravité de la maladie, la lourdeur du traitement... Pr Abderrezak Dahdouh: La greffe rénale est un must, en matière de santé publiqueMaladie de Berger L’amyloïdose rénalePr Mohamed Benabadji: Les malades arrivent, souvent, dans nos services de néphrologie...

Dossier

2456

Dr Ilyes Baghli: Nous avons présenté des solutions, à la tutelle... Plus de 360 millions de sourds et malentendants, dans le mondePr Mahmoud Ait Kaci-Ahmed: L’illettrisme est un facteur aggravant la maladie d’AlzheimerPr Abderrezak Dahdouh: Les cancers urologiques connaissent une incidence...

Actualité

Nous voici arrivés au terme de deux années de labeur, à l'issue desquelles nous avons tenté de tenir deux paris importants:

1. inscrire, dans le champ de la communication, un magazine à caractère médical, destiné à un public averti et susceptible, par ailleurs, d’intéresser une communauté scientifique exigeante, prête à l’écoute des découvertes dans son domaine, qui est celui des pratiques médicales, ou dans les avancées pharmaceutiques.2. couvrir l’actualité, au mieux, grâce à une équipe de journalistes spécialisés, à travers ses différentes manifestations, en Algérie et dans le monde et être à jour des dernières découvertes, en matière de techniques de transplantation, de pratiques opératoires et de traitements.

Au vu de l’audience, atteinte par Santé Mag, nous ne pouvons qu’être satisfaits du travail accompli durant ces deux années de labeur.Nous nous assignons, dès lors, pour cette troisième année qui se dessine,

l’objectif de toucher un lectorat aussi nombreux et large que possible, grâce à une formule d’abonnement annuel (que vous retrouvez à partir du n° 23 de notre magazine) et qui se promet de le faire parvenir, mensuellement, à tous nos abonnés, quel que soit le lieu où ils se trouvent; et ce, grâce à un système de distribution, qui est mis en œuvre à partir du mois de janvier 2014.Nous demeurerons fidèles à notre ligne éditoriale, qui consiste à suivre les grands événements scientifiques et à être au fait des découvertes du monde médical. Nous restons, ainsi, au contact des avancées médicales et pharmaceutiques, nécessaires pour mieux soigner et mieux guérir.Et dans tout cela, un seul baromètre: celui de nos lecteurs qui saura nous encourager, nous en sommes convaincus – c’est un gage de pérennité - à aller de l’avant, en s’inscrivant dans notre démarche de formule d’abonnement et nous permettre, par la même, de les satisfaire toujours plus et toujours mieux.

La rédaction

42 Formulaire d’abonnement à Santé Mag

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ACTUALITÉ

2 Santé-MAG N°28 - Mars 2014

La presse française du 14 février 2014 a révélé l'étendue de la contamination nucléaire, en Algérie, suite à l'essai nucléaire du 13 février 1960, à Reggane ! La contamination radioactive et son impact sur la santé sont bien démontrés, par les spécialistes, dans le domaine, qui précisent, en outre, que les effets de la radioactivité persistent plus de 100 ans après les essais nucléaires. La population du Sud algérien est la plus exposée au risque de maladies graves que celle des autres régions; en raison des poussières radioactives, toujours répandues dans les eaux souterraines et la flore. Cela représente, inévitablement, un danger pour la santé humaine et animale. Le Docteur Ilyes Baghli, président de la Société algérienne de nutrition et de médecine ortho-moléculaire, y revient, dans cet entretien, accordé à Santé Mag et surtout, propose des solutions, pour contrecarrer ces effets néfastes, pour la santé humaine.

Santé Mag: Existe-t-il un réel impact de la radioactivité sur notre santé?

Dr Ilyes Baghli: Oui, les études ont mon-tré que l'atteinte directe n'est que de 20%, alors que l'atteinte indirecte; par l'eau, particulièrement, l'air, le bétail, les aliments et les matériaux de construc-tion représentent 80%. Quelles sont, géographiquement, les zones de l'Algérie les plus touchées par ces irradiations ?Toute l'Algérie est touchée par les radia-tions nucléaires; mais, surtout, les zones où ont eu lieu les essais nucléaires fran-çais: Reggane, dans la wilaya d'Adrar ! A noter que le 1" essai du 13/02/2014

appelé ‘’Gerboise bleue’' était de 17 kilo-tonnes, alors que celle de Hiroshima du 06/08/1945 était de 15 kt et celle de Nagazaki était de 17 kt. Trois autres explosions furent effec-tuées, en ce lieu, par la suite: 01/04/1960 Gerboise blanche, moins

de 5 kt 27/12/1960 Gerboise rouge, moins de

5 kt 25/04/1961 Gerboise verte, moins de

5 kt.

In Ecker dans la wilaya de Tamanrasset !Après le dernier essai atmosphérique Gerboise verte, les 13 tirs souterrains,

qui suivirent, furent effectués plus au sud, près d'In Ecker, dans le massif du Hoggar. Quatre essais souterrains, sur treize, n'ont pas été totalement conte-nus, ou confinés: Béryl du 01/05/1962, Améthyste du 30/03/1963, Rubis du 20/10/1963 et Jade du 30/05/1965.Les essais Béryl et Améthyste ont conduit à une irradiation dépassant le seuil réglementaire. La France procédera, finalement, à 17 essais nucléaires dans le Sahara, de 1960 à 1966. Sans oublier, les essais chimiques réalisés dans le champ de tir B2-Namous à Hamaguir, dans la wilaya de Bechar !

"Nous avons présenté des solutions, à la tutelle, pour contrecarrer les effets néfastes des poussières radioactives, sur la santé"

Dr Ilyes Baghli*, à Santé Mag,

Propos recueillis par Tanina Ait

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ACTUALITÉ

3Santé-MAGN°28 - Mars 2014 3

Quelle a été l'étendue de la conta-mination radioactive, en Algérie et dans les pays limitrophes, suite à l'ex-plosion nucléaire "Gerboise bleue" du 13/02/1960 ?Il faut savoir que, selon la cartographie, déclassée, du secret-défense, par l'ar-mée française, démontre les données suivantes:

Le 14/02/1960: In Salah en Algérie, Agadez au Niger et N'Djamena au Tchad furent contaminées, en raison d'un vent sud-est, le jour de l'explosion de la Ger-boise bleue.

Le 15/02/1960: Yaoundé, au Cameroun, fut contaminée.

Le 16/02/1960: Tamanrasset en Algé-rie, Niamey au Niger, Ougadougou au Bukina Fasso furent contaminées.

Le 17/02/1960: Bamako du Mal, Abi-djan en Côte d'Ivoire, Accra au Ghana et Lagos au Nigéria furent contaminées.

Le 18/02/1960: Conakry de la Guinée fut contaminée.

Le 19/02/1960: Tindouf en Algérie, Nouakchout en Mauritanie, Tripoli en Libye furent contaminées.

Le 20/02/1960: Ouargla en Algérie, Dakar au Sénégal furent contaminées.

Le 21/02/1960: Béchar fut contaminée.

Le 24/02/1960: Alger, Oran, Tlemcen en Algérie, Oujda, Fès au Maroc, Ali-cante en Espagne furent contaminées.

Le 25/02/1960: Rabat, Tétouane au Maroc, Sétif, Constantine, Annaba en Algérie, Bedja, Tunis en Tunisie, le sud de la Sicile, le sud de la Corse et le sud de l'Espagne furent contaminées.

Au soir du 25/02/1960: Toute l'étendue de l'Algérie fut, totalement, contaminée.

Quelles sont les conséquences, à long terme, de cette contamination?Les conséquences des irradiations sont désastreuses pour la faune, la flore, l'homme et l'environnement. Faut-il le rappeler, la demi-vie de l'uranium 235 est de 24 000 ans! D'ailleurs, sur le ter-rain, la radiation est toujours aussi forte, plusieurs dizaines de fois plus forte que la radioactivité naturelle. Différentes pathologies dont les cancers (cancer de la thyroïde, cancer du poumon, can-cer du sein, leucémie) et certaines ano-malies congénitales, etc. peuvent avoir été induites par l'irradiation ainsi subie. Des poussières radioactives, répandues dans les eaux souterraines et la flore,

représentent un danger pour la santé humaine et animale.

Existe-t-il d'autres formes de contami-nations, néfastes pour la santé?Les radiations provoquées par les examens radiologiques peuvent être source de rayonnements: Radiographie d'un membre, l'équiva-

lent d'un jour et demi. Panoramique dentaire, l'équivalent de

4 jours. Radiographie pulmonaire, l'équiva-

lent de 7 jours. Mammographie, l'équivalent de 20

jours. Scanner du crâne et radiographie ab-

dominale, l'équivalent de 300 jours. Scanner du thorax, l'équivalent de

900 jours. Scanner abdomino-pelvien, l'équiva-

lent de 1500 jours.

Pour ceci, il est nécessaire d'aller vers des supplémentations préventives quotidiennes, pour assurer une méde-cine préventive à chaque citoyen, dans un esprit serein et pour assurer une réduction des pathologies chroniques dégénératives, dues aux radiations nucléaires et aux radiations radiolo-giques d'origine iatrogène; sans oublier les effets de la pollution atmosphé-rique, due au monoxydes de carbone et de la pollution électromagnétique, due aux différents réémetteurs de télé-communications, qui nous permettent, par contre, de vous communiquerces recommandations: Prendre soin de soi-même est possible, loin d'un esprit de thématique tabou mais dans un esprit de prévention, ri-goureux et efficace.

Y a- t-il des solutions, pour réduire leur impact sur la santé?Oui, car la principale source de conta-mination est tardive, constituant 80% des nuisances radioactives. Il existe un protocole préventif, présenté par la SANMO, combinant le protocole japo-nais-américain et le protocole autri-chien, adopté en Chine, pour améliorer les moyens de prévention, vis à vis des radiations nucléaires, par une supplé-mentation efficace. Il reste entendu que votre Société sa-vante, la SANMO, a reçu des sommités en la matière, tels que les Professeurs Thomas Levy, des Etats Unis, Atsuo yanagisawa, du Japon, George Birk-mayer, de l'Autriche, Gilbert Crussol, de l'Espagne.

Quelles sont les solutions, qu'ils ont pro-posées, pour prévenir les effets néfastes des irradiations ?Le protocole, présenté par Pr George Birkmayer se base sur une dose, quoti-dienne, de 80 mg de NADH.Le protocole, présenté par le Pr Atsuo Yanagisawa se base sur une dose quo-tidienne de: Vitamine C: de 3 à 12 grammes, selon

les zones et 25 grammes, pour les zones hautement contaminés. Vitamine E: 200 à 400 mg Sélénium: 100 à 400 ug "micro-

grammes" Acide lipoïque: 200 à 600 mg

Avez-vous proposé ces solutions, à la tutelle ?Oui, au ministère de la Santé et à la di-rection centrale de la Santé militaire.

Avez-vous des cas concrets à nous citer?Il suffit de voir l'étendue de l'épidémie des maladies chroniques dégénératives, en Algérie, à type de sclérose en plaque, maladie d'Alzheimer et cancer ! Dans la pratique préventive, l'expérience réalisée à Fukushima, au Japon, suite à l'accident nucléaire de mars 2011, est significatif:Fukushima, au Japon, suite à l'accident nucléaire du 13/03/2011, suite au séisme et tsunami du 11/03/2011, où la vitamine C, à 25 grammes, par voie intraveineuse, a été administré à 16 employés, qui ont eu, grâce à cette méthode et celles clas-siques, une préservation des facteurs cancérigènes, par rapport au restes des employés, qui n'ont eu recours qu'aux méthodes classiques: tenue spéciale, douche et nettoyage.

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ACTUALITÉ

4 Santé-MAG N°28 - Mars 2014

Plus de 360 millions de sourds et malentendants, dans le monde

Suite à ceci la JCIT (collège japonais de thérapie intraveineuse), présidé par le Pr Atsuo Yanagisawa et co-signé par le Pr Burton Burkson; Thomas Edward Levy; Ronald Hunnighake; Bradford Weeks; Steven Hickey et Masachi Uwabu, le 29/03/2011, émit les recommandations suivantes, pour la prévention, vis à vis des radiations nucléaires:

Vitamine C: 1 à 3 grammes 3 à 4 fois par jour, ou Vitamine C liposphérique: 1 à 2

grammes, deux fois par jour. Acide alpha-lipoïque: 100 à 300 mg,

deux fois par jour. Sélénium: 50 ug à 200 ug, deux fois

par jour. Vitamine E: 100 à 200 mg, deux fois

par jour.

Pour ceux qui travaillent au niveau des zones contaminées, en plus de ces re-commandations, une perfusion de vita-mine C, de 25 grammes, par voie intra-

veineuse. Ce protocole a été approuvé par la SAN-MO, suite aux deux présentations du Pr Atsuo Yanagisawa, Président de la JCIT et de l'ISOM (Société internationale de médecine ortho-moléculaire), dont la SANMO est membre depuis février 2011, lors des séminaires organisés à Alger, le 24 janvier 2013 et le 25 janvier 2014, en présence des membres de la SANMO et des médecins de la direction centrale de la Santé militaire !A ce protocole, 80 mg de NADH, ou co-Enzyme1, ou vitamine B3 enrichie à l'hy-drogène, élaborée grâce aux travaux du Pr George Birkmayer, en Autriche, est, également, préconisée; vu les études ayant prouvé l'effet potentiel du NADH sur la vitamine C et vice-versa, effec-tuées au niveau du laboratoire de biolo-gie de l'université de Tlemcen, dirigé par le Pr Hafida Merzouk et vu les études effectués en Chine, qui ont prouvé l'effi-cacité du NADH, dans la protection vis à vis des radiations nucléaires. La SANMO préconise de combiner ces deux mé-

thodes, pour optimiser la prévention !Existe-il une supplémentation nutritive efficace de la vitamine C ?Parmi la prévention alimentaire, les ali-ments riches en vitamine C restent in-suffisants. Pour assurer une protection optimum: 170 mg de vitamine C, par 100 grammes de persil. 100 mg de vitamine C, par 100 grammes de kiwi. 55 mg de vitamine C, par 100 grammes de fraise. 55 mg de vitamine C, par 100 grammes d'orange.Mais, il n'est pas évident d'atteindre la dose de 3 grammes, minimum, par une simple alimentation, car les besoins sont élevé; mais, ceci, néanmoins, permet de réduire le déficit !

La prévention et la prise de conscience est la voie nécessaire, pour un lende-main meilleur, pour la santé du citoyen !

* Dr Ilyes Baghli, président de la Société algérienne de nutrition et de la médecine ortho-moléculaire.

A l'occasion de la Journée interna-tionale de l'audition, qui se tient ce 3 mars, l'OMS publie les résultats d'une enquête, selon lesquels 360 millions de personnes souffrent d'une déficience auditive, dans le monde. L'agence onu-sienne indique que de nombreux pays ne disposent pas des capacités néces-saires, pour prévenir et prendre en charge ces troubles.Avec le vieillissement de la population, la perte auditive touche plus d'individus que jamais. Un tiers des plus de 65 ans - soit 165 millions de personnes dans le monde - sont atteints d'une perte auditive. Mais, ce ne sont pas les seuls touchés. Chez les enfants, les otites non

traitées figurent parmi les principales causes de pertes auditives. Notamment, dans les pays en voie de développe-ment. Par ailleurs, certaines maladies in-fectieuses, comme la rubéole, les oreil-lons, ou encore, la méningite peuvent être à l'origine de troubles auditifs sé-vères. Or, toutes ces maladies peuvent être prévenues, par la vaccination.

PEU DE PAYS S'INTÉRESSENT À L'AU-DITIONLes causes d'une baisse de l'audition sont multiples. L'exposition à un bruit excessif, les lésions de l'oreille, des trau-matismes crâniens et le vieillissement sont les plus courantes. Les troubles

génétiques et la prise de médicaments sont, également, susceptibles de provo-quer une perte auditive. D'après l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), "seulement 32 des 76 pays, qui ont répondu à l'enquête, ont mis au point des plans et des pro-grammes, pour combattre les affections auriculaires". Pour Etienne Krug, Direc-teur du département Prévention de la violence, des traumatismes et du han-dicap de l'OMS, "les gouvernements et les partenaires doivent investir en faveur de la prise en charge de ces troubles de l’audition. Il est indispensable de couvrir l'ensemble de la population, y compris les personnes défavorisées"

Parmi les personnes qui ont besoin d'une aide auditive, moins d'une sur 40 en dispose, dans le monde

Santé-MAG N°28 - Mars 20144

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ACTUALITÉ

5Santé-MAGN°28 - Mars 2014 5

Par Tanina Ait

Pr Mahmoud Ait Kaci-Ahmed*, à Santé Mag:

En Algérie, la prévalence de la mala-die d’Alzheimer n’est pas très connue, contrairement à l’épilepsie, ou la schizophrénie, dont les taux sont stables, a indiqué le Professeur Mahmoud Ait Kaci, lors d’une rencontre, à l’hôtel Hil-ton, qui a rassemblé des experts natio-naux et étrangers.

Ce que l’on sait, en revanche, précise le neurologue, est que si la maladie d’Alzheimer existe, de par le monde, dans notre pays, cette pathologie dé-pend, certes, de l’âge; mais, également, aujourd’hui, de l’illettrisme, qui est un facteur aggravant. Or, il faut dire qu’en Algérie, l’école a n’été rendue obliga-toire qu’à partir de 1962; aussi, ce fac-teur a plus d’impact chez nous, que par ailleurs. En effet, les personnes

instruites se protègent, mieux que les analphabètes, de cette maladie dégéné-rative, bien que les lésions existent chez elles, également.D’autres facteurs sont mis en cause, comme le diabète et l’hypertension artérielle, ajoute Monsieur Mahmoud Ait Kaci. Or, ces deux pathologies sont très répandues chez nous. De même, sou-ligne le spécialiste, la pratique d’une ac-tivité physique protège la personne de cette maladie;  mais, peu de gens sont adeptes du sport, dans notre pays. En tout état de cause, l’expert préconise une étude, en Algérie, pour connaitre la prévalence de la maladie, qui doit être très importante. Concernant le diagnostic de L’Alzhei-mer, celui-ci est relativement facile, dit-il. Tous les moyens sont disponibles;

en l’occurrence, la TDM, l’IRM et c’est surtout, un diagnostic d’interrogatoire, dont il s’agit. Lorsque la maladie est soupçonnée, des tests neuropsycholo-giques sont effectués, lors des consul-tations ‘’mémoire’’. Le Pr Ait Kaci fera rappeler, également, que ce genre de consultation existe un peu partout, en Algérie (au CHU de Bab El Oued, à l’EHS Ait Idir, au CHU Mustapha  et même, à l’intérieur du pays). La maladie d’Alzheimer, il y a quelques années, était considérée comme une maladie psychiatrique, que seuls les psychiatres prenaient en charge et elle était, en outre, considérée comme une maladie incurable et jusqu’à l’heure actuelle. Cependant, aujourd’hui, se sont les neurologues qui la soignent, car on sait que cette pathologie relève de la neurologie. On commence à mieux connaître cette maladie, même si elle reste, encore, incurable, par absence de moyens de traitement, souligne le professeur en neurologie. En revanche, des médicaments, pour retarder de quelques années, la démence, liée à la maladie, existent. Au demeurant, la maladie commence à être connue un peu de tous, car nous constatons, au niveau de notre service, que des enfants, par exemple, ramènent leurs parents en consultation. En effet, car contrairement à l’idée assez répan-due, qui considère que l’Alzheimer est une fatalité et qu’on n’y peut rien, les nouvelles générations savent pertinem-ment, en revanche, que des moyens existent, pour ralentir quelque peu la progression de la pathologie et dis-penser aux patients, par là même, une meilleure qualité de vie, relativement, conclut le spécialiste

* Pr Mahmoud Ait Kaci-Ahmed, chef de service de neurologie, à EHS Ali Ait Idir - Alger

"L’illettrisme est un facteur aggravant la maladie d’Alzheimer"

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ACTUALITÉ

6 Santé-MAG N°28 - Mars 2014

Dans cette interview, le Professeur Abderrezak Dahdouh aborde la pro-blématique de la prise en charge de la maladie rénale et urologique. Il parle de techniques innovantes, pratiquées dans le service, qu’il dirige au CHU de Constantine.

Santé Mag: Lors du forum de DKnews, vous avez fait une présentation du ser-vice d'urologie et de transplantation rénale du CHU de Constantine. Pouvez-vous nous parler, davantage, des réali-sations de ce service et de ses particu-larités

Pr A. Dahdouh: En fait, nous avons fait une présentation concernant l’Etablis-sement hospitalier spécialisé d’uro-né-phrologie Daksi, de Constantine, dont le service d’urologie et de transplantation rénale fait partie. Notre EHS d’uro-né-phrologie est un modèle, jusqu’à main-tenant, unique, en Algérie, avec deux services complémentaires, sur le plan clinique.Il s’agit des services d’urologie et de transplantation rénale et de néphrologie et de dialyse, qui bénéficient de l’apport précieux de cinq autres services, dans le même établissement. Il s’agit des ser-vices d’anatomie et de cytologie patho-logiques, d’imagerie médicale, de bio-chimie, de bactériologie et du centre de transfusion sanguine (CTS).Notre service d’urologie et de trans-plantation rénale assure la prise en charge de toutes les pathologies, rele-vant de notre spécialité, avec les tech-niques modernes et mini-invasives. Nous citerons, en particulier, la prise en charge de la maladie lithiasique: bilan diagnostique et étiologique, utilisant les moyens les plus modernes (spec-trophotométrie à l’infrarouge…); diffé-rentes modalités et techniques de trai-tement (traitement médical, traitement chirurgical à ciel ouvert, endo-urolo-

gique, uretéroscopie rigide et souple, néphro-lithotomie Per Cutanée avec fragmentation des calculs par les ondes de choc hydro-électriques, ou bien au Laser, traitement par lithotripsie extra-corporelle (LEC)…).Nous citerons, également, la prise en charge de tous les cancers urologiques, qui connaissent une incidence sans cesse en hausse, en raison de l’augmen-tation de l’espérance de vie, en Algérie, ainsi que d’autres facteurs pré-dispo-sant. Certains cancers urologiques, dont le cancer de la prostate, le cancer de la vessie et le cancer du rein sont classés parmi les plus fréquents de l’homme et posent un problème, réel, de santé publique.Les cancers urologiques de la région sont pris en charge au niveau de notre structure, pour le diagnostic, le traite-ment chirurgical et/ou oncologique. En matière d’oncologie, notre unité d’uro-oncologie dispense tous les soins rela-tifs à cette pathologie: de la chimiothé-rapie jusqu’aux thérapies ciblées. Nous citerons, également, la prise en charge

de la pathologie prostatique bénigne et des troubles du bas appareil urinaire, en général, où toutes les thérapies sont dispensées: traitement médical, traite-ment chirurgical, traitement par résec-tion endoscopique mono-polaire et bipolaire, vaporisation de la prostate au laser à diode, énucléation de la prostate au laser Holmium Yag (Holep)….La coeliochirurgie et la rétropérinéos-copie sont, également, des techniques nouvellement pratiquées au niveau de notre service, avec des résultats très sa-tisfaisants, sur le plan du coût, du séjour hospitalier et de la réinsertion sociopro-fessionnelle des patients.

Où en est la greffe rénale, à l'est du pays? Combien d'insuffisants rénaux recensez-vous, dans cette région ?La structure de notre établissement est tout à fait adéquate, pour la pratique de la greffe rénale. En dépit de la dis-ponibilité des plateaux techniques et d’une équipe multidisciplinaire, tou-jours engagée, pour la pratique de la transplantation rénale et le suivi des

"Les cancers urologiques connaissent une incidence, sans cesse, en hausse"

Pr Abderrezak Dahdouh*, à Santé Mag,

Propos recueillis par Rania Hamdi

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ACTUALITÉ

7Santé-MAGN°28 - Mars 2014 7

Un patient diabétique doit, impérativement, faire contrôler ses gencives une à deux fois, par an. Parmi les complications, liées au diabète de type 2, les parodontites sont, trop souvent, négligées. Or, ces dernières peuvent être associées aux maladies cardiovasculaires.

C'est le message qu'a souhaité faire passer le Pr Philippe Bouchard, responsable de la paro-dontologie à l'hôpital Rothschild, à Paris, au cours du congrès de la Société Francophone du Diabète.Le diabète n'entraîne pas de manifestations sur les dents elles-mêmes. Il n'est, donc, pas à l'origine de caries, par exemple. Mais, deux maladies, présentes au niveau de la bouche, y sont associées. Les gin-givites, tout d'abord: des inflammations de la gen-cive, liées à la présence de bactéries. Mais, aussi, les parodontites qui sont, en réalité, le stade le plus avancée des gingivites. Dans ce cas, les bactéries attaquent, directement, les tissus de soutien de la dent. Le principal risque étant de la perdre ! Selon le Pr Bouchard, "la prévalence des parodontites augmente, en cas de diabète; qu'il soit de type 1, ou de type 2". En effet, cette affection touche deux fois plus les diabétiques que les non-diabétiques. Autre constat, seuls les patients, dont le diabète n'est pas équilibré, sont à risque de parodontites.

DES GENCIVES À SURVEILLERPar ailleurs, le diabète aggrave les maladies affec-tant les gencives. "Il est indispensable que les dia-bétologues informent leurs patients du risque, aug-menté, de maladies parodontales et de la nécessité d'une visite, annuelle, chez le chirurgien-dentiste", indique le Pr Bouchard. "Par ailleurs, les praticiens doivent, également, faire ouvrir la bouche de leurs patients et observer l'état de leurs gencives". Pour le Pr Philippe Bouchard, "la parodontite est une complication comme les autres. Elle doit être surveillée, en tant que telle. Or, aujourd'hui, ce n'est pas, forcément, le cas. Elle est considérée comme peu grave. Pourtant, les relations entre maladies parodontales et risques cardiovasculaires sont, amplement, prouvées", insiste-t-il. Mais, pas seu-lement. Des études ont, en effet, montré que ces affections des gencives peuvent être associées à des cancers. A surveiller, donc, de très près...

Le diabète s'en prend, aussi, à nos gencives

malades greffés, le nombre de donneurs vivants apparentés, à l’est du pays, reste en deçà de nos attentes. Pour cela, plus d’infor-mation et de sensibilisation sont nécessaires.Quant à la greffe rénale, à partir des sujets en état de mort encé-phalique, elle nécessite plus de mobilisation, une volonté politique affichée et plus d’engagement de la part de l’Agence nationale de greffe. Les premières greffes rénales, à partir du cadavre, en Algérie, remontent à 2002 et ont été réalisées à Constantine.Nous attendons, toujours, sa pérennisation grâce à un cadre juridique et réglementaire convenable et une organisa-tion médicale et extra-médicale bien adaptée. D’autant plus que le nombre d’in-suffisants rénaux ne cesse d’aug-menter et que la greffe rénale reste le meilleur moyen thérapeu-tique, sur les plans médical, éco-nomique, social et familial. Rien qu’au niveau de l’est algérien, on recense plus de 6000 insuffisants rénaux, actuellement, sous dia-lyse.

Vous avez affirmé, lors de la ren-contre d'Alger, que vous rencon-trez, de plus en plus, de cas de lithiases dans les reins. Quelles en sont les causes et l'impact sur la santé ?La lithiase urinaire connaît une augmentation notable de sa pré-valence et pose un réel problème de santé publique et se répercute négativement sur les secteurs économiques, par l’absentéisme causé et les incapacités partielles causées aux cadres profession-nels. Les causes sont, évidem-ment, les changements enregis-trés dans les régimes alimentaires des algériens et l’hygiène de vie. Les moyens modernes, mini-in-vasifs, de traitement doivent être développés et généralisés, pour la prise en charge de ces lithiases, afin de minimiser l’impact de cette maladie lithiasique, sur le plan so-cioprofessionnel et économique.

Vous pratiquez, dans votre ser-vice, la technique de néphro-litho-tomie percutanée. En quoi consiste-t-elle, exacte-

ment et quel est son intérêt ?La néphro-lithotomie per cutanée (NLPC) est une technique endo-urologique, qui consiste à aborder le rein par voie per cutanée, sous contrôle radioscopique et d’intro-duire un endoscope, afin de visua-liser la lithiase à l’intérieur du rein, de la fragmenter et de l’extraire, en utilisant une source d’ondes de choc extracorporelle (laser ou hydro-électrique…).Cette technique s’adresse, prin-cipalement, aux grosses lithiases coralliformes, qui ne peuvent pas être traitées par les autres procé-dés mini-invasifs et où la chirurgie à ciel ouvert laisse des séquelles sur le parenchyme rénal, qui en-traîneraient sa détérioration, à moyen ou à long terme.

Autant que vos confrères, vous plaidez pour le développement de la greffe rénale. Quels en sont les freins, selon votre propre expé-rience ?La greffe rénale représente le meilleur moyen thérapeutique, le moins coûteux, le plus efficace, le mieux adapté et le mieux accepté. Sa réalisation nécessite l’organi-sation du prélèvement à partir du cadavre. Sur nos routes, nous enregistrons, annuellement, plus de 4000 morts, dans les accidents de la circulation. Un ramassage médicalisé, rapide et efficace de ces accidentés pourrait diminuer le nombre de décès et offrir aux insuffisants rénaux une source inépuisable de reins. L’Agence Nationale de Greffe (ANG) doit être plus dynamique et plus en-treprenante, par l’élaboration d’un programme national de greffes, la mise en place d’un registre de donneurs volontaires, l’établis-sement d’un fichier national des insuffisants rénaux et son actuali-sation permanente et l’adéquation d’un cadre juridique et réglemen-taire permettant de clarifier et de faciliter les relations entre les différents secteurs, qui doivent participer à la réussite de ce pro-gramme national de greffe

* Pr Abderrezak Dahdouh, chef du service urologie et transplantation rénale, EHS Daksi – Constantine.

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ÉVÈNEMENT

Santé-MAG N°28 - Mars 20148

Santé Mag: Vous venez d’ouvrir un centre privé, dédié aux traitements du cancer. Pouvez-vous nous en parler ?

Dr M. S. Bali: En effet, un nouveau centre de radiothérapie a vu le jour, en octobre 2013. Il dispose de deux accélé-rateurs de dernière génération et on a commencé à traiter les malades atteints de cancers. Ce centre vient en appui au secteur pu-blic. Il dispose d’une capacité d’accueil de 100 à 120 patients, par jour. C’est un centre anti-cancer qui dispose d’un

service d’oncologie médicale, de radio-thérapie, de chirurgie oncologique, d’un plateau d’imagerie médicale, d’un labo-ratoire d’anatomo-pathologie et de bio-logie; donc, tout ce qui est nécessaire, afin que le patient soit pris en charge dès le diagnostic et suivi à toutes les phases concernant le traitement en can-cérologie.

Avez-vous rencontré des obstacles, quant à la mise en œuvre de ce centre anti-cancer, à l’est du pays ?L’autorisation de mettre en route notre

projet date de 2007 et nous avons réus-si à mettre en œuvre notre projet en un temps record. En 2009, nous avons entamé les travaux, qui ont pris fin en 2012. L’année 2013 a vu le démarrage des traitements; ce, malgré toutes les difficultés administratives, qui n’ont pas manqué de se dresser.

Il est dit que votre centre est à la pointe du progrès. Pouvez-vous nous en dire plus ?Effectivement, nous disposons de maté-riels de dernière génération. C’est, pour

"Nous lançons un appel aux autorités, pour mettre en place une convention médicale entre la Cnas et les centres de santé du secteur privé"

Entretien réalisé par Tanina Ait

Dr Mohamed-Salah Bali*, à Santé Mag,

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 99

la première fois, en Algérie, qu’existe une machine équipée des moyens relatifs à la technique Rapidal. On a pu, donc, traiter nos patients avec des technologies identiques à celle celles utilisées aux Etats Unis, ou en Europe.

L’équipe médicale est-elle algérienne ? Notre équipe médicale est, totalement, algérienne. Bien-sûr, on a bénéficié de 6 formations, programmées à l’étran-ger, ainsi que sur site. Par ailleurs, des experts étrangers sont venus nous aider à mettre en place ces nouvelles techniques sophistiquées et actuelle-ment, nous sommes entièrement indé-pendants et tout le staff est algérien.

Les rendez-vous, en radiothérapie, sont-ils obtenus en temps voulu ? Pour les rendez-vous, on n’est pas sa-turé. Les malades sont pris en charge dans la semaine; voire, dix jours. Ils commencent leur traitement effectif et ils sont satisfaits. Quels sont les coûts des traitements et sont–ils remboursés par la Sécurité sociale ?Les coûts s’élèvent à 30; voire, 50 millions de centimes, la cure de deux mois. Cependant, la CNAS ne joue pas le jeu et il n’y a pas, encore, de conven-tion entre nos centres de soins et la Sé-curité sociale. Alors, les malades bien qu’assurés sociaux, par ailleurs, payent de leur propre poche des traitements forts coûteux et qui, malheureusement, ne sont pas à la portée de tout citoyen algérien. Aussi, à partir de ce forum, organisé à l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le cancer, nous lançons un appel aux autorités, pour penser à mettre en place une convention. Comme cela se fait dans d’autres pays; en Tunisie et au Maroc, par exemple, où les secteurs privé et public cohabitent, en l’occurrence et le malade a la lati-tude de choisir le centre de traitement, qui lui convient. Ainsi, lorsque la situa-tion est saturée, au niveau des centres de soins publics; alors, le malade sera orienté vers le privé sans aucune diffi-culté, puisque les procédures conven-tionnelles existent. C’est la moindre des choses

* Dr M.S Bali, Medical Physicist, au centre privé anti-cancer ‘’Athena’’, de Constantine

Propos recueillis par Tanina Ait

Pr Kamel Bouzid*, à Santé Mag:

Santé Mag: Pouvons-nous dire que les recommandations, que vous ne man-quez jamais l’occasion d’exprimer, aussi bien au niveau administratif que médi-cal, sont prises en charge, dans la mise en place du plan cancer ?

Pr. K. Bouzid: Oui, ce plan cancer, dont nous avons demandé sa mise en place, depuis déjà une vingtaine d’années, voit son lancement aujourd’hui, puisque les plus hautes autorités de l’Etat s’y inves-tissent et ce grâce, notamment, à l’action coordinatrice, du Professeur Zitouni, des efforts de tout un chacun. Ce plan a été présenté au premier Ministre et au pré-sident de la République. Il a été adopté et maintenant, il faut l’appliquer. Aupa-ravant, Il va falloir, nécessairement l’éva-luer, parce que cela demande beaucoup d’argent et le budgétiser, pour savoir où iront les deniers publics; en l’occurrence.

Quels sont les principes de ce plan ?Les trois grands principes de ce plan sont: premièrement, que les algériens at-

teints de cancer soient soignés de la manière la mieux possible, sur tout le territoire national; deuxièmement, qu’ils soient soignés à

proximité de leur domicile; troisièmement, il faut établir des

consensus, thérapeutiques, dans la prise en charge. De ce fait, la première conférence de consensus aura lieu du 4 au 6 avril, à Oran et elle réunira tous les acteurs, impliqués dans la prise en charge des malades atteints de cancer.

Pensez-vous que c’est le début de la fin des disparités, en matière de prise en

charge des patients ?Oui, c’est le début de la fin des disparités et cela rejoint, donc, les deux principaux grands axes de ce plan, qui sont: «que les malades soient soignés de la même manière possible, partout sur le territoire national».

On peut, donc, être optimiste, pour une application rigoureuse de ce plan ? Oui, je rappelle, encore une fois, que cela fait 20 ans depuis que nous nous sommes attelés à ce travail et nous avons demandé au chef de l’Etat de s’impliquer, comme l’ont fait ses pairs du reste du monde; notamment, en France, aux Etats Unis, au Maroc, en Tunisie …. On rejoint ces pays et on espère que les choses iront mieux, dans un délai de quelques mois; une année maximum.

Ceci est rassurant, pour le moyen et long terme; mais, que faut-il faire, hic et nunc, notamment, pour les malades qui n’ar-rivent pas à obtenir un rendez-vous en radiothérapie, dans le secteur public ?Faute d’équipements, les rendez-vous en radiothérapie sont ridicules. Je pèse mes mots: donner un rendez-vous à deux ans, c’est ridicule; il vaut mieux ne pas donner de rendez-vous. Pour le moment, nous sommes, encore, dans la situation d’il y a 5, 6 ans et donner des rendez- vous dans deux ans, comme c’est le cas à Oran, c’est au-delà du ridicule; il vaut mieux ne pas en donner. Il y a deux structures privées, qui viennent d’obtenir l’agrément et ont commencé à exercer: une à Blida et une autre à Constantine. Le problème de ces structures privées est que les coûts des traitements par radiothérapie sont à la charge, entièrement, des patients, parce

"La CNAS doit nous donner les raisons du non-remboursement

de la radiothérapie, dans les centres privés"

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ÉVÈNEMENT

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Santé-MAG N°28 - Mars 201410

que la Caisse de sécurité sociale ne joue pas le jeu. Pour donner une idée, c’est entre 500.000 et 1 million de DA, pour un trai-tement et l’algérien à revenu moyen ne peut pas se le permettre. La CNAS ne veut pas jouer le jeu, alors qu’elle a payé des prises en charge dans des structures privées à l’étranger. Je parle, en parti-culier, en France, sans rechigner, pour certains et lorsqu’il s’agit de traitement, tout simplement, en Algérie, elle s’op-pose - et c’est le comble! - au rembour-sement des cures et des médicaments, pour de simples citoyens, sous prétexte que le cancer se soigne, exclusivement, dans les hôpitaux; ce qui est faux !

On parle de prévention dans le plan can-cer. Aussi, que peut assurer une bonne prévention, quant à l’endiguement d’un cancer; notamment, du sein ? Pour le cancer du sein, c’est une préven-tion secondaire. Il y a d’autres cancers, qui peuvent se prévenir de manière primaire. C’est, en particulier, le can-cer du col de l’utérus, qu’on prévient facilement, par la vaccination contre le virus à l’origine de ce cancer, qui est le HPV et dans le plan cancer, il est prévu d'introduire et de rendre obligatoire ce vaccin chez toutes les jeunes filles, entre 11 et 15 ans, avant le premier rapport

sexuel. L’autre aspect de prévention, c’est la lutte contre le tabac. A cet effet, des textes de loi ont été promulgués et l’Algérie a adhéré, en outre, à la conven-tion internationale pour la lutte contre le tabac; mais, malheureusement, il y a un manque de rigueur, quant à leur appli-cation. L’autre aspect préventif c’est, égale-ment, de préserver l’environnement, de contrôler l’utilisation abusive des pes-ticides dans l’agriculture, qui sont des produits chimiques toxiques et cancé-rigènes… Par ailleurs, en ce qui concerne le can-cer du sein, ceci passe par l’examen clinique de la sage-femme et du méde-cin généraliste. Cet examen doit être systématique, comme si l’on prenait sa tension artérielle. Les seins de toutes les femmes doivent être surveillés, pour détecter, éventuellement, un nodule, ou quelque chose de palpable. Faire, à ce moment-là, une mammographie et que la patiente rentre dans le circuit de trai-tement; car, lorsque le diagnostic se fait tôt, la femme guérit systématiquement. En outre, il y a lieu de pratiquer le dépis-tage, chez les familles à risque, car 10% des cancers du sein surviennent dans le terrain génétique. Ainsi, dès que le pre-mier cas est noté dans la famille, il faut faire des IRM, parce que la mammogra-

phie, chez les femmes jeunes, n’est pas assez fiable, pour diagnostiquer, très tôt, le cancer du sein et le guérir.

Un message ?Je souhaiterai que lorsqu’on organise des conférences de ce type et voir tous les acteurs concernés; en parti-culier, ceux du ministère du Travail et de la sécurité sociale, pour qu’ils nous expliquent les contradictions citées plus haut et surtout, s’expliquer sur les non-dits qui circulent; à savoir: «ils ont un cancer et ils vont mourir; alors, à quoi bon …»A cet effet, cela fait, maintenant, 5 ans je n’ai pas vu les représentants de ces ins-titutions, dans les réunions de ce genre. Donc, mon message est: qu’ils viennent dans nos réunions, pour qu’ils nous donnent les raisons du non rembourse-ment des médicaments pour traiter le cancer, ainsi que la radiothérapie; alors que, a contrario, l’hémodialyse, la chirur-gie cardiaque sont remboursées et heu-reusement, d’ailleurs

* Pr K. Bouzid, chef du service d’oncologie médicale au Centre Pierre et Marie Curie (CPMC),Hôpital Mustapha Bacha - Alger.

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Santé-MAG N°28 - Mars 201410

Découverte de la mutation génétique causant une maladie rétinienne

L'équipe du Dr David Stanek, de l'Institut de Génétique Moléculaire, de l'Académie des Sciences, a publié les résultats de ses recherches sur la rétinite pigmentaire, une maladie héréditaire de la rétine, qui peut conduire à la cécité et qui affecte, environ, une personne sur 4000. Cette maladie, qui peut être détectée à partir de l'âge de 10 ans, environ, ne pos-sède, toujours pas, de traitement efficace, bien qu'étant relativement courante.

RÉTINENous percevons le monde extérieur, principalement, à travers nos yeux, grâce à des cellules photosensibles, situées sur la rétine. Chez une per-sonne atteinte de rétinite pigmen-taire, ces cellules meurent au cours du temps, jusqu'à disparition complète de l'acuité visuelle. Les causes de la mala-die peuvent être différentes, mais sont, principalement, dues à la mutation de certains gènes impliqués dans la vision. En fonction des gènes endommagés, la maladie peut, ou non, se déclarer. La maladie peut être, aussi, due à des mutations présentes dans les gènes impliqués dans l'épissage de l'ARN, un des processus de base de la biologie cellulaire. Cela représente la seconde cause de rétinite pigmentaire.Les chercheurs ont étudié les muta-tions du gène SNRNP200, qui code

pour la protéine BRR2, jouant un rôle essentiel dans le processus d'épissage de l'ARN. Ils s'attendaient à ce que la protéine mutée s'intègre mal dans le sys-tème d'épissage, mais il s'est avéré au contraire que le mutant s'intégrait très bien au système, agissant même de manière plus efficace que la pro-téine non mutée. Cependant, le mutant générait en plus des erreurs qui provo-quaient la mort des cellules photosen-sible de la rétine.Selon le Dr Stanek, il reste beaucoup de travail à effectuer, pour décrire, correc-tement, les problèmes provoqués par la protéine BRR2 mutée dans les cel-lules photosensibles de la rétine. Dans le but de trouver un traitement efficace à la rétinite pigmentaire, il est, en effet, important de comprendre les proces-sus affectés au niveau moléculaire

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ÉVÈNEMENT

Santé-MAGN°28 - Mars 2014 1111

Propos recueillis par Tanina Ait

Pr Ahmed Bendib*, à Santé Mag:

Santé Mag: Avez-vous, professeur, le sentiment qu’aujourd’hui c’est le grand jour, avec l’adoption du plan cancer ?

Pr. A. Bendib: Le plan cancer doit être inséré au système de santé reformé et cette réforme est une mesure qui peut être prise rapidement. C’est un ensemble de décisions à arrêter, comme l’affecta-tion des médecins à travers le territoire national, la facilitation du transport des malades, d’une région à une autre du pays, le cas échéant; car, ce n’est pas normal qu’un malade prenne un taxi, ou un car, pour se déplacer de Constantine à Alger, par exemple, dans son état de santé fragilisé, au risque de l’aggraver; alors qu’une ambulance est, à l’évi-dence, un moyen plus approprié, pour ce faire. Dans le même souci de perfor-mance, le déplacement des médecins doit être assuré convenablement et la logistique prise en charge efficacement. En tout état de cause, le plan cancer doit déterminer des priorités. Par exemple, l’OMS énonce que les priorités, en ma-tière de soins, pour la femme, c’est le dépistage du cancer du sein et celui du col de l’utérus. Ce sont les deux priorités en l’occurrence. Il faut, donc, déterminer

ces priorités. Ensuite, comme l’a dit le Professeur Kamel Bouzid, «il faut nom-mer un état-major, constitué d’éléments connus de tous et où tout un chacun aura un rôle à jouer, bien déterminé.» Ceci est extrêmement important, car l’homme est la ressource la plus pré-cieuse. Ensuite, il faudra mobiliser, bien entendu, les moyens matériels et finan-ciers, comme supports à l’exécution du plan cancer.

On voit, souvent, une disparité dans les soins; c’est-à-dire, ceux qui ont des connaissances peuvent prendre la place d’autrui, comme cela est rapporté, sou-vent, à travers la presse. Qu’en est-il, au juste ? En principe, je dis bien en principe, dans mon service de sénologie, au CPMC, lorsqu’on est algérien, ou même étran-ger, pauvre ou riche, on est soigné de la même manière, quel que soit son statut, sa fonction, j’allais dire la couleur de sa peau…. Maintenant, si vous parlez de la situation dans l’ensemble du territoire national, il est évident qu’on soigne selon les moyens disponibles. Aussi, si certains moyens viennent à manquer, le malade doit être, nécessairement, être

orienté vers une autre structure, mieux équipée en la matière.Ceci a, d’ailleurs, été souligné par Maître Ben Braham, qui a cité le cas français, où la loi oblige de prodiguer aux malades des soins en toutes circonstances et ce, par une optimisation des moyens; autrement dit, aucun malade ne doit être laissé en déshérence, faute de moyens, dans une structure donnée. Normalement, cela devrait se passer ainsi, dans notre pays. Aussi, pour palier certaines insuf-fisances, nous nous déplaçons, une fois par mois, à Biskra, pour procéder à des interventions chirurgicales sur place, car les malades ne disposent pas, toujours, de moyens nécessaires, pour se déplacer à Alger.C’est, donc, pour nous, une façon d’as-surer une couverture médicale la plus large et la plus harmonieuse possible dans notre pays et supprimer, ainsi, des disparités qui altèrent, malheureuse-ment, la qualité des traitements

* Pr A. Bendib, chef de service de sénologie au CPMC,Hôpital Mustapha Bacha – Alger

"Le plan cancer doit être inséré au système de santé reformé et déterminer des priorités"

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ÉVÈNEMENT

Santé-MAG N°28 - Mars 201412

Santé Mag: La communauté médicale est–elle satisfaite du plan cancer ?

Pr M. Oukkal: Le plan cancer est une très bonne chose et le seul souci reste sa future application. Ce plan contient des dispositions très intéressantes, tant au plan de la prévention que du dia-gnostic, ou du traitement. S’il sera bien appliqué, malades et médecins en tire-ront un grand bénéfice.

Les traitements, en chimiothérapie, sont-ils disponibles ? Actuellement, la majorité des traite-ments médicaux sont disponibles, dans

les CHU et les centres anti-cancer. Com-parée, ne serait-ce qu’à l’année 2011, où il y avait des pénuries catastrophiques en molécules et pendant laquelle les pa-tients en cherchaient, désespérément, partout dans le pays et même à l’étran-ger, la situation s’est améliorée d’une façon très importante et à l’exception d’une pénurie de un ou deux médica-ments, tout le reste est disponible.

Quels sont les chances de guérison, lorsque le cancer est traité à un stade précoce ? Traiter les cancers au stade précoce et dans ses formes localisées, le résultat

sera garanti et à moindre coût. C’est-à-dire qu’on dépensera moins, pour trai-ter un cancer localisé, alors qu’un can-cer au stade actif nécessitera plus de moyens, pour des résultats médiocres et le plan cancer insiste, justement, dans son chapitre relatif à la prévention sur le diagnostic précoce et le dépistage, qui sont, donc, nécessaires; voire, obli-gatoires.

Les professionnels de la santé ne sont pas tous unanimes, pour les dépistages. Qu’en dites-vous ? A un certain moment, beaucoup de pro-fessionnels disaient que ce n’était point la peine de faire du dépistage, car on diagnostiquera davantage de malades, qui ne pourront pas, tous, être pris en charge, faute de moyens. Nous nous ins-crivons en faux contre cette vision des choses, car ce sont ces mêmes malades, que vous ne diagnostiquez pas main-tenant, que vous allez avoir à traiter à un stade plus évolué, avec des résultats pas toujours satisfaisants. Alors, autant les prendre au stade précoce de leur maladie qui, parfois, ne nécessite que la chirurgie, avec un taux plus élevé de guérison.

D’un point de vue général, à quel stade le cancer est constaté, chez nous ?Malheureusement, beaucoup de ma-lades sont diagnostiqués à des stades tardifs, qui reviennent très cher au bud-get et dont le pronostic vital est engagé. Les malades ne consultent que lorsqu’ils sont alarmés et étant donné que, dans ces cas-là, les cancers sont symptoma-tiques, il est, déjà, trop tard. Il faut, donc, renverser la vapeur. Ainsi, il faut dia-gnostiquer précocement, pour obtenir un meilleur pourcentage de guérison et à moindres frais. Comme dans le cas du cancer du sein, une fois que la malade palpe une boule au niveau de son sein,

"Le plan cancer insiste sur la prévention et le dépistage"

Propos recueillis par Tanina Ait

Pr Mohamed Oukkal*, à Santé Mag,

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ÉVÈNEMENT

Santé-MAGN°28 - Mars 2014 1313

son cancer a déjà évolué. Par contre, si on faisait, systématiquement, le dépistage avec mammographie, on va diagnostiquer des cancers qui ne sont pas palpables et à ce moment, la guérison, avec le traitement, est garantie. C’est ce qui se passe dans d’autres pays, comme en Europe, par exemple, où la moyenne de la taille tumorale, quand elle est découverte, mesure seulement 1 cm de diamètre; alors que chez nous, elle est de 4 cm, en moyenne, voire pire encore. Il nous arrive de recevoir des tumeurs à 10 cm, au niveau du sein. Par conséquent, le dépistage règle beaucoup de problèmes. Aussi, je pense que le plan cancer a bien fait d’insister sur la prévention et le dépistage. Ce sont les meilleurs moyens, non pas pour éradiquer, bien entendu, le cancer; mais, de réduire, de façon importante, son incidence et son impact négatif sur la personne.

A quel moment de la maladie inter-viennent les soins de support ? Les soins de support interviennent à toutes les étapes de la maladie. Tout au début, on pensait que seuls les ma-lades au stade final de leur patholo-gie en avaient besoin; mais, il s’avère que dès le diagnostic le malade, ainsi que sa famille, ont besoin de soins de support, avec un psychologue, dans l’annonce du cancer, d’abord; ensuite, il y a les traitements de la douleur. Le traitement des symptômes de la maladie et le traitement des effets secondaires du traitement, lui-même, font, également, l’objet de soins de support. En fait, le but de ces soins de support est d’améliorer la qualité de vie du malade; car, dans ce cas-là, il ne suffit pas de traiter seulement la maladie, mais de préserver, égale-ment, la qualité de vie du patient et ceci est très important.

Un message…On espère, de tout cœur, que le plan cancer soit appliqué et qu’il soit mis en œuvre le plus tôt possible, pour que les patients bénéficient, pleine-ment, de ses avancées

* Pr Mohamed Oukkal, chef de service d’oncologie au CHU Béni-Messous;

Propos recueillis par Tanina Ait

Pr Rabah Ferhat*, à Santé Mag:

"Sans une volonté politique, le plan cancer ne pourra rien régler"

Santé-MAGN°28 - Mars 2014 1313

ÉVÈNEMENT

Santé Mag: Quels sont les problèmes liés à la prise en charge des malades atteints de cancer, dans la wilaya de Tizi-Ouzou ?

Pr. R. Ferhat: Les problèmes, rencontrés à Tizi-Ouzou, ne sont pas différents des autres régions du pays. Cependant, il y a une particularité au niveau du CHU de cette wilaya, où se trouvent un petit et un grand service à qui on a donné un rôle régional; c’est-à-dire, prendre en charge un ensemble de 6 wilayate, avec peu de personnel et uniquement 14 lits. Enorme problème, donc. Or, la bataille contre le cancer est une course contre la montre, où le facteur temps est un paramètre prépondérant. Cette lutte se gagne en heures; voire, en minutes, même. Prenons un exemple: une femme qui se fait opérer d’un nodule du sein et à qui on donne un rendez-vous à 6 ou 8 semaines, pour la conti-nuité des soins, cela ne sert à rien; car, la tumeur aura le temps de métastaser. De ce fait, je lance un appel aux autorités, pour qu’elles revoient cette situation; entre autres, les affectations des person-nels. En effet, actuellement j’en suis à ma 5ème promotion de santé publique et j’aimerais bien retenir quelques éléments dans un souci d’assurer un meilleur service.

Y a-t-il assez de médecins oncologues ? La spécialité d’oncologie médicale est une spécialité jeune. Elle date d’une vingtaine d’années et jusqu’à présent, la cancérologie est «noyée» dans les autres pathologies; c’est-à-dire qu’elle n’est pas enseignée comme une spécialité à part entière. En effet, il n’y a pas, encore, de module spécifique d’oncologie et c’est pour cela que la Société algérienne d’oncologie médicale demande d’intro-duire, dans la formation du médecin, ce module; à l’instar de l’Orl, la pédiatrie, la gynécologie… Pour donner plus de pré-cisions à ce que nous préconisons, au sein de la SAOM, citons un exemple: le

cancer du cavum est un cancer qui re-lève de l’Orl, mais les spécialistes en Orl n’ont pas fait de module en cancérologie et ne sont pas, par conséquent, au cou-rant des dernières mises à jour. Ils font, alors, des consultations, de la chirurgie; mais, pas de la cancérologie.

Quelles sont les chances de succès du plan cancer, dans notre pays ?Le plan cancer, en lui-même, que cela soit en France, aux Etats Unis ou ailleurs, ne pourra rien régler si il n’y a pas une volonté politique derrière et sans la mo-bilisation des professionnels de la santé. On doit dire, en tant que médecins, que nous devons œuvrer dans l’intérêt du malade; d’autant plus que nos patients ont la chance d’être pris en charge gra-tuitement. Cela est une spécificité algé-rienne. Par exemple, nous disposons d’un trai-tement anti-cancer de dernière géné-ration, depuis 2004, alors qu’en Tunisie cela fait à peine 2 ans que ce pays a ob-tenu l’autorisation de le prescrire. Der-nièrement, on a introduit une molécule contre le cancer de la prostate de der-nière génération, qui coûte 400.000 DA, pour la cure d’un mois et cette dépense est imputée sur le budget de l’hôpital. C’est un grand effort.

Un mot pour conclure ?Nous demeurons très optimistes et le cancer, de nos jours, n’est plus un tabou, ou «une maladie honteuse». Qui dit can-cer, égal mort et les gens savent qu’il existe, dorénavant, des perspectives de guérison. Pour preuve, nous avons réalisé, dernièrement, une campagne de dépistage du cancer du sein et du col de l’utérus aux Ouadhias, en Kabylie et en deux jours, nous avons reçu plus de 400 femmes, venues se faire dépister

* Pr Rabah Ferhat, chef de service d’oncologie médicale au CHU de Tizi-Ouzou

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ÉVÈNEMENT

Santé-MAG N°28 - Mars 201414

Le cancer du nasopharynx, également appelé cavum, touche la partie supé-rieure des voies respiratoires, située juste après les cavités nasales. Cette pathologie, peu fréquente chez les Européens, est, en revanche, répandue en Afrique du Nord. Les causes, exactes, de cette répartition géographique demeurent inconnues. La recherche scientifique est orientée sur ce problème, afin d’élucider les causes exactes de ce cancer, dont le diagnostic est, malheu-reusement, souvent tardif. Le Professeur Djamel Djenaoui nous en dit plus.

Santé Mag: Le cancer du nasopharynx est-il répandu, dans notre pays?

Pr D. Djennaoui: Le cancer du nasopha-rynx, ou du cavum, a une particularité, de par sa répartition géographique. Il n’existe pas partout dans le mondeet en Europe, en Amérique, en Afrique du sud, on le voit rarement. En revanche, il est répandu en Afrique du Nord, en Egypte et dans la Corne de l’Afrique. Sa présence est constatée, également, en Chine; ainsi que dans les pays de l’Asie du Sud Est, ceci d’une part; d’autre part, dans ce type de cancer, il n y a pas de relation, évidente, entre cette patho-logie et les effets, dus au tabac ou à

l’alcool, comme dans les autres cancers. Et enfin, troisièmement, ce qui fait, encore, la particularité de ce cancer est qu’il peut avoir une origine virale. Ceci n’a pas, encore, été bien prouvé mais nous avons des arguments très forts pour une cause liée à un virus appelé virus Epstein-Barr; mais, on ne connait pas comment se produit le phénomène pathologique. C’est-à-dire: est-ce que c’est ce virus qui cause le cancer du na-sopharynx, ou est-ce que ce virus s’as-socie à d’autres facteurs? Nous igno-rons, effectivement, les causes exactes de ce mécanisme. Néanmoins, ce qui est certain est que ce virus provoque des maladies bénignes, dans certaines régions et dans les pays d’Afrique du Nord, il donne des cancers. Y a-t-il, éventuellement, un terrain gé-nétiqueà cette pathologie?Tout un mystère entoure cette maladie.Il se peut qu’un problème génétique en soit la cause. En effet, en Algérie, dans une même fratrie, des cas de ce cancer sont constatés, assez régulièrement. Ainsi, le facteur génétique n’est pas à exclure. Peut-être, aussi, existe-t-il un problème environnemental; c’est-à-dire, le cadre de vie de la personne, son alimenta-tion…. Pourquoi, par exemple, ce can-cer est présent en Afrique du Nord et en Asie, où les traditions culinaires sont, quelque peu, particulières? On soup-çonne, au demeurant, peut-être à tort, la conservation des viandes, ou des légumes, par le sel; mais, toujours est-il que ces interrogations ne sont pas sui-vies de preuves. En revanche, l’énigme reste entière; car, lorsque des indivi-

"Une plus grande connaissance du cancer du nasopharynx va permettre une meilleure connaissance des cancers,

en général" Propos recueillis par Tanina Ait

Pr Djamel Djennaoui*, à Santé Mag,

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ÉVÈNEMENT

Santé-MAGN°28 - Mars 2014 1515

Carcinome du nasopharynx Le carcinome du nasopharynx est un cancer se développant à partir des cel-lules épithéliales du nasopharynx. Il fait partie des cancers des voies aérodi-gestives supérieures. Il s'agit du cancer épithélial le plus fréquent chez l'adulte, mais il commence dès l'enfance puisqu'au Royaume-Uni l'incidence an-nuelle varie de 0,3,entre 0 et 14 ans, à 2 cas pour un million d'habitants entre 15 et 19 ans. Certaines populations ont une incidence plus élevée, comme en Chine et en Tunisie. Ce cancer est res-ponsable d'un tiers des cancers du rhi-nopharynx. La première description de ce cancer date de 1921.Cette tumeur peut rester localisée ou s'étendre vers la base du crâne, l'oro-pharynx, la cavité buccale et le palais. Les métastases sont typiquement des métastases ganglionnaires cervicales. Ces métastases sont, souvent, le mode de diagnostic de ce cancer; La biop-sie donnant le diagnostic. Les autres signes comprennent douleur, trismus, otite, régurgitation nasale par parésie nerveuse, perte de l'audition et paraly-sie de nerfs crâniens.Plusieurs causes sont identifiées: l'infection à virus d'Epstein-Barr, des facteurs génétiques et des facteurs environnementaux comme les nitrosa-mines.Le traitement repose sur la radiothé-rapie, la chimiothérapie et l'utilisation d'interféron.

DiagnosticLa biopsie fait le diagnostic. Une éva-luation de l'extension est indispensable permettant une prise en charge opti-male.

TraitementEn raison de sa localisation, la chirurgie ne fait pas partie des moyens de traite-ment de ce cancer.La chimiothérapie est, actuellement, considérée comme le meilleur traite-ment; notamment le Mertens protocol NPC-91-GPOH (Society of Pediatric Oncology and Hematology) qui com-prend un traitement par interféron après, la chimiothérapie et la radiothé-rapie.La radiothérapie permet un contrôle local de la maladie mais ne prévient pas le risque de métastase

Santé-MAGN°28 - Mars 2014

Cancer du cavum ou le cancer du

nasopharynx

1515

dus de ces pays émigrent en Europe ou en Amérique, leurs descendances font moins de cancer du cavum, après deux ou trois générations. Par conséquent, le mystère de ce cancer demeure, encore, entier et suscite la curiosité des cher-cheurs.

Qu’en est –il de ce cancer, en Algérie?En Algérie, nous avons, justement, un programme de recherche, en collabo-ration avec une équipe française, très avancée dans ce domaine et qui a, déjà, publié- en l’occurrence - des publications internationales. C’est sûr que c’est un cancer passion-nant, de par son intérêt scientifique; car, ceci nous permettra, en fin de compte, de comprendre le cancer dans sa globa-lité, car l’ensemble de ses causes sont réunies: la génétique, l’environnement, l’alimentation, les virus. Aussi, je reste convaincu qu’une plus grande connais-sance du cancer du cavum va autoriser une meilleure connaissance des can-cers, en général. En tout état de cause, il est clair que le jour où on comprendra d’où vient le cancer, on pourrait le guérir d’une manière plus efficace.

Quelle est la prévalence de ce cancer, dans notre pays?Difficile de donner une prévalence, en Algérie; car, le plus souvent, le diagnostic n’est pas fait à temps; mais, on l’estime, tout de même, à peu près, entre 2000 et 2500 nouveaux cas par anet ceci est d’autant plus dramatique qu’il touche, régulièrement, les enfants et adoles-cents, entre 10 et 20 ans. En outre, ce qui nous préoccupe, c’est qu’un cancer traité hypothèque l’avenir de ces jeunes, par des incidences, fâcheuses, sur leur crois-sance, des troubles du squelette facial - en subissant des rayons sur le visage -, des problèmes dentaires… C’est, vraiment, un traitement très lourd, avec des effets secondaires importants.

Peut-on diagnostiquer ce cancer préco-cement?Concernant le diagnostic précoce, nous sommes, effectivement, en partenariat avec un organisme européen, qui s’inté-resse, justement, au dépistage du cancer du cavum. En Europe, il est appelé: «le dépistage des cancers de la tête et du cou», parce que, dans ces pays, égale-ment, le diagnostic n’est pas fait assez tôt. Aussi, pour pallier à cela, ils ont mis en place un Programme européen de dé-pistage, auquel seront associés des cher-cheurs nord-africains. Nous avons été

particulièrement intéressés par cette ini-tiative, car c’est, peut-être, une occasion, pour nous, de sensibiliser trois types de populations, dans ce cadre: Il s’agit, d’abord, d’intéresser, évidem-ment, les médecins: généralistes, pé-diatres, neurologues, psychiatres, oph-talmologues… Ces médecins sont, plus ou moins, impliqués dans ces cancers de la tête et du cou, par des conférences de vulgarisations de ces affections. Ainsi, lorsqu’on parle à un médecin généraliste du cancer du cavum, par exemple, il en a, déjà, entendu parler; mais, sans savoir, toujours, ce qu’il en ressort. Il est, donc, important de faire des conférences de recyclage, de remise à niveau de toutes les disciplines de la médecine. La deuxième catégorie de population qu’on voudrait cibler, ce sont tous les paramédicaux, car ils jouent un rôle très important; en l’occurrence, de par leur présence, quasi-continue, auprès des malades. Par conséquent, il importe que l’infirmier sache que le mal de tête per-sistant et répétitif peut être un signe qui doit emmener le malade à consulter. Enfin, la troisième catégorie, qu’on aime-rait associer à ce programme, c’est le public et les médias, parce que les mé-dias sont très importants, pour donner l’information. Il ne faut pas, cependant, créer une psychose et se dire que dès qu’on a mal à la tête, c’est un cancer du cavum. Aussi, faudra-t-il trouver un sys-tème de communication pertinent, pour attirer l’attention de la population, sans l’inquiéter. Des affiches et des spots, par exemple, seront réalisés avec nos col-lègues français, qui ont beaucoup plus d’expériences et on pourrait, alors, cibler les salles d’attentes des médecins, les Apc, les daïrate, les wilayate, les phar-macies, les écoles…En tout état de cause, nous avons prévu une réunion avec le président de l’Asso-ciation française du cancer du cavum, pour mettre en place ce programme et nous avons besoin du soutien de tout le monde; notamment, du ministère de la Santé et de la presse, pour aller de l’avant, parce que nous, les médecins, ce qui nous intéresse est de faire le dia-gnostic précoce, pour guérir les malades, avec des traitements moins lourds et moins chers

* Pr Djamel Djennaoui, chef de service ORL, du CHU Mustapha Bacha. Président de la Société algérienne d’ORL et président de la Commission nationale des implants cochléaires.

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Santé Mag: Comment peut-on évaluer les différents stades d’un coma ?

Pr A. Zerhouni: Les différents stades du coma sont évalués à travers l’échelle de Glasgow, qui est cotée de 1à 15 points. Trois critères sont testés et notés: la réponse verbale, la réponse motrice et l'ouverture des yeux. Chaque critère est noté de 1 à 5.Réponse verbale: orientée (5 points), confuse (4 points), inappropriée (3 points), incompréhensible (2 points), absente (1 point).Ouverture des yeux: spontanée (4 points), au bruit (3 points), à la douleur (2 points), absente (1 point).Réponse motrice: obéit (6 points), adaptée (5 points), orientée (4 points), flexion réflexe (3 points), extension ré-flexe (2 points), absente (1 point).Le total des trois notes obtenues (ré-ponse verbale + réponse motrice + ou-verture des yeux) donne une note finale. Un score de 15 correspond à une conscience normale.

Score de Glasgow de 3 à 8: trauma-tisme crânien grave concerne l’état de mort encéphalique; Score de Glasgow de 9 à 12: trauma-

tisme crânien modéré; Score de Glasgow de 13 à 15: trau-

matisme crânien bénin.

A quel moment le diagnostic de La mort encéphalique est-t-il établi ? Le diagnostic de la mort encéphalique est:Clinique: 3 critères cliniques néces-saires: Absence totale de conscience et d’ac-

tivité motrice spontanée; Abolition de tous réflexes du tronc

cérébral; Absence totale de ventilation sponta-

née.

Para-clinique: 2 EEG (électroencéphalogramme, qui

explore l’activité électrique corticale) nuls et a-réactifs, à 4 h d’intervalle; L’angiographie, ou angio-scanner, qui

montre l’arrêt de la circulation encépha-lique

Le cœur de la personne en état de mort cérébrale bat-il, encore et pendant com-bien de temps ?Au cours d’un état de mort encépha-lique, le maintien de la vascularisation des organes est assurée, artificielle-ment, par le biais d’une respiration assistée par un ventilateur et le cœur par des médicaments, qui ont pour but de maintenir une bonne perfusion des organes, susceptibles d’être prélevés, pour les empêcher de se détériorer.

Lorsque l’organe est prélevé sur cette personne, est-elle, encore, branchée sur des machines ?Au moment du prélèvement, le don-neur est stabilisé par la ventilation arti-ficielle et par des médicaments à visée cardiaque, pour ne pas perturber l’état fonctionnel des organes.

La famille est toujours réticente, lorsqu’il s’agit d’autoriser le prélèvement. Cela relève-t-il de la culture et comment, alors, briser ce tabou?Effectivement, le prélèvement d’organe ne peut se faire qu’après accord explicite du donneur, de son vivant, en vérifiant le registre de refus. Dans le cas contraire, on s’oriente vers l’accord présumé des parents, qui est difficile à obtenir, du fait de la sacralisation du corps, liée plus à une culture de société que des considé-rations religieuses. Cette désacralisation passe par l’abord psychologique de la famille, pour une préparation graduelle au deuil, l’explication méthodique et documentée, par le médecin coordina-teur, de l’état clinique, irréversible, du patient en état de mort encéphalique. Il est vrai que, dans le contexte actuel de notre société, l’intervention d’un imam peut atténuer l’intensité de la douleur et augmenter le capital-confiance

* Professeur Abdelkrim Zerhouni, chef du service réanimation, hôpital Maouche-Mohand Amokrane (ex-CNMS), Clairval – Alger.

"Le prélèvement d’organe ne peut se faire qu’après accord

explicite du donneur, de son vivant, en vérifiant le registre de refus"

Propos recueillis par Tanina Ait

Pr Abdelkrim Zerhouni*, à Santé Mag,

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Santé-MAG N°28 - Mars 201416

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Santé-MAG N°28 - Mars 201418

Fervent défenseur du droit des insuffi-sants rénaux à bénéficier de la meilleure prise en charge thérapeutique, le Pro-fesseur Haddoum s’insurge contre la politique sanitaire, qui met au, cœur de la problématique, l’hémodialyse en centre et néglige la greffe rénale. Il dresse un état des lieux, sans complaisance.

Santé Mag: Quelle est la situation des insuffisants rénaux, en Algérie ?

Pr Haddoum: La majorité des insuffisants rénaux chroniques,  qui sont parvenus au stade terminal,  est prise en charge dans les centres publics, ou privés, pour hémodialyse. Ils sont près de 90% à être traités par la méthode d'hémodialyse en centre. Une minorité  est traitée par la dialyse péritonéale,  ou par la transplan-tation rénale. Tous les nouveaux patients, qui nécessitent  un traitement par dia-lyse -transplantation sont pris en charge en Algérie, quel que soit  leur âge, leurs conditions socioéconomiques, sur tout le territoire national.

On estime leur nombre à 1000 nouveaux cas, par an, en Algérie. Ils  viennent s'ajouter aux 20.000 patients, déjà, traités. Ainsi, le nombre de patients ne cesse d'augmenter, en Algérie, d'année en année. Le poids économique  de la dialyse ne cesse, également, de croître. Ce qui nous interpelle  tous et en pre-mier lieu, les spécialistes en néphrolo-gie. Pour le moment, les efforts finan-ciers et médicaux sont tous dédiés - et uniquement dédiés - au développement des centres pour hémodialyse et ce, sur tout le territoire national... Pour l'instant, très peu d'efforts finan-ciers sont consentis, pour un pro-gramme de dépistage et de prévention des maladies rénales chroniques. C'est le cas, également, pour la dialyse péritonéale et la transplantation rénale qui ont, quasiment, disparu de l'offre de soins pour les insuffisants rénaux algé-riens. Pourtant,  ce sont les meilleures méthodes, les moins coûteuses et les plus utilisées, dans les pays riches et tous les pays, dits occidentaux ! ...

Justement, puisque 90% de ces malades sont en hémodialyse. D'après votre ap-préciation, est-ce que la prise en charge est correcte? Le cas échéant, quelles sont les failles ?Le «tout hémodialyse» pratiqué dans notre pays  est en totale contradiction avec les recommandations internatio-nales des sociétés savantes de néphrolo-gie, des agences de santé et des bonnes pratiques en médecine. La transplanta-tion rénale  doit être la méthode la plus utilisée, chez les patients insuffisants ré-naux (50% d'entre-eux doivent en béné-ficier). L'hémodialyse et la dialyse périto-néale vont prendre en charge les autres 50%, de façon harmonieuse. Cette der-nière, la dialyse péritonéale est, très sou-vent, la seule méthode de dialyse, utilisée dans de nombreux pays, aux côtés de la transplantation.  Dans de très nombreux pays riches de l'Occident, l'hémodialyse prend en charge moins de 10 % des pa-tients, loin derrière  la transplantation et la dialyse péritonéale.La transplantation rénale et la dialyse péritonéale sont les méthodes les moins coûteuses et elles sont  pratiquées dans les hôpitaux publics par de très rares (trop rares !) équipes engagées ! Elles ne disposent pas, toujours, des moyens humains et financiers appropriés et in-dispensables à leur croissance. Tout  le contraire de l'hémodialyse, qui continue à bénéficier d'importants soutiens finan-ciers  et humains;  ce qui explique son inflation galopante, en Algérie. L'hémo-dialyse coûte trois fois plus cher que la dialyse péritonéale et cinq fois plus cher que la transplantation rénale.

Vous avez affirmé, dans une récente conférence publique, que l'Algérie ne compte que 3 donneurs pour un million d'habitants. Quelles en sont les causes ?

"Le “tout hémodialyse”est en totale contradiction avec

les recommandations internationales" Propos recueillis par Rania Hamdi

Pr Farid Haddoum, à Santé Mag:

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 1919Santé-MAGN°28 - Mars 2014 19

Pr Farid Haddoum, à Santé Mag:

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La Transplantation rénale est une activité hu-maine. C'est une création médicale révolution-naire de la deuxième moitié du XXème Siècle. Ainsi, soigner l'Homme par l'Homme, remplacer un tissu, un organe, une partie du corps grâce à un DON,  gratuit,  de  son prochain  est l'une des plus belles «aventures médicales» de tous les temps ! ... Une «success story» dans tous les pays avancés et malheureusement pas en Algérie, du moins pour le moment ! L'activité de transplantation a «créé», en un demi-siècle,  deux citoyens  «modernes»: le  receveur  de greffe et le donneur d'organes et de tissus. Le rece-veur est un patient, qui souffre  et qui espère une guérison, ou le meilleur traitement possible. Pour l'insuffisant rénal, le meilleur traitement demeure la greffe rénale. Le donneur est un citoyen exception-nel, qui fait DON de son vivant, ou à son décès, d'une partie de son corps à son prochain, pour alléger ses souffrances. C'est la plus belle preuve de notre Humanité. Avec le succès des transplantations, une culture du don d'organes est née, dans les très nom-breux pays qui ont développé l'activité de transplan-tation. Le nombre de donneurs d'organes, par mil-lion d'habitants, en Europe et aux USA, est entre 35 et 60 donneurs. En Tunisie, il est de 12 donneurs par million d’habitants; en Egypte, de 30 Donneurs par million d’habitants. En Algérie, avec seulement 100 à 120 Transplantations rénales par année, le nombre de donneurs est  d'environ 3 donneurs par million d’habitants (tous des donneurs vivants !). C'est un des plus faibles pour les pays arabes, pour les pays musulmans et en méditerranée! Les raisons sont multiples; parmi-elles, les plus importantes, sont de natures  politiques,  légales  et  financières.  Nous souhaitons un plus fort engagement politique, des Lois pour encadrer et rendre obligatoire l'activité de transplantation et enfin, un soutien financier consé-quent et à la hauteur des besoins ! Quelle est votre propre vision, pour inverser la ten-dance, en faveur de la greffe d'organe ?En 2013, en Algérie, notre pays a consenti, en dé-penses de Santé, pour plus de 300 millions d'€, pour la seule activité d'hémodialyse, 2 millions d'€, pour la dialyse péritonéale et 500.000 €, seulement, pour la transplantation rénale ! La LOI sanitaire algérienne date de 1985; soit, il y a près de 30 ans. Elle a été salutaire, pour les trans-plantations rénales,  qui ont débuté en 1986, en Algérie. Elle doit être, maintenant, renouvelée  et s'adapter aux nouvelles exigences de notre temps et de notre médecine. Nous espérons  et attendons beaucoup de la nou-velle Loi sanitaire et nous appelons, de tous nos vœux,  à une réorientation harmonieuse des dé-penses de Santé. Nous souhaitons un engagement politique et ad-ministratif plus marqué, en faveur des activités de transplantation

* Pr Farid Haddoum, chef de service néphrologie au CHU Néfissa Hamoud (ex-Parnet) – Alger.

Santé Mag: Vous êtes directeur de l’Institut national du rein et de la greffe d’organes. En quoi consistent, exactement, les activi-tés de votre institut?

Pr T. Rayane: Notre Institut à trois missions importantes, à savoir: une mission de formation, une mission de soins de haut ni-veauet enfin, la troisième mission est de développer la recherche médicale, dans le domaine des

maladies rénales et des voies uri-naires. Ce dernier point très important; car, nous sommes en train de réfléchir, aussi, pour inclure des programmes de prévention sa-nitaire. Pourquoi développer la prévention? Parce qu’on consi-dère que 10 à 30% des patholo-gies rénales peuvent être évitées, si un programme national de pré-vention est appliqué, ou institué, dans un pays.

"Il y a, donc, beaucoup de facteurs de risques sur lesquels agir, pour

diminuer le nombre des maladies rénales"

Propos recueillis par Tanina Ait

Pr Tahar Rayane*, à Santé Mag:

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Santé-MAG N°28 - Mars 201420

Quelle est l’incidence et la prévalence des insuffisances rénales, en Algérie?Nous avons, en effet, certains chiffres pour l’incidence, qui est d’environ 95 à 108 nouveaux cas, par million d’habitants; ce qui correspond, à peu près, à 4000 nou-veaux cas, chaque année et la préva-lence, actuelle, des insuffisances rénales chroniques au stade terminal, traitées, est de 4060 malades, par un million d’habitants.

Vous avez mentionné que 10 à 30 % de ces insuffisances rénales sont évitables. Lesquelles? Toutes les insuffisances rénales, liées à l’automédication;car, il est constaté que les Algériens consomment beaucoup de médicaments, sans se référer à leur médecin traitant et cela peut entraî-ner des toxicités médicamenteuses. La toxicité des produits de radiologie de contraste lorsque, par exemple, on veut faire une coronographie, ou une urographie intraveineuse, est avérée. En effet, ces produits sont très dangereux, pour le rein et peuvent provoquer une insuffisance rénale chronique terminale. Or, ces traitements, justement, peuvent être évités. On note, aussi, certaines situations pathologiques, qui entraînent une insuffisance rénale aigue, comme les lithiases et comme nous le savons, environ, 10% des algériens font des li-thiases; 20 à 30% d’entre eux peuvent faire une IRCT et donc, on peut agir, en essayant de développer la lithotrip-sie, dans tout le territoire national. En outre, notre alimentation en est respon-sable, aussi. Dans les colorants qu’on consomme, il y a l’ochratoxine A, qui est toxique pour le rein. Par ailleurs, 10% des femmes enceintes font, parfois, une hypertension arté-rielle gravidique, ou toxémie gravi-dique, qui se complique par une insuf-fisance rénale et dans ce cas, il y a un rôle, très important, de prévention, pour bien suivre ces grossesses. En plus, il y a toutes les infections, comme les angines mal soignées, chez les enfants et qui peuvent donner des glomérulo-néphrites, qui entraînent des insuffi-sances rénales. Les risques professionnels, comme chez les dentistes et les prothésistes, qui ne se protègent pas, font des maladies rénales secondaires au cilice. Enfin, bien sûr, il ne faut pas oublier les polluants, surtout les hydrocarbures. Il y a, donc, beaucoup de facteurs de risques, sur lesquels agir et notamment,

comme je le disais, pour diminuer ce nombre en faisant de la prévention, au lieu d’avoir 4000 nouveaux cas, par an, on en aurait 3000 et 1000 seraient, donc, évités. Comment établir un vrai programme de prévention?Un vrai programme de prévention doit s’appuyer sur un réseau. Ainsi, concer-nant l’insuffisance rénale chronique, plus on la diagnostique tôt, plus on n’arrive à la guérir; parfois, à la ralentir médicalement. Il y a, donc, tout un pro-gramme thérapeutique qui doit se faire, afin de transmettre tous ces messages, à la population, afin qu’elle fasse atten-tion, en surveillant son alimentation et pour qu’elle évite l’automédication. A ce propos, je dirais qu’il y a eu une épi-démie de néphropathie, due aux anal-gésiques, en Suisse. En effet, il y a une vingtaine d’années, lorsque les horlogers de ce pays répa-raient les montres, ils avaient mal à la tête et prenaient beaucoup de paracé-tamol, pour calmer leurs douleurs, on a remarqué, alors, qu’ils faisaient des insuffisances rénales. Cependant après des campagnes de sensibilisation très importantes, les néphropathies, dues à ces analgésiques, ont presque disparu. Il y a, aussi, la néphropathie des Balkans et lorsqu’ une enquête fut menée, il a été établi qu’une toxine alimentaire, ap-pelée l’Ochratoxine A, était responsable de cette maladie. Cette toxine se trouve dans le blé, les cacahuètes. Ici, égale-ment, toujours grâce à une campagne de sensibilisation, la maladie a, presque, disparu. II reste certaines insuffisances rénales chroniques, comme celles dues à des plantes, en provenance de Chine, à l’origine d’une épidémie, qui a eu lieu à Bruxelles, où des femmes, pour mai-grir, consommèrent ces herbes et ont fait, alors des insuffisances rénales secondaires. Heureusement, grâce à l’intervention des pouvoirs publics et des médias, l’importation de ces herbes a été stoppée et la maladie a disparu, en conséquence. En Algérie, ce type de plante est, encore, importée sans aucun contrôle et les gens les achètent dans les souks et les marchés et donc, il y a un travail à faire, aussi, dans ce sens.

Quelle est la prévalence de personnes souffrant d’une insuffisance rénale, dans notre pays?Dans notre pays, nous avons 18.000 pa-tients dialysés, 4. 000 nouveaux cas par

année, 8.000 patients en attentes d’une greffe et parmi ces 8000, seuls 20% ont un donneur potentiel familial, car la loi algérienne, pour l’heure, exige que le donneur soit un donneur apparenté du premier degré. Dans un premier temps, on voudrait élargir le cercle des donneurs; c’est-à-dire, modifier la loi 85-05 afin que le conjoint, le cousin, les neveux, la belle-famille, la demi-sœur ou demi-frère, puissent donner leurs organes. Concernant les patients qui n’ont pas de donneur potentiel, dans la famille proche ou lointaine, la solution serait d’attendre un organe prélevé sur une personne en mort encéphalique. Le gros problème, en Algérie, est que 90% des familles, qui ont un proche en état de mort encéphalique, refusent le pré-lèvement. Il y a donc un long travail de sensibilisation à faire, pour que cette pratique - autorisée par la Loi et la reli-gion - soit exercée. Il y a lieu, donc, de prévoir la distribu-tion de la carte de donneur; d’établir un registre national des personnes voulant être prélevées et le registre de celles qui ne le veulent pas. En quelque sorte, il faut que la société s’exprime. En tout état de cause, l’Institut du rein a été créé pour favoriser la transplanta-tion d’organe et les structures, pour ce faire, existent; car, il faut remarquer que le bilan des greffes, à partir d’organes prélevé sur des personnes en état mort encéphalique, reste très maigre

* Professeur Tahar Rayane, directeur de l’Institut national du rein et de la greffe d’organes.

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Santé-MAG N°28 - Mars 201422

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Santé Mag: L’insuffisance rénale est, sou-vent, diagnostiquée tard. Pourquoi ?

Pr A. Degaichia: Il est vrai que, dans la majorité, pour ne pas dire dans la quasi-totalité des cas, le diagnostic de l’insuffisance rénale chronique est por-té de façon tardive. Généralement, au stade ultime; c’est-à-dire, terminal ou la suppléance itérative est l’unique issue thérapeutique; à savoir: l’hémodialyse, la dialyse péritonéale (dialyse par les poches) et la transplantation. Ce retard, dans l’apport du diagnostic, est, essentiellement, du à deux raisons: premièrement, l’insuffisance rénale chronique est une maladie silencieuse. Elle évolue à bas bruit, avec l’absence de symptômes cliniques, spécifiques à l’organe. Majoritairement, les signes cliniques d’appel de la maladie sont extra-rénaux, tels que l’anémie, l’es-soufflement (dyspnée), ou encore, des chevilles enflées (œdèmes). Deuxième-ment, à ces difficultés de diagnostic,

s’ajoute une autre; le rein malade, très malade ne manifeste aucune souffrance, aucune douleur, qui permet, au méde-cin, de mettre le doigt, directement, sur le rein. Les deux principales maladies, responsables de l’insuffisance rénale chronique; à savoir, le diabète, dans plus de 30% et l’HTA, dans plus de 25% de cas, évoluent, également, silencieuse-ment. Par voie de conséquence, le dia-gnostic est un diagnostic de laboratoire, ou deux paramètres suffisent à étayer, ou infirmer, la maladie. En l’occurrence, la créatine dans le sang et sa clearance, qui permettent d’évaluer le pouvoir d’épuration des déchets azotés, par le rein et la recherche d’albumine dans les urines.

A combien estimez-vous le nombre d’al-gériens  présentant un risque d’atteinte rénale ? Difficile de répondre, de façon pré-cise, mais je vais tenter d’apporter des éclaircissements, à partir de données

déjà connues et publiées. D’abord, chez l’adulte: comme je l’ai, déjà, mentionné plus haut, les sujets diabétiques et les personnes hypertendues représentent, à eux seuls, plus de 65% des patients, qui arrivent en insuffisance rénale terminale et traités par dialyse. Il faut mentionner, au passage, qu’il existe plus de 10% de diabétiques, par million d’habitants, dans notre pays; soit, plus de 3,5 millions et 35% d’hypertendus, par million d’ha-bitants; soit, 12 millions d’hypertendus, environ. L’obésité, présente, également, un risque rénal. 17,5% de la population est obèse. A cela s’ajoutent les calculs rénaux récidivant, qui peuvent présen-ter une menace, pour la fonction rénale; d’où, la recherche de la cause, qui doit être un souci permanent.Chez l’enfant, le risque rénal est dominé par les uropathies malformatives congé-nitales, les glomérulopathies et secon-dairement, les maladies génétiques, qui sont rares.

Comment évaluez-vous la prise en charge de l’insuffisance rénale chronique?Nous pouvons étudier ces questions sous deux aspects: curatif et préventif. Sur le plan curatif, la situation est meil-leure que sur le plan préventif. Nous de-vons, quand-même, signaler, ou plutôt, rappeler – car, nous le savons tous - la prédominance du traitement par l’hémo-dialyse itérative, au prorata de la margi-nalisation de la dialyse péritonéale et la transplantation.Quant à la prévention de la maladie ré-nale chronique, malheureusement, nous ne pouvons que constater l’absence de programme, ou de stratégie, afin de mettre à l’abri la population à risques, ou du moins, l’éloigner, le plus tard pos-sible, d’un traitement de suppléance, ou de substitution. Cette stratégie ne peut se faire que grâce à la création d’un re-gistre, qu’on appelle ‘’registre-rein’’. Ce

Insuffisance rénale: "Sur le plan préventif, beaucoup reste à faire"

Interview réalisée par Chahra Ramzy

Pr Antar Degaichia*, à Santé Mag:

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 2323

registre doit être créé, grâce à la col-laboration, étroite, des néphrologues, des épidémiologistes, des statisticiens et bien-sûr, les ministères concernés (santé, travail). Ce registre donnera la photographie de la prévalence de l’insuffisance rénale, à un stade don-né. A partir de là, le politique, avec la collaboration des acteurs concernés, adoptera une stratégie et donc, un programme de prévention nationale de la maladie rénale.

En raison d’une pénurie d’organes, l’ac-cès à la transplantation rénale reste le grand combat des insuffisants rénaux. Que faut-il faire, pour  sortir du cercle du «tout dialyse» ?Chacun, à son niveau et selon sa conviction, doit faire pour le mieux, dans l’environnement qui est le sien. Un environnement, pas trop facile, qui n’est pas incitatif à la transplantation rénale. Ceci dit, de plus en plus, la fa-mille néphrologique prend conscience de la gravité de la situation et réa-git progressivement. Nous sommes conscients des challenges et des défis que nous devons affronter. Le poli-tique, sensible à cette situation, avec l’Institut du rein de Blida, qui ouvrira ses portes en avril 2014, a promis la transplantation de 500 cas par an.

Comment développer,  justement, l’ac-tivité  de la greffe  rénale,  dans notre pays ?C’est une importante et intéressante question, à laquelle je vais répondre, en quatre points:1. La religion est claire, unanime et plus que favorable à la transplantation; que ce soit donneur vivant, ou donneur en mort encéphalique.2. L’Etat doit s’impliquer plus, par des textes ou des lois, pour élargir le cercle des donneurs vivants.3. Les néphrologues doivent se mobi-liser plus, pour mettre fin à la souf-france des personnes dialysées; sur-tout, les jeunes de moins de 50 ans, pour les libérer de cette contrainte, qui n’est pas, forcément, obligatoire; lorsque, au bout du tunnel, il y a la transplantation. 4. L’Etat, pour encourager et faire réussir la transplantation rénale, doit, impérativement, régulariser et équili-brer la dotation financière

* Pr Antar Degaichia, néphrologue - CHU d’Annaba.

«La greffe rénale est devenue un besoin de santé publique (…). On doit, absolument, trouver une stratégie, pour réduire l’hémo-dialyse au profit de la transplantation», a alerté le Professeur Zerhouni, chef de ser-vice réanimation à l’EHS Dr. Maouche (ex CNMS), lors d’une rencontre publique sur la maladie rénale. Les statistiques livrées, sur le propos, sont, en effet, édifiants. En 2002, l’Algérie comp-tait 4453 insuffisants rénaux. En 2010, le nombre a grimpé à 13 400 malades. Il a at-teint, en 2013, plus de 19 400 patients, dont 18 000 sont en hémodialyse, 400 en dialyse péritonéale et 1000 greffés, suivis dans les services de néphrologie. Selon les données déclinées par les spécialistes nationaux, le coût de la prise en charge d’un malade hé-modialysé est estimé, aujourd’hui, à 19 000 euros par an, tandis que la dialyse périto-néale revient à 6 500 euros par an et par malade et la greffe rénale à 4 500 euros par an et par malade. L’Algérie a dépensé, en l’occurrence, pour l’exercice 2013, quelques 300 millions d’euros pour l’hémodialyse, deux (2) millions d’euros pour la dialyse péritonéale et uniquement, 500 000 euros pour la greffe rénale. Les chiffres sont telle-ment éloquents qu’il n’y a pas lieu de faire le moindre commentaire. «L’Algérie n’a pas choisi le meilleur mode de prise en charge» a asséné le Professeur Farid Haddoum, chef du service néphro-logie au CHU Nafissa Hamoud (ex Parnet d’Hussein Dey), qui défend, mordicus, comme ses confrères d’ailleurs, l’option de la transplantation rénale. «Le nombre d’insuffisants rénaux, en attente de greffe, ne cesse d’augmenter. Il y a des choix poli-tiques à faire» a-t-il poursuivi. De l’avis de beaucoup de praticiens, qui interviennent dans la transplantation d’organe, il est im-pératif de sensibiliser davantage sur le don d’organe, limité, dans la législation natio-

nale, aux personnes liées par une parenté de premier degré (père, mère, enfants, frères et sœurs, grands-parents). Là aussi, les chiffres sont parlants. L’Algérie stagne à trois donneurs par un million d’habitants, alors que, pour la même proportion, l’Ara-bie saoudite est à 30 donneurs, la Syrie à 18 et l’Egypte à 12. Le Professeur Zerhouni a fait un plaidoyer pour la greffe rénale, en rappelant qu’avec peu de moyens, le CNMS réalise la moitié des performances du pays, dans le do-maine. «Nous avons commencé en 2007, avec deux blocs opératoires, une salle sté-rile et une équipe de praticiens. On a réussi à pratiquer près de 400 greffes. En 2013, nous avons fait un chiffre confortable de 68 transplantations», a-t-il rapporté, avant de poursuivre: «la greffe rénale a 70 ans d’âge. Nous n’avons rien à inventer. Il suffit d’ap-pliquer les connaissances acquises».La première transplantation rénale a été réalisée, en 1986, au CHU Mustapha et la seconde, une année après, au C.H.U. Ben-badis de Constantine. A l’époque, l’Algérie était, presque, au même niveau que les pays occidentaux, qui ont démarré l’activi-té à peine une décennie auparavant. Il n’en demeure pas moins que la pratique, qui était appelée à prendre son envol rapide-ment, a stagné, jusqu’à amorcer une recu-lade importante. Les freins se sont accu-mulés, au fur-et-à-mesure que les autorités compétentes se désintéressent de la greffe rénale. Elles ont négligé, dès lors, le déve-loppement des centres de transplantation rénale, en parallèle de l’arsenal thérapeu-tique de l’insuffisance rénale chronique terminale, entre autres; soit, la néphrologie, l’hémodialyse, l’anesthésie- réanimation, la radiologie, l’anatomie pathologie, le centre de transfusion sanguine, le laboratoire H.L.A., la chirurgie urologique et vasculaire périphérique

Prise en charge de la maladie rénale, en Algérie :

Les spécialistes regrettent le sous-développement

de la greffe rénale

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 2323

En 2013, la maladie rénale continue à inquiéter les professionnels de la Santé et les patients. La médecine propose une thérapie adaptée à chaque cas posé par la pathologie. Il n’en demeure pas moins qu’en Algérie, les autorités sanitaires misent, encore, quasi-exclusivement sur l’hémodialyse, pourtant coûteuse (300 millions d’euros dépensés, annuellement) et contraignante.

Par Rania Hamdi

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Santé-MAG N°28 - Mars 201424

Santé Mag: Où en est la spécialité ‘’né-phrologie’’, à Tlemcen ?

Pr M. Benmansour: Lorsque j’avais ter-miné ma formation en néphrologie, en 1984,  j’avais ouvert un centre de né-phrologie, au CHU de Tlemcen. Depuis cette date, à nos jours, que s’est-il pas-sé ? Eh ! bien l’état des lieux, à Tlemcen comme partout ailleurs, il y a beaucoup d’insuffisants rénaux. Pourquoi  ? Parce que nous avons beaucoup de médecins, l’évolution et les besoins sociaux, la for-mation, l’aspiration des gens à la santé ont fait que l’on découvre, de plus en plus, de malades. Pendant 20 ans, nous avons fonctionné avec le seul centre du CHU de Tlemcen et maintenant, nous avons, environ, 800 malades dialysés, pour une population de 1 million d’habi-tants. Comme je le disais, nous étions à un seul centre, pendant 20 ans et ces 10 ans dernières années, 10 nouveaux centres ont été créés, aussi bien dans les secteurs public que privé. Nonobs-tant cette augmentation de capacité de traitement, la plupart des centres sont,

presque, saturés. Cela témoigne de la croissance de cette pathologie. Comme nous sommes sur le terrain, nous voyons des patients errer dans les services de dialyse. Nous sommes contents de les sauver, dans un premier temps; puis, naissent des problèmes de tout genre. L’Etat a investi dans des infrastructures et n’a pas lésiné sur la dépense, pour que les malades aillent bien. Aussi, les conditions de dialyse de notre pays n’ont rien à envier à ceux de l’Europe; mais, il n y a pas que le traite-ment technique, pour que le patient soit bien pris en charge par dialyse. Il faut, également, tenir compte de la situation sociale et psychologique du dialysé.

Pour revenir à vos propos quelle est la situation sociale et psychologique de ces malades dialysés ? La gravité de la maladie, la lourdeur du traitement ont, en effet, des répercus-sions, négatives, sur le malade et sa fa-mille. Ainsi, il arrive que le patient perde son emploi, du fait de la permanence des soins et des conséquences drama-tiques, qui entraînent que des familles se disloquent, des drames humains aux-quels on assiste; et puis, une espèce de résignation l’emporte, alors à la longue. On ne parle pas des personnes âgées, ou des nourrissons; il s’agit, plutôt, de la population active adulte, chez laquelle des dépressions sont constatées, ainsi que de l’agressivité; en raison, souvent, de la perte de statut social et d’absence de perspective positive, de par leur dépendance à la machine. Aussi, on se bat pour promouvoir la greffe du rein comme seule issue à toutes ces âmes en errance et en peine. Cependant et en l’occurrence, nous ne pouvons déployer que les moyens disponibles.

Quelles perspectives, pour ces malades?Notre défi, en ce qui nous concerne, c’est le problème de l’équipe multidisciplinaire. Travailler ensemble - et comme on n’a pas l’habitude de le faire -, c’est un sacré effort à déployer, que d’assurer ses res-ponsabilités dans un cadre collectif. Etant convaincu, par ma qualité de néphro-logue, que la dialyse n’est pas la solution définitive aux malades il faut, donc, se battre pour promouvoir la greffe et cela a été l’objet des journées de sensibilisation, à Tlemcen, qui ont vu la participation du Professeur Aberkane et d’organismes reli-gieux. Les malades, on les voit, attendent des initiatives, dans ce sens. Nous avons démarré le projet, en 2007. Le problème qu’on avait, à Tlemcen, c’est que les chirurgiens, qui étaient censés s’occu-per de la greffe, ne le faisaient pas. Il fal-lait, donc, les motiver et les pousser à la réaliser; mais, cela reste du volontarisme. En effet, par exemple, de 2007 à 2011, des chirurgiens, qui venaient d’Alger, en ont réalisé; mais, pas assez suffisamment. On a voulu passer à autre chose, donc et depuis 2013, nous avons fait, à ce jour, 15 greffes. Cela parait énorme, mais ce n’est, en fait, qu’une goutte dans l’océan. Nous, ce que nous voulons, c’est que la greffe rénale devienne une pratique courante. On sait que cette activité doit exister; alors, on ne peut pas rester à un stade mi-nima. Aussi, les pouvoirs publics doivent nous aider dans ce sens. C’est notre mes-sage, car il y aura, toujours, des malades en hémodialyse; mais, que le pourcentage de greffés soit moins anecdotique, que ce qu’il est maintenant

* Pr Mustapha Benmansour, chef du service néphrologie, au CHU de Tlemcen.

"La gravité de la maladie, la lourdeur du traitement ont des répercussions

négatives sur le malade et sa famille" Propos recueillis par Tanina Ait

Pr Mustapha Benmansour*, à Santé Mag:

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 2525

Santé Mag: Quel est l’état des lieux de la transplantation d’organes, à Constantine ?

Pr A. Dahddouh: A Constantine, notre institut du rein existe depuis 1988. C’est le deuxième centre, dans l’ordre chro-nologique de transplantation rénale, en Algérie. A Alger, la première transplanta-tion rénale, à partir d’un donneur appa-renté, s’est faite en 1986 et à Constantine, une année après. Depuis cette date, nous avons eu des hauts et des bas. Toujours est-il que nous pouvons dire que les ini-tiatives et la volonté de nos équipes font que, globalement, les choses avancent. Cette activité, que nous voulons pé-renne, est, en effet, à mettre au crédit du Professeur Aberkane, de nos immunolo-gues, néphrologues, chirurgiens, anes-thésistes et à laquelle nous participons, également. Ce type d’opérations ne se fait pas sans peine; mais, nous conti-nuons à travailler, malgré tous les pro-blèmes rencontrés. Le rythme n’est pas très élevé et nous souhaitons qu’il le soit davantage, étant donné que les compé-tences existent et sont sur place.Par ailleurs, l’EHS Daksi de Constan-tine a été le premier centre à procéder à la greffe rénale, à partir du cadavre. Cette opération, réalisée en 2002, a été un succès.

Malgré, donc, des compétences avérées, le taux de greffe rénale est, en effet, faible. Quelle explication pouvez-vous donner?La grève rénale est un must, en matière de santé publique; elle est indispensable à notre médecine, notre secteur sani-taire, nos ressources humaines. Elle est incontournable, pour la mise à niveau de tous ces volets de la médecine. Ce qui l’entrave, c’est qu’il n y a pas eu de Programme national de promotion de la greffe d’organes.

Il y a une Agence nationale qui vient d’être créée à Blida. Cette structure va-t-elle améliorer les choses ?L’Agence nationale du rein fait du sur place, pour ne pas dire qu’elle n’existe pas. Elle n’existe que sur décret et toujours pas d’activités. Nous aime-rions qu’un Programme national de transplantation d’organes soit établi; qu’il y ait, également, des structures adéquates et bien adaptées, avec des spécialités complémentaires, pour prendre en charge ce genre d’activités médicales.

Quel est le rayon d’action de Constan-tine, en matière de greffe rénale ? Nous avons transplanté des malades de toute l’Algérie: de l’extrême Ouest à

l’extrême Est, du Sud au Nord et même des étrangers de l’Afrique Subsaha-rienne. L’activité de la transplantation d’organes, en général et du rein, en particulier, n’est pas limitée dans l’es-pace. L’idéal est de développer la transplan-tation à partir de l’individu en état de mort encéphalique et à condition que son HLA soit compatible avec celui d’un patient en attente d’une greffe habitant, par exemple, Maghnia. On l’appellera pour qu’il en bénéficie. Nous voyons, donc, que l’activité de transplantation d’organes ne doit pas être limitée dans l’espace et doit être, pour tout le moins, nationale; quand elle ne s’étalerait pas en Afrique du nord; voire, en Europe. D’ailleurs, en Europe, il y a Euro-trans-plant. Si on ne trouve de patient com-patible avec le rein prélevé d’un ca-davre, en France, on cherchera, alors, dans le fichier Européen, pour trou-ver, éventuellement, un bénéficiaire quelque part sur le continent; faire en profiter un Allemand, le cas échéant.

Ce type de fichier va-t-il être établi dans notre pays, à l’instar de l’Europe ?On doit faire notre fichier maghrébin, puisque c’est le procédé thérapeutique le moins coûteux; donc, rentable au plan économique. Ceci représente des avantages, car il y a plus de chances, en effet, de trouver preneur à une plus grande échelle. La greffe permet, éga-lement, une excellente réhabilitation et une meilleure qualité de vie au pa-tient. C’est pourquoi nous demandons à l’Etat de s’impliquer plus fortement, par la mise en place, pour encourager ce programme

* Pr Abderrezak Dahdouh, chef du service urologie et transplantation rénale, EHS Daksi – Constantine.

"La greffe rénale est un must, en matière de santé publique"

Propos recueillis par Tanina Ait

Pr Abderrezak Dahdouh*, à Santé Mag,

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Santé-MAG N°28 - Mars 201426

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La maladie de Berger, également appelée glomérulonéphrite à dépôts mésangiaux d'IgA, ou simplement né-phropathie à IgA est une maladie auto-immune atteignant les reins.

HISTORIQUELa néphropathie à Ig A a été découverte en 1966, par le Professeur Jean Berger, de l’hôpital Necker à Paris, en utilisant un sérum anti-IgA, sur des biopsies ré-nales de patients. Ses travaux (en col-laboration avec Nicole Hinglais) ont été publiés en 19681.

ÉPIDÉMIOLOGIELa maladie de Berger touche, essen-tiellement, les jeunes adultes; mais, elle peut, également, se développer chez les enfants, ainsi que chez les adultes âgés. Les hommes sont, plus souvent, atteints que les femmes. Elle concerne 1 % de la population mondiale2 et est la cause, la plus fréquente, de  glomérulonéphrite3. Sa prévalence exacte est, cependant, très probablement, sous-estimée, puisque le diagnostic requiert une biop-sie rénale, geste lourd. Ainsi, un dépôt rénal d'Ig A est présent dans un rein sur neuf, lors d'examens systématiques en vue de transplantation4. L'incidence semble plus élevée dans certains pays, dont le Japon5.

MÉCANISMESL'évolution de cette maladie se fait, la plupart du temps, très lentement; c’est-à-dire, sur plusieurs années. Dans l'histoire du malade, une infection res-piratoire haute (angine,  pharyngite) est diagnostiquée quelques jours avant l'apparition de l'hématurie  macrosco-pique, caractéristique de la maladie. En cas d'infection, quelle qu'elle soit, il y a production d'anticorps, censés participer à la destruction de l'agent infectieux. Dans la maladie de Berger, comme dans d'autres maladies auto-im-munes, les anticorps de type Ig A, nor-malement produits pour détruire les agents infectieux, présentent une  gly-cosylation aberrante6, qui modifie leurs propriétés physicochimiques. Ils auront tendance à se fixer aux cellules mésan-giales du glomérule rénal. Dans le cas de la maladie de Berger, le dépôt concerne, uniquement, en monomères d'Ig A1, sous classe des Ig A7. L'inflammation ré-

nale, qui en résulte, entraîne des lésions du filtre rénal et une «fuite» des compo-sants du sang vers l'urine, en particulier des  hématies. Le principal signe de la maladie est, ainsi, l'apparition de sang dans les urines, quelques jours après le début d'une infection; que ce sang soit visible (hématurie macroscopique), ou non (hématurie microscopique).Une production, excessive, d’Ig A circu-lant dans le sang peut entraîner l’agglu-tination d’Ig A. Elle va, par la suite, se déposer dans le glomérule rénal,  lors de la filtration du sang par le rein. Cette production excessive va entraîner une inflammation du rein, qui va conduire à la formation de cicatrices dans le rein, et à une déformation de celui-ci. L’insuf-fisance rénale s’installe donc avec le temps, au fur et à mesure.Il existe des facteurs génétiques avec des formes familiales. Le défaut de glycosylation de l'Ig A1 a un caractère héréditaire, mais le ou les gènes res-

ponsables n'ont pas été identifiés8. Des mutations sur le chromosome 6, dans la région codant pour le complexe majeur d'histocompatibilité,  augmenteraient le risque de survenue de la maladie9, de même que des délétions dans les gènes CFHR1 etCFHR310.

ÉVOLUTION DE LA MALADIEL'évolution est variable. La maladie est classée en quatre stades:Stade n°1: glomérulopathie mésangio-pathique. Il représente, en France, 20 % à 40 % des cas.Stade n°2: glomérulonéphrite segmen-taire et focale. Ces lésions touchent moins de 30  % des cas de glomérules (stade 2a) ou plus (stade 2b). Ce stade est le plus fréquent, puisqu’il représente 30 % à 60 % des cas de biopsies.Stade n°3: glomérulonéphrite prolifé-rative diffuse mésangiale pure. Il repré-sente 5 % à 20 % des cas.Stade n°4: prolifération endo-extra-

Maladie de Berger

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 2727

capillaire avec présence de croissants. Ces lésions touchent moins de 50  % des cas avec glomérules avec croissants inférieur (stade 4a), et supérieur à 50 % (stade 4b).Un cinquième des malades atteignent un stade d'insuffisance rénale avancée, nécessitant un traitement par  hémo-dialyse. Ces derniers ont, plus sou-vent, une  protéinurie  supérieure à 1 g/jour, une hypertension artérielle et des lésions plus sévères sur la biopsie rénale11. Le risque de développer une insuffisance rénale, dans les 10 ans, est inférieur à 10 %, si la fonction rénale est normale à la découverte de la maladie5.

MANIFESTATIONSChez l'enfant et l'adulte jeune, les trois quarts des cas se manifestent par une  hématurie  macroscopique (urines rouges, ou brunes), survenant à proxi-mité d'un épisode infectieux ou diges-tif5. Chez l'adulte plus âgé, la maladie est, fréquemment, découverte à l'occa-sion d'une complication (insuffisance rénale, ou hypertension).Un  syndrome néphrotique  est rare. Ce syndrome se traduit par la présence de protéines, (essentiellement de l’albu-mine), dans les urines. Il entraîne une di-minution, importante, des protéines cir-culant dans le  sang, une apparition d’œdème, de troubles de la coagulation, une augmentation des  lipides  dans le sang, une  hypertension artérielle  et une insuffisance rénale.Une  insuffisance rénale  aiguë est pré-sente dans 5  % des cas. Elle se mani-feste par des  œdèmes, une  hyperten-sion artérielle  et une diminution de la quantité d’urine émise (oligurie). Elle peut s’accompagner de douleurs  lom-baires, une asthénie, un goût particulier dans la bouche, des nausées après l'ali-mentation.

DIAGNOSTICL'histoire du patient et de sa famille est primordiale. Une hématurie chez les pa-rents et les grands-parents ainsi qu'une surdité chez de jeunes adultes feront suspecter un syndrome d'Alport ou une hématurie familiale bénigne.Il faut doser les  antistreptolysines  O (ASLO) afin d'exclure une  glomérulo-néphrite post-streptococcique, qui peut se présenter, également, sous la forme d'une hématurie, environ dix jours après l'infection à streptocoques (angine, par exemple). Malgré tout, de nombreuses infections, comme la  mononucléose infectieuse, peuvent, également, induire

une atteinte rénale, sans production d'ASLO. Mais, l'hématurie, due à une glomérulonéphrite post-infectieuse, finit, toujours, par disparaître; contrairement à celle d'une maladie de Berger, et c'est, souvent, en surveillant l'évolution sur plusieurs mois, qui permet de faire la dif-férence. Le dosage des composantes C3 et C4 du complément est, aussi, essen-tiel, pour éliminer ce diagnostic. En effet, dans les glomérulonéphrites post-infec-tieuses, le C3 est typiquement très bas, alors qu'il est normal dans la maladie de Berger.Le taux sanguin d'IgA1 déficient en ga-lactose est augmenté chez les patients, mais ce test a une sensibilité et une spé-cificité imparfaite12. Une augmentation de la fraction C3 activée du complé-ment serait un facteur de gravité13, ainsi qu'une élévation de l'uricémie14.La  biopsie rénale  permet de porter le diagnostic. L'examen en  microscopie optique peut montrer plusieurs types de lésions, aspécifiques, cependant. L'exa-men en  immunofluorescence  montre des dépôts caractéristiques d'Ig A. La présence de dépôts de C4d serait de bon pronostic15. La « classification d'Ox-ford  » des résultats histologiques per-met d'aider à évaluer le pronostic16.Il faut rechercher des complications de la maladie: recherche d'une protéinu-rie, d'une hypertension artérielle, d'une insuffisance rénale.Un  examen cytobactériologique des urines élimine une infection urinaire (qui peut, parfois, donner une hématurie).L'hémogramme  permet de rechercher une  anémie, en cas d'hématuries  ma-jeures (ce qui est rare).

TRAITEMENTLa Société internationale de néphrolo-gie a publié, en 2012, des  recomman-dations,  pour la prise en charge de la maladie de Berger17.Aucun traitement n'est nécessaire en l'absence de protéinurie, d'hypertension artérielle, ou d'insuffisance rénale.La mise sous un inhibiteur de l'enzyme de conversion, ou d'un antagoniste des récepteurs de l'angiotensine. II est prio-ritaire pour contrôler l'hypertension ar-térielle, ainsi qu'une protéinurie17.Les  corticoïdes  peuvent entraîner une réduction des lésions sur la biopsie ré-nale18 et sont réservés, avec les  immu-nosuppresseurs, aux formes évolutives.Certaines équipes proposent une amyg-dalectomie, dans l'hypothèse d'une ori-gine infectieuse mais l'efficacité n'en est pas démontrée5.

En cas d'insuffisance rénale, la  trans-plantation rénale  peut être proposée: la maladie peut récidiver sur le greffon dans un tiers des cas; mais, le plus sou-vent, sans conséquence19, le traitement par  corticoïdes  étant susceptible de diminuer le risque de récidive20.

Notes et références 1.Berger J., Hinglais N., Les dépôts intercapillaires d’IgA-IgG, J. Urol. Néphrol., 1968; 74: 694-5.2.Silvana Savoldi, « maladie de Berger » [archive], juil-let 2007 (consulté le 8 mai 2013).3.D'Amico G,  The commonest glomerulonephritis in the world: IgA nephropathy, Q J Med, 1987;64:709-7274.Suzuki K, Honda K, Tanabe K, Toma H, Nihei H, Yama-guchi Y, Incidence of latent mesangial IgA deposition in renal allograft donors in Japan [archive], Kidney Int, 2003;63:2286-22945.a, b, c et d Wyatt RJ, Julian BA, IgA nephropathy [ar-chive], N Engl J Med, 2013;368:2402-24146.Allen AC, Harper SJ, Feehally J,  Galactosylation of N- and O-linked carbohydrate moieties of IgA1 and IgG in IgA nephropathy [archive], Clin Exp Immunol, 1995;100:470-4747.Conley ME, Cooper MD, Michael AF, Selective depo-sition of immunoglobulin A1 in immunoglobulin A nephropathy, anaphylactoid purpura nephritis, and systemic lupus erythematosus [archive], J Clin Invest, 1980;66:1432-14368.Kiryluk K, Julian BA, Wyatt RJ et al. Genetic studies of IgA nephropathy: past, present, and future  [ar-chive], Pediatr Nephrol, 2010;25:2257-22689.Feehally J, Farrall M, Boland A et al.  HLA has strongest association with IgA nephropathy in ge-nome-wide analysis  [archive], J Am Soc Nephrol, 2010;21:1791-179710.Gharavi AG, Kiryluk K, Choi M et al. Genome-wide association study identifies susceptibility loci for IgA nephropathy [archive], Nat Genet, 2011;43:321-32711.Berthoux F, Mohey H, Laurent B, Mariat C, Afiani A, Thibaudin L,  Predicting the risk for dialysis or death in IgA nephropathy  [archive], J Am Soc Nephrol, 2011;22:752-76112.Moldoveanu Z, Wyatt RJ, Lee JY et al. Patients with IgA nephropathy have increased serum galactose-de-ficient IgA1 levels [archive], Kidney Int, 2007;71:1148-115413.Zwirner J, Burg M, Schulze M et al.  Activated complement C3: a potentially novel predictor of progressive IgA nephropathy  [archive], Kidney Int, 1997;51:1257-126414.Shi Y, Chen W, Jalal D et al.  Clinical outcome of hyperuricemia in IgA nephropathy: a retrospective co-hort study and randomized controlled trial [archive], Kidney Blood Press Res, 2012;35:153-16015.Espinosa M, Ortega R, Gomez-Carrasco JM et al. Mesangial C4d deposition: a new prognostic factor in IgA nephropathy [archive], Nephrol Dial Transplant, 2009;24:886-89116.Cattran DC, Coppo R, Cook HT et al.  The Oxford classification of IgA nephropathy: rationale, clinico-pathological correlations, and classification [archive], Kidney Int, 2009;76:534-54517.a et b KDIGO clinical practice guidelines for glome-rulonephritis -- chapter 10: immunoglobulin A nephro-pathy [archive]. Kidney Int Suppl, 2012;2:S209-S21718.Hotta O, Furuta T, Chiba S, Tomioka S, Taguma Y,  Regression of IgA nephropathy: a repeat biopsy study [archive], Am J Kidney Dis, 2002;39:493-50219.Ponticelli C, Traversi L, Feliciani A, Cesana BM, Banfi G, Tarantino A, Kidney transplantation in patients with IgA mesangial glomerulonephritis  [archive], Kidney Int, 2001;60:1948-195420.Clayton P, McDonald S, Chadban S,  Steroids and recurrent IgA nephropathy after kidney transplanta-tion [archive], Am J Transplant, 2011;11:1645-1649

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Santé-MAG N°28 - Mars 201428

RÉSUMÉL’amyloïdose est un terme, générique, désignant des fibrilles formant des dépôts extracellulaires. Plus d’une quinzaine de types d’amyloïdose ont été décrits. Les formes systémiques primaires (AL) ou secondaires (AA) sont, de loin, les plus fréquentes. Dans l’amyloïdose systémique primaire, les reins, le cœur et le tube digestif sont les organes les plus souvent touchés. Dans la forme secondaire, l’atteinte rénale prédomine. Seule la biopsie permet d’établir le diagnostic. Le traitement de l’amyloïdose primaire est basé sur l’éli-mination des chaînes légères et l’arrêt de leur production, par destruction du clone lymphocytaire responsable. Dans les formes secondaires, le traitement est dirigé contre l’inflammation chronique, à l’origine du processus. Globalement, le pronostic est très sombre et dépend de la sévérité de l’atteinte des organes cibles. Chez les patients arrivés au stade de la dialyse, le pronostic est, encore, plus sombre.

INTRODUCTIONLe terme «amyloïdose» est introduit dans la littérature médicale en 1845, par Rudolph Virchow, lorsqu’il décrit des dépôts se colorant, de la même manière que la cellulose, avec l’iode. Nous devons, ensuite, à Samuel Wilks, la première description d’amyloïdose primaire.1 Il décrit, en 1856, un patient avec atteinte viscérale, ne souffrant ni de tubercu-lose, ni de syphilis. En 1867, Weber établit le lien entre l’amyloïdose et le myélome multiple.2 Le rouge Congo – une teinture qui a, long-temps, servi à la coloration des textiles – est utilisé, dès 1920, par Bennhold.3 En 1992, Solomon et coll. Dé-montrent, chez la souris, que des perfusions de protéines de Bence Jones, extraites de deux patients, provoquent une atteinte rénale, avec dépôts d’amyloïde.4PathologieL’amyloïdose est un terme générique désignant des dépôts extracellulaires de fi-

brilles, dont la caractéristique principale est la structure en feuillet bêta plissé, qui les rend insolubles et résistantes à la protéolyse.5Plusieurs facteurs contribuent à leur agrégation. La protéine peut avoir une tendance naturelle à l’agrégation, apparente dès que sa concentration augmente. La composition des fibrilles dépend de la maladie associée, ou de l’atteinte clinique (Tableau 1). Dans la forme primaire (AL), il s’agit de chaînes légères (entières, ou uniquement les fragments N terminaux), alors que dans la forme secondaire, il s’agit de la serum amyloid associated protein (SAA), une protéine de la phase aiguë inflammatoire. Indé-pendamment de leur composition, ces fibrilles sont, invariablement, associées à une protéine plasmatique: la  serum amyloid protein (SAP).

COMPOSITION DES FIBRILLES, EN FONCTION DE L’ATTEINTE CLINIQUE L’amyloïdose AL peut être isolée (forme AL, dite primaire), ou associée à une hé-mopathie à lymphocytes B (myélome, MGUS (gammapathie monoclonale de signification indéterminée), maladie de Waldenström, lymphome B secrétant). Concernant les patients atteints d’un myélome multiple, une étude, portant sur 4319 patients, a montré que seuls 47 d’entre eux (1,1%) ont développé une amyloïdose.6 

Les auteurs ont remarqué que tous ceux qui ont développé une amyloïdose avaient un rapport kappa/lambda < 1:2, ce qui suggère que les chaînes lambda sont associées à un risque, accru, de développer cette complication.De même, seul un petit nombre des patients, atteints d’amyloïdose AL, évoluent vers un myélome multiple. Ce fait est illustré par l’observation d’une série de 1596 patients. Parmi eux, seuls six ont développé cette complication (0,4%), dans un délai de 10 à 81 mois après le diagnostic d’amyloïdose.7 Il est intéressant de noter que l’amy-loïdose de ces patients touchait, princi-palement, la peau, le système nerveux, ou les reins. Les patients, présentant une atteinte cardiaque, ne survivent, gé-néralement, pas assez longtemps, pour progresser vers un myélome.Pour les patients, atteints d’une MGUS, le risque relatif de développer, à terme, une amyloïdose AL, ou un myélome est de 8,4 et 25, respectivement. Ceci équi-vaut à un risque de progression d’envi-ron 1% par année, comme démontré dans une cohorte de 1384 patients, sui-vis pendant quinze ans, en moyenne (de 0 à 35 ans).8 Durant l’étude, dix patients ont déve-loppé une amyloïdose AL et 75 un myé-lome multiple. La probabilité, cumulée, de progression d’une MGUS vers une de ces pathologies était de 10% à dix

L’amyloïdose rénale

Type d’amyloïdose Dépôt Maladie associée et/ou atteinte clinique

Amyloïdose (AL) Ig Chaîne légères Myélome multiple, MGUS, lymphome non hodgkinien ou idiopathique

Amyloïdose secondaire(AA)

Ig chaîne lourdes Polyarthrite rhumatoïde, RCUH, maladie de Crohn, spondylarthrose, Bechterew, fièvre méditerranéenne, tuberculose, syphilis, bronchiectasie et ostéomyélite

Serum amyloid associated (SAA)

Liée à la dialyse Ig bêta-2-microglobuline

Héréditaire ApoA2 Amyloïdose héréditaire rénale

Transthyrétine (TTR) Amyloïdose héréditaire neuropathique et/ou cardiopathique

Fibrinogène chaîne alpha Amyloïdose néphropathique héréditaire

Lysosome Amyloïdose néphropathique héréditaire

Liée à l’âge ApoAI

ANP Amyloïdose liée à l’âge, isolée de l’oreillette

Liée à l’organe Amyloid precursor protein (APP) Maladie d’Alzheimer héréditaire ou sporadique

Prion Encéphalopathie spongiforme héréditaire ou sporadique

TGFB/kératoépitheline Dystrophie cornéale familiale

Autre Procalcitonine Complication d’une tumeur à cellules C de la thyroïde

Islet amyloïde Insulinome, diabète II

Prolactine Prolactinome

Insuline Complication de l’utilisation de pompe à insuline

Ig: immunoglobines; ANP: atrial natriuretic peptide; MGUS: gammapathie monoclonale de signification indéterminée; RCUH: rectocolite ulcéro-hémorragique; TGFb: transforming growth factor; ApoA: apolipoprotéine

Tableau 1: Composition des fibrilles en fonction de l’atteinte clinique

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ans, 21% à vingt ans et 26% à 25 ans. Les patients, avec une protéine mono-clonale à IgM ou IgA, avaient le risque le plus grand.L’amyloïdose secondaire (AA) est une complication de certaines maladies inflammatoires chroniques. Histori-quement, les infections chroniques (tuberculose, bronchiectasies, syphilis, ostéomyélite) étaient courantes. Avec l’avènement des antibiotiques, les mala-dies auto-immunes (polyarthrite rhu-matoïde, maladie de Bechterew, recto-colite ulcéro-hémorragique, maladie de Crohn) sont devenues, proportionnel-lement, plus fréquentes. Une nouvelle forme d’amyloïdose AA a été décrite, en 1985, chez des héroïnomanes.9 Elle est secondaire aux multiples abcès que développent, souvent, ces patients aux sites d’injection. Dans cette forme, l’atteinte rénale est précoce et évolue vers un syndrome néphrotique et une insuffisance rénale rapidement progres-sive.9

INCIDENCEL’amyloïdose est une maladie rare. Aux Etats-Unis, il y a entre 1275 et 3200 nou-veaux cas, par an.10 On la rencontre sur 2% des biopsies ré-nales. La prévalence des différents types d’amyloïdose varie de manière géogra-phique. Dans les pays dits développés, le type AL est le plus courant alors que, dans les pays en voie de développement et ceux du pourtour méditerranéen, on observe une prédominance du type AA.

PRÉSENTATION DE CASCas cliniqueUn patient de 71 ans est connu pour une insuffisance rénale chronique (IRC) (eGFR (estimated Glomerular Filtration Rate) de l’époque 44 ml/min) et des diarrhées chroniques, dont l’origine reste inexpliquée, malgré de multiples investi-gations (trois œsophago-gastro-duodé-noscopies (OGD), deux colonoscopies, deux CT-abdominaux, IRM abdomino-pelviens et capsulographie du grêle) et biopsies (duodénum, estomac, côlon, rectum). On lui connaît, également, une paraprotéinémie à IgG lambda stable, de même qu’une dysesthésie aux membres inférieurs, dont l’origine est, également, indéterminée. Ce patient est hospitalisé, pour aggravation de diarrhées chro-niques et de l’IRC. A l’entrée, le patient est hypertendu à 200/112 mmHg et pré-sente des œdèmes très marqués des membres inférieurs et supérieurs.Le bilan néphrologique met en évidence

une clairance de la créatinine à 15 ml/min, ainsi qu’une protéinurie de 8 g/24 heures, essentiellement constituée d’al-bumine. L’ultrason des voies urinaires montre des reins de taille et de mor-phologie normales. La recherche d’une paraprotéine ne montre que la gamma-pathie monoclonale à IgG lambda, déjà connue. La biopsie rénale, en revanche, révèle une amyloïdose avec d’abondants dépôts glomérulaires, interstitiels et vas-culaires (Figures 1 et 2). L’immunofluores-cence ne révèle pas de dépôt de chaînes légères kappa, ou lambda, dans ces dépôts d’amyloïde. Une ponction biop-sie de moelle démontre une très faible population de plasmocytes atypiques, évalués à 0,5% de la cellularité totale, dont l’analyse suggère une monoclona-lité lambda. Nous retenons le diagnostic d’amyloïdose secondaire à une MGUS. Nous complétons le bilan par un ultra-son cardiaque, qui ne montre pas de signe de dépôt amyloïde à ce niveau.

Une chimiothérapie par bortézomib, melphalan et prednisone est débutée; mais, malheureusement, très mal sup-portée, elle est, rapidement, abandon-née. La fonction rénale se maintient aux environ de 15 ml/min de clairance, avec une protéinurie massive. Le patient est sévèrement dénutri et souffre d’une acidose métabolique, probablement mixte, sur diarrhées, tubulopathie et insuffisance rénale, non corrigée malgré 6 g/jours de bicarbonate (Néphrotrans). Dans ce contexte, un traitement, par hémodialyse chronique, est instauré. Le patient bénéficie, également, d’une nutrition per-dialytique. Après avoir «cassé» la fonction rénale, par sous-traction volémique, le bilan à six mois est satisfaisant, avec diminution de la protéinurie, disparition des œdèmes périphériques et amélioration de l’état général.

CLINIQUELes manifestations cliniques dépendent de la nature des précurseurs protéiques, ainsi que de la quantité de dépôts d’amy-loïde. Dans les formes les plus courantes (AL et AA), les organes les plus touchés sont les reins, le cœur et le tube digestif (60% des patients).Dans le rein, l’amyloïde se dépose aux niveaux glomérulaire, vasculaire et tu-bulaire. A noter que les chaînes légères lambda sont plus néphrotoxiques que les chaînes kappa, pour une raison inconnue et sont associées à un moins bon pronos-tic.11 75% des patients avec amyloïdose

AL présentent une protéinurie asymp-tomatique12  ou un syndrome néphro-tique franc.13  Les dépôts vasculaires et tubulaires peuvent aboutir à une insuf-fisance rénale, lentement progressive, sans protéinurie.14  Au niveau tubulaire, on peut, parfois, observer une acidose tubulaire de type I, ou un diabète insi-pide néphrogénique.9 Chez un tiers des patients, les manifestations cardiaques sont au premier plan.15 L’anomalie la plus courante sur l’ECG est un bas voltage (50% des patients),

Type d’amyloïdose Dépôt Maladie associée et/ou atteinte clinique

Amyloïdose (AL) Ig Chaîne légères Myélome multiple, MGUS, lymphome non hodgkinien ou idiopathique

Amyloïdose secondaire(AA)

Ig chaîne lourdes Polyarthrite rhumatoïde, RCUH, maladie de Crohn, spondylarthrose, Bechterew, fièvre méditerranéenne, tuberculose, syphilis, bronchiectasie et ostéomyélite

Serum amyloid associated (SAA)

Liée à la dialyse Ig bêta-2-microglobuline

Héréditaire ApoA2 Amyloïdose héréditaire rénale

Transthyrétine (TTR) Amyloïdose héréditaire neuropathique et/ou cardiopathique

Fibrinogène chaîne alpha Amyloïdose néphropathique héréditaire

Lysosome Amyloïdose néphropathique héréditaire

Liée à l’âge ApoAI

ANP Amyloïdose liée à l’âge, isolée de l’oreillette

Liée à l’organe Amyloid precursor protein (APP) Maladie d’Alzheimer héréditaire ou sporadique

Prion Encéphalopathie spongiforme héréditaire ou sporadique

TGFB/kératoépitheline Dystrophie cornéale familiale

Autre Procalcitonine Complication d’une tumeur à cellules C de la thyroïde

Islet amyloïde Insulinome, diabète II

Prolactine Prolactinome

Insuline Complication de l’utilisation de pompe à insuline

A

B

Figure 1: A. Dépôts d’amyloïde dans un glomérule rénal. B. Coloration au rouge Congo.

Les dépôts d’amyloïde sont colorés en bleu pâle au trichrome FAOG. Ces dépôts sont positifs pour le rouge Congo (B). Ils sont présents dans le mésan-gium et la paroi des capillaires glomérulaires, dans l’interstice et dans la paroi des artérioles.

Figure 2: Dépôts d’amiyloïde vus au microscope électronique

La microscopie électronique met en évidence les caractéristiques micro-fibrillaires (par opposition à micro-tubulaires), l’aspect aléatoire de l’organisa-tion de ces dépôts et permet de mesurer le diamètre de ces dépôts (7-10 nm).

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un bloc atrio-ventriculaire de deuxième ou troisième degré, une fibrillation au-riculaire, ou des patterns de pseudo-infarctus.16  On observe, souvent, des signes d’insuffisance cardiaque droite. A l’échocardiographie, on peut mettre en évidence un épaississement de la paroi du ventricule gauche, accompagné de dysfonction diastolique, qui progresse vers une cardiopathie restrictive, avec petites cavités ventriculaires et une ap-parence typiquement «scintillante» du myocarde. Les atteintes restrictives sé-vères se manifestent par des syncopes et sont associées à une mortalité aug-mentée à trois mois.17 La présence d’un thrombus intracardiaque est très fré-quente, notamment si le patient est en fibrillation auriculaire, ou souffre d’une dysfonction diastolique.10  Le risque de thrombus est deux fois plus élevé, lors d’amyloïdose AL (35% versus 18% dans les autres types d’amyloïdose).10 L’anticoagulation prévient la formation du thrombus cardiaque, mais augmente, aussi, nettement, le risque hémorra-gique chez ces patients à haut risque; 10 de ce fait, la décision d’anti-coaguler doit être prise, au cas par cas.Au niveau du tube digestif, l’infiltration de la muqueuse est très fréquente. Le duodénum est touché dans 100% des cas, l’estomac et le côlon dans 90%, et l’œsophage dans 70%. Les manifesta-tions cliniques peuvent inclure des sai-gnements gastro-intestinaux, favorisés par la friabilité de la muqueuse,18  des vomissements, ou une malabsorption (due soit à l’atrophie de la muqueuse infiltrée, soit à une colonisation bacté-rienne). L’infiltration neuromusculaire du tube digestif est plus rare et se ca-ractérise, dans un premier temps, par des contractions péristaltiques d’ampli-tude normale, mais avec des troubles de la coordination. Avec le temps, l’ampli-tude du péristaltisme diminue, entraî-nant un transit ralenti, avec constipation et gastroparésie. Dans d’autres cas, on observe, au contraire, une dysmotilité avec accélération du transit intestinal et diarrhées, qui sont expliquées par une neuropathie autonomique, favorisant une progression rapide du chyme et des sécrétions digestives.19 L’hépatomégalie, avec ou sans spléno-mégalie, est très fréquente.L’atteinte neurologique est presque la règle, avec des neuropathies mixtes sensorielles, motrices et/ou autono-miques, se manifestant par une hypo-tension orthostatique.20 Un syndrome du tunnel carpien peut

être le premier signe clinique d’une amyloïdose.Sur le plan hématologique, une ten-dance, accrue, aux saignements est, souvent, constatée. Elle s’explique par le déficit de facteur de coagulation (notamment le facteur X, qui est lié par l’amyloïde), une hyperfibrinolyse et une dysfonction plaquettaire.21 Parmi les autres manifestations de l’amyloïde, on notera, encore, l’infiltration de la langue et, au niveau cutané, un purpura périor-bitaire déclenché à la manœuvre de Val-salva, rare mais très caractéristique.

DIAGNOSTICLorsque le diagnostic d’amyloïdose AL est suspecté, on recherchera, dans un premier temps, une gammapathie monoclonale. L’électrophorèse des pro-téines plasmatiques, ou le dosage des chaînes légères libres, dans les urines de 24 heures, ou dans le sérum, per-mettent, aisément, de détecter un pic monoclonal. A cet égard, il est impor-tant de noter, d’une part, que la valeur normale augmente dans l’insuffisance rénale, en raison de la baisse de filtration des chaînes légères et que, d’autre part, le rapport kappa/lambda, dont la valeur normale est comprise entre 0,26 et 1,65, augmente avec la progression d’une insuffisance rénale et peut atteindre 3,1, lors d’insuffisance rénale sévère. De fait, un rapport normal bas, lors d’une insuf-fisance rénale, où la valeur attendue est plutôt élevée, doit faire suspecter une production monoclonale. La ponc-tion biopsie de moelle permettra, le cas échéant, de poser le diagnostic de myé-lome multiple.Le diagnostic définitif ne peut être éta-bli que par biopsie. Afin de réduire le risque hémorragique, il est recomman-dé de débuter par l’aspiration de tissu adipeux sous-cutané. Cette technique, peu invasive et facilement réalisable, a une sensibilité de 57-85% et une spéci-ficité de 92-100%.22 Les biopsies rénales et hépatiques ont une meilleure sensibi-lité (84 et 90%, respectivement), mais sont plus invasives et requièrent un per-sonnel spécialisé.A l’examen histologique, les dépôts d’amyloïde partagent les mêmes carac-téristiques, quelle que soit leur com-position. Les dépôts d’amyloïde se colorent au rouge Congo et prennent une couleur rouge ocre; ils apparaissent en vert pomme à la lumière polarisée. Cette réaction est produite par la struc-ture en feuillet bêta plissé des fibrilles d’amyloïdes. Au microscope électro-

nique, apparaissent des fibrilles d’en-viron 7 à 10 nm, non orientées, dites «en tas d’aiguilles». Un examen immu-no-histochimique sur du tissu fixé en formol tamponné peut, également, se faire, pour confirmer la nature amyloïde des dépôts, en utilisant des anticorps marqués et dirigés contre un épitope commun à tous les types d’amyloïde. Une fois le diagnostic d’amyloïdose posé par les pathologistes, une typisa-tion de ces dépôts doit être effectuée. Cette typisation se fait par un deuxième examen immuno-histochimique, ou par immunofluorescence. Ces deux tech-niques utilisent des anticorps marqués et dirigés contre un épitope des chaînes légères (AL-amyloïdose primaire), ou contre un épitope de la protéine SAA (AA-amyloïdose secondaire), ou contre la transthyrétine (TTR-amyloïdose fami-liale), ou encore contre une protéine amyloïde de la maladie d’Alzheimer (APP).Les critères suivants, définis par l’In-ternational Myeloma Working Group, doivent tous être remplis, pour poser le diagnostic d’amyloïdose AL: présentation clinique évocatrice; plasmocytose médullaire, rapport anor-

mal entre les chaînes légères kappa et lambda, ou mise en évidence d’un pic monoclonal, sur l’électrophorèse ou l’im-munofixation; coloration au rouge Congo positive

dans un tissu atteint; mise en évidence de chaînes légères

dans les dépôts (immunohistochimie ou cytométrie de flux).Malheureusement, 2 à 3% des cas ne remplissent pas les critères ci-dessus. Le diagnostic d’amyloïdose AL doit, alors, être posé avec précaution. En effet, des cas sporadiques d’amyloïdose hérédi-taire peuvent être confondus avec une amyloïdose AL, comme l’a montré une étude sur 350 patients. Celle-ci a mis en évidence 34 patients (10%) porteurs d’un gène muté, avec, en fin de compte, une amyloïdose héréditaire. Il est inté-ressant de noter que huit de ces patients avaient, également, une discrète gam-mapathie monoclonale, responsable de l’erreur diagnostique.23  Les mutations sur les gènes, gènes res-ponsables d’amyloïdose héréditaire, ont, souvent, une pénétrance variable; ce qui explique que la plupart des anamnèses familiales sont négatives.23

Les gènes, impliqués dans les amy-loïdoses familiales, sont multiples; on mentionnera l’amyloïdose familiale neu-ropathique, secondaire à l’accumulation

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 3131

de transthyrétine (TTR). Cette protéine, servant à transporter la tyroxine et le rétinol, est produite par le foie.En Angleterre, afin de réduire le risque d’erreur, tous les patients avec un dia-gnostic d’amyloïdose AL bénéficient d’une analyse d’ADN. Ceci évite l’ad-ministration inappropriée de chimio-thérapie et permet d’envisager une transplantation hépatique, comme par exemple dans l’amyloïdose familiale neuropathique.23

TRAITEMENT ET ÉVOLUTIONLe traitement dépend, bien entendu, du type d’amyloïdose. L’amyloïdose AA est, en priorité, traitée en diminuant l’inflammation sous-jacente, alors que le traitement de l’amyloïdose AL est dirigé contre le clone responsable. Le traitement de choix, pour l’amyloïdose héréditaire, dans laquelle la protéine mutante est produite par le foie, est une transplantation hépatique.Les agents chimio-thérapeutiques les plus souvent utilisés, pour traiter l’amy-loïdose AL, sont les stéroïdes, la thalido-mide et le melphalan ou le bortézomib (Velcade), selon que l’amyloïdose est associée, ou non, au myélome multiple. Malheureusement, la chimiothérapie est très toxique, chez ces patients fragiles et la mortalité induite est de 11 à 27%, selon les études.12 Ceci a entraîné une sélection plus rigou-reuse des patients, excluant, notam-ment, tous ceux avec atteinte cardiaque.Une deuxième option consiste en une myélo-suppression, suivie d’une trans-plantation de cellules souches autolo-gues, ou allogéniques. Cette méthode permet d’induire une rémission à long terme, mais est grevée d’une très haute mortalité, allant de 20 à 40%.24

En dehors du blocage de la production des chaînes légères, il n’y a, malheureu-sement, aucun traitement spécifique, pour l’atteinte gastro-intestinale, rénale ou cardiaque. L’usage de laxatifs et d’agents prokinétiques est recommandé pour la constipation, alors que les diar-rhées répondent bien aux corticosté-roïdes et à l’octréotide, dont il existe une forme dépôt injectable.25 Concernant l’atteinte rénale, arrivé au stade de l’insuffisance rénale terminale, le traitement consiste en dialyses, ou à une transplantation rénale. Bien que le pronostic des patients, parvenus au stade de la dialyse, soit réservé, une transplantation rénale reste possible et la survie du greffon est bonne. Un groupe de 23 patients, atteints d’amyloïdose

AL, ou secondaire à la fièvre méditerra-néenne, ont été greffés et suivis pendant dix ans. Leur évolution a été comparée à celle d’un groupe de patients greffés pour une autre raison que l’amyloïdose. La survie du greffon était de 80% dans le groupe amyloïdose, contre 94% à cinq ans dans l’autre groupe et de 66%, contre 87% à dix ans.26

Il est très difficile de freiner la progres-sion de cette maladie. Le temps moyen entre le diagnostic et le début de la dia-lyse est de 29,5 mois et le temps de sur-vie, en dialyse, est de 10,4 mois.11 La survie médiane est de quatre à six mois, en présence d’une insuffisance car-diaque ou hépatique et de 1,1 an avec un quelconque signe d’atteinte cardiaque autre que l’insuffisance cardiaque. L’in-suffisance cardiaque cause 51% des dé-cès, alors que l’insuffisance rénale et les infections sont responsables, chacune, de 15% des décès.De nouvelles molécules empêcheraient la formation de fibrilles en inhibant, de manière compétitive, la liaison de la SAP. L’une d’elles porte le doux nom de R-1-(6-(R-2-carboxy-pyrrolidin-1-yl)-6-oxo-hexanoyl) pyrrolidine-2-carboxylic acid. Elle permettrait, également, de rompre les liens entre les différentes molécules de SAP, accélérant leur élimination par le foie, et serait, donc, susceptible de faire fondre les dépôts d’amyloïde.27  Cette nouvelle substance n’est pas, encore, disponible sur le marché.

PRONOSTICLes facteurs pronostiques sont au nombre de trois: coexistence d’un myélome multiple, atteinte cardiaque et réponse au traitement. Les patients atteints d’amyloïdose, avec un myé-lome multiple, répondent, rarement, à la chimiothérapie (réponse complète chez 18% des patients) et cette réponse peut être très lente (temps moyen: un an).28 De plus, leur survie moyenne est plus courte que celle des patients atteints, uniquement, d’amyloïdose: 14 et 32 mois, respectivement.28 Le pronostic s’assombrit, encore, si le pourcentage de plasmocytes circulant est de plus de 1% (la survie chute, alors, de 31 à 13 mois), ou si la moelle contient plus de 10% de plasmocytes (la survie passe de 33 à 14 mois).28

Bien qu’une atteinte cardiaque ne soit diagnostiquée que chez la moitié des patients atteints d’amyloïdose, elle est, souvent, la cause du décès. La sévérité de l’atteinte cardiaque est corrélée à la concentration sérique de  N-terminal

brain nutriuretic peptide (NT-pro-BNP). Le NT-pro-BNP a une sensibilité de 93% et une spécificité de 90%, et une valeur prédictive positive et négative de 93,3% et 90,3%, respectivement.29  Une valeur seuil de 152 pmol/l permet de distinguer deux groupes, avec une survie très diffé-rente: neuf mois versus plus de deux ans. La mortalité est de 7,6 par 100 patients-année, pour le groupe en dessous de 152 pmol/l et de 72,2 par 100 patients-année, pour le groupe en dessus. Le NT-pro-BNP peut, également, être utilisé, pour suivre la réponse à la chimiothérapie.La réponse au traitement constitue le troisième facteur pronostique. Une diminution de la protéinurie de plus de 50%, ou l’amélioration de la fonction rénale de 25% permettent d’objectiver la réponse rénale à la chimiothérapie, tandis qu’une diminution de 50% des immunoglobulines reflète la réponse hématologique.24  La survie, moyenne, des patients ayant atteint une réponse hématologique, est de 66 mois et celle des patients ayant une double réponse (rénale et hématologique) est de 95 mois (l’étude est, encore, en cours).24

STRATÉGIE DE RECHERCHE ET CRI-TÈRES DE SÉLECTIONLes données, utilisées pour cette re-vue, ont été identifiées par une re-cherche  Medline  des articles publiés en français, ou en anglais, depuis 1995, dans le domaine de l’amyloïdose. Les mots-clés utilisés pour la recherche ont été: amyloidosis et kidney. La recherche de littérature a été effectuée entre avril et septembre 2011. Les articles ont été inclus dans la liste des références s’ils étaient jugés pertinents et étaient men-tionnés dans le texte.

IMPLICATIONS PRATIQUES Le diagnostic d’amyloïdose primaire

est, souvent, difficile au début de la ma-ladie, lorsqu’un seul organe est atteint; Le diagnostic ne peut être confirmé

que par une biopsie; La prise en charge des patients, at-

teints d’amyloïdose primaire, est multi-disciplinaire et implique, généralement, l’interniste, l’oncologue, le néphrologue et le cardiologue; Dans les formes secondaires, le traite-

ment dépend de la cause; Le pronostic dépend de l’atteinte des

organes cibles et, en particulier, de l’atteinte cardiaque dans la forme systé-mique primaire (AL). Le N-terminal brain nutriuretic peptide (NT-pro-BNP) a une valeur pronostique.

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[*] à lire[**] à lire absolument

Santé-MAG N°28 - Mars 201432

INPHA-MédiS: au service de la sante

Le laboratoire INPHA-MédiS est une société algérienne par actions, spécia-lisée dans l'industrie pharmaceutique à usage humain, implantée à Sidi-Kaci, dans la wilaya d'El Tarf.

Entrée en production en 2005, INPHA-MédiS, dont le système de manage-ment est certifié ISO 9001 V8, dispose d'installations et d'équipements de haute technologie, dans la fabrication des formes liquides de 8 millions d'uni-tés, par an; des formes sèches de 12 millions d'unités, par an et des formes stériles injectables (conditionnement)

de 5 millions d'unités, par an.Le Président Directeur Général, le Dr. Salim Habès affirmera: notre ambi-tion est d'offrir une large gamme de produits à haute valeur ajoutée, d'une part et répondre à l'intérêt du patient, d'autre part. Pour sa part, le directeur commercial, M. Walid Wahdan soulignera: notre souci est de répondre aux besoins du marché algérien, en priorité et ouvrir des perspectives internationales, dans un proche avenir. A cet effet, nous nous inscrivons dans la dynamique positive du marché pharmaceutique, en met-

tant à la disposition du patient algé-rien et des professionnels de la santé, différentes spécialités répondant à nos besoins, en terme de santé publique et se rapportant à un ensemble d'aire thé-rapeutiques, telles que la cardiologie, le système nerveux central, l'urologie, les anti-infectieux , les anti-inflamma-toires, la diabétologie, la gastro-enté-rologie, l'allergologie. Il convient de signaler que le labo-ratoire INPHA-MédiS, emploie 260 jeunes personnes (âge moyen de 31 ans), dont 40% sont des femmes

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 3333

Santé mag: La maladie rénale est-elle fréquente, en Algérie ?

Pr M. Benabadji: La maladie rénale, en général,  demeure toujours fréquente; environ, 10% de la population. C’est-à-dire, globalement, si on commence à prendre en considération les indices de l’atteinte rénale, comme la protéinurie, l’hématurie, l’hypertension artérielle, le diabète, qui sont les symptômes d’une atteinte rénale et qui doivent être confiés aux néphrologues. Mal-heureusement, lorsqu’on reçoit, dans nos services de néphrologie, ce type de malades, ils sont, toujours, à un stade final de la fonction rénale. Cela pose problème, car on est à la dernière roue de la charrette; néanmoins, on essaye de faire ce qu’on peut. Y a-t-il suffisamment de place pour prendre, dans un premier temps, en dia-lyse, tous ces patients? Tout à fait. Tous les malades, en insuf-fisance rénale terminale, sont pris en dialyse. Ce qui n’était pas évident il y a quelques années, où les malades mou-raient, faute de moyens. Cependant, la dialyse n’est qu’une thérapie alternative. C’est une solution d’attente au traite-ment de choix, qui est la greffe rénale; notamment, lorsque nos malades sont jeunes et la plupart sont jeunes, juste-

ment et c’est pour cela que nous souhai-tons développer cette pratique, qui est insuffisante. Les moyens existent-ils, pour dévelop-per la greffe d’organe, en général et la greffe de rein, en particulier ?On a tous les moyens de la développer; mais, malheureusement, on est confron-té à des tabous, dus à des pesanteurs sociologiques.  Par exemple, lorsqu’on est en face d’un accidenté de la route, qui est dans un coma irréversible, les parents, paniqués et en plein désarroi, refusent qu’on prélève les organes de leur défunt et c’est ainsi qu’on perd des possibilités, qui auraient pu être exploi-tées, au bénéfice de toute la population. Si on prend en référence, au demeurant, la population française, qu’on connait le mieux: il y a eu 4000 décès, dus aux ac-cidents de la route, en 2013, pour 60 mil-lions d’habitants; soit, 9 morts par jour; en Algérie, pays qui compte, environ, 40 millions d’habitants, il a été enregistré, la même année, 4500 accidentés de la route. Si on ne pouvait prélever que 500 cadavres (multiplié par deux reins), cela ferait 1000 personnes sauvées de la dia-lyse; car, il est clair que, pour un malade greffé, sa qualité de vie est meilleure et pour le budget de l’Etat, cette pratique est, nettement, plus économique.On espère, donc, concrétiser le prélève-

ment d’organes sur le cadavre, bien que nous souhaitions, à l’évidence, qu’il y ait moins d’accidents de la route. Comment peut-on agir sur les mentali-tés, pour faire admettre l’utilité du don d’organe, en pareille circonstance ?Il faut expliquer aux gens, dans les écoles, les mosquées, à travers les mé-dias que lorsqu’on prélève un cadavre, cela se fait proprement, dans un cadre légal, digne et c’est une bonne action, envers Dieu et les hommes. Ainsi, il fau-drait qu’il y ait le consentement de tous et cela nous encouragera, car on veut bien être utile, dans notre métier, pour le bien de tout le monde. Les accidents de la route existent dans le monde en-tier et le prélèvement sur cadavre, aussi.

Un message ?Ce que je veux dire, encore, c’est que le prélèvement sur cadavre permet de soigner 7 malades. Je m’explique: on prend les deux reins, le cœur, le pou-mon, le foie, les intestins et le pancréas, pour soigner le diabétique et cela est un grand potentiel qu’il faudrait, absolu-ment, exploiter

* Pr Mohamed Benabadji, chef de service néphrologie, au CHU de Béni-Messous – Alger.

"Les malades arrivent, souvent, dans nos services de néphrologie,

à un stade final de la fonction rénale" Propos recueillis par Tanina Ait

Pr Mohamed Benabadji*, à Santé Mag,

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RECHERCHES MÉDICALES

Santé-MAG N°28 - Mars 201434

INTRODUCTIONLa dystrophie musculaire de Duchenne est une myopathie héréditaire progres-sive et d’évolution sévère, la plus fré-quente, qui atteint une naissance sur 6000 naissances masculines, récessive liée à l’X, causée par un trouble d’expres-sion de la dystrophine, essentielle dans le maintien de l’intégrité des fibres muscu-laires lors de la contraction. La particularité diagnostique de cette myopathie doit se baser sur des faits marquants, qui jalonnent son développe-ment, lors de la petite enfance: les types de symptômes, l’âge de leur apparition, les chutes fréquentes, l’âge d’arrêt de la marche… Les aspects dystrophiques tissulaires à la biopsie musculaire et l’absence d’expression de la dystrophie à l’immunohistochimie, les mutations des exons au niveau du gène de cette pro-téine. Depuis 2001, plusieurs schémas théra-peutiques ont été essayés: anabolisants stéroïdes, coenzyme Q10, carnitine, anti-inflammatoire et antioxydants et extrait du thé vert, préconisé par certains pra-ticiens. Seule la corticothérapie (prédni-sone/déflazacort), au long court et pré-coce, a donné des résultats prometteurs.L’objectif de cet article est de cerner les difficultés de la prise en charge des patients DMD, qui doit être multi-discipli-

naire, afin d’améliorer leur mode de vie.09 garçons ont été recrutés à notre ni-veau, dans le cadre de bilan d’une myo-pathie de Duchenne, confirmé par la biopsie musculaire et l’étude génétique, ses patients ont bénéficié d’un cortico-thérapie depuis 2008, avant et après ar-rêt de la marche, la mesure de la fonction motrice MFM a retrouvé un gain de 3 à 4 points, au bout de 06 mois de traitement quotidien et une nette amélioration des indices spirométriques.Conclusion: La corticothérapie est la seule médication, couramment utilisée, pour décliner la faiblesse musculaire chez les DMD, qui réduit les risques de scoliose et stabilise la fonction respira-toire.

Mots clés: dystrophie musculaire de Du-chenne, corticothérapie, biopsie muscu-laire, multidisciplinaire, MFM.La Dystrophie musculaire de Duchenne représente la forme la plus connue des dystrophinopathies, confirmée géné-tiquement, à la fin des années 1980, au niveau du chromosome Xp21.2, par clo-nage positionnel; le gène de la protéine sous-membranaire, nommée la dystro-phine, jouant un rôle-clé dans la solidité de la membrane musculaire, qui est man-quante dans la forme du Duchenne. L’histoire, naturelle, de la maladie affecte les garçons dès les premiers mois de la marche, souvent retardée et perturbée, des faiblesses musculaires des ceintures, puis en distale. Ces enfants auront be-soin d’utiliser la chaise roulante à l’âge de 09 ans et développent, au fil des années, des troubles respiratoires et des compli-cations cardiaques, qui sont fatales.L’apport de la géni-thérapie expérimen-tale, en cours et la prise en charge, multi-disciplinaire et rigoureuse, ont permis de changer le courant de l’histoire naturelle de cette maladie; de telle condition qu’on leur a permis une survie, jusqu’à la 3ème décade, avec une meilleure qualité de vie.

PATIENTS ET MÉTHODENous avons 09 patients, de sexe mascu-lin, reçus à notre consultation externe,

venant de plusieurs régions de l’Algérie (Est, Extrême sud-est, Sud-ouest algé-rien et des wilayate du Centre), sans particularité régionale évidente et sont âgés entre 06 et 15 ans (nés entre 1997 et 2006).

Evaluation de leur état, en fonction des données anamnestiques Notion de consanguinité: Absence de notion de consanguinité,

dans 07 cas; 02 enfants sont issus d’un mariage

consanguin et seulement un cas pré-sente un oncle maternel atteint de DMD;Les études ont montré que, dans 2/3 des cas, absence de cas similaire dans la famille; ce qui retarde la confirmation du diagnostic, d’une part et confirme l’augmentation de l’incidence de nou-velles mutations, d’autre part. (réf 4)

Données de développement psycho-moteur: Notion de rareté de mouvements ac-

tifs fœtaux, retrouvé dans 03/09 cas, rapportés par les parents;Notion d’hypotonie néonatale: 04 cas/09; Retard d’acquisition de la position

assise et debout: 03 cas/09; Retard d’acquisition de la marche, de

18 mois jusqu’à 24 mois,est retrouvée dans 06 cas, un cas non précisé et un cas de marche acquise à l’âge de 13 mois, selon les parents; 01 cas de bronchiolite à répétition,

dès la première année de vie et un cas de souffrance néonatale, de cause non expliquée; La notion de traumatismes, suite à des

chutes fréquentes, occasionnant un hé-matome extradural, chez l’un, à l’âge de 03 ans, et une fracture du fémur, à l’âge de 04 ans, chez un autre;

Selon la littérature, le point commun reste le retard à la marche, à 18 mois, rapporté dans plusieurs études. (Réf 2)

Par A.I. Tatai, A. Chekiri, A. Charrallah, M. Sadibelouiz*

A propos de 09 cas

Approche diagnostique et thérapeutique de la dystrophie

musculaire de Duchenne:

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 3535

Motif de la première consultation: Difficulté à la remontée des escaliers:

05 cas, dès l’âge de la marche; Difficulté à la course et chutes fré-

quentes: 07 cas; Difficulté à se relever de la position

assise: 05 cas; Age du début des troubles, remarqué

par les parents: 03 ans, dans 5 cas; plus de 05 ans, chez 04 patients;Les troubles remarqués sont précoces et ces enfants courent peu, ou pas du tout.

Données de l’examen clinique à la pre-mière consultation: L’âge de la première consultation, chez un neurologue: environ, à l’âge de 5 ans. 02 patients, originaires du Sud algé-

rien, sont venus portés par leurs parents; Un autre, consultant à l’âge de 11 ans,

après arrêt de la marche et développe-ment de rétractions, au niveau des ge-noux et des tendons d’Achille.

AGE DE LA PREMIÈRE CONSULTATION

NOMBRE DE PATIENTS

De 0 à 03 ans 00

De 03 à 04 ans 02

De 05 à 6 ans 03

De 06 à 10 ans 02

Plus de 11 ans 02

Total 09

Tableau 01: âge de la première consultation, chez un neurologue

On remarque le retard d’âge de la pre-mière consultation; spécialement pour les enfants du Sud, qui sont les moins médicalement assistés. (photo1)

DONNÉES CLINIQUESLes données cliniques sont interprétées en fonction de plusieurs paramètres: l’histoire familiale, si consanguinité existe; les éléments du développement psychomoteur (marche après 18 ans, digitigrade) et les éléments de l’activité journalière (enfant court mal, ou pas du tout; ne monte pas les escaliers; ne saute pas pieds joints et la fréquence des chutes), le testing musculaire et le score fonctionel du MFM (réf 7) permettent de classer l’état de l’enfant dans une des 03 phases de la fonction motrice: Progress (4-6), plateau (4-8), décline (plus de 08 ans). Cette classification est essentielle et décisionnelle, dans un but thérapeu-tique (Photo 2).Sur le plan clinique: l’évaluation par le testing musculaire, selon la classifica-tion internationale du Medical Research Council, de 0 à 5: des muscles de la

ceinture pelvienne et scapulaire, les cotations au premier examen clinique, étaient entre 2 et 4, surtoutau niveau des muscles de la ceinture pelvienne. 03 enfants, âgés respectivement de 06, 09 et 11 ans, étaient déjà non-autonomes à leur déplacement et présentaient un dé-ficit des muscles distaux des membres inférieurs. Généralement, l’atteinte des muscles fléchisseurs du cou, les extenseurs du poignet, les biceps et triceps, les qua-driceps, ainsi que les jambier antérieurs, sont plus atteints que les extenseurs du cou, les fléchisseurs du poignet, des del-toïdes, ischio-jambiers, et les jumeaux (réf 6);L’hypertrophie des mollets est retrou-vée, chez tous les cas; 2 cas de scoliose, par atteinte de la mus-culature axiale;02 cas de rétractions achilléennes, avec marche digitigrade et 02 cas de rétrac-tion, au niveau des genoux;Le signe de Gowers varie entre 05 à 20 secondes, de la position couchée à la position assise, puis à la position de-bout, si possible.

SIGNES CLINIQUES NOMBRE DE PATIENTS

NOMBRE DE PATIENTS

Déficit des muscles de la ceinture pelvienne

09

Déficit des muscles de la ceinture scapulaire

07

Hypertrophie des mollets

09

Rétraction achilléennes et des genoux

04

Scoliose 02

Marche dandinante 06

Signe de Gowers 06 Tableau 02: Résumant les données cliniques pour chaque patient

L’évolution clinique est sévère et pro-gressive. Le phénotype du DMD peut être variable. Les déficits musculaires atteignent, certes, les mêmes groupes musculaires, chez les enfants atteints; mais, à des degrés variables. Evaluation du quotient intellectuel: QI dans les normes, par rapport à l’âge, chez 05 enfants;03 cas de débilité légère, mais sont tou-jours scolarisés.Biologie: Tous les patients ont bénéficié, au moins, d’un dosage des taux de créa-tine kinases, qui sont très élevées (entre 10 et 25 fois la normale).Données électro-myographiques: Tous les patients ont bénéficié d’un EMG, qui montre un tracé de type myo-

gène, sans particularité électrique évi-dente. Biopsie musculaire: 08 patients ont bé-néficié d’une biopsie musculaire, d’une étude morphologique dans les 08 cas; seulement 05 cas ont bénéficié d’une immuno – histochimie.

L’examen microscopique du prélève-ment biopsique, fixé à l’iso pentane re-froidi à -160°C, retrouve une importante inégalité du diamètre des fibres muscu-laires, au contour arrondi. Les noyaux sont, le plus souvent, internalisés. Des lésions de nécrose et régénération cel-lulaires sont observées. L’endomysium et le périmysiumsont le siège d’une fi-brose marquée. L'ensemble correspond à un aspect dystrophique.

L'étude d’immunohistochimie effectuée objective l'absence totale de la dystro-phine (dys1, dys2 et dys3), avec pré-sence de quelques fibres persistantes (dys2). Présence du reste des protéines membranaires, à savoir: alpha, béta, gamma et delta sarcoglycanes, ainsi que la dysferline.

PATIENT RÉSULTAT GÉNÉTIQUE

01 Délétion 43,44, 45, 46, 47, 48, et 50

02 Délétion exon 45

03 Absence de délétion

04 Délétion 46, 47, 48, 50, 51,52

05 Délétion exon 50

06 Délétion 3, 4, 6, 8, 12, 13, 17,19

07 Délétion exon 50

08 Délétion exon 46, 47,48

09 Délétion exon 12, 13, 17, 19,43 Données génétiques: méthode Multiplex Polymé-rase Chain Reaction

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Santé-MAG N°28 - Mars 201436

Il existe une discordance entre les don-nées cliniques et le nombre de délé-tion du gène. Par exemple, le patient N 4 présente un nombre important de délétions, avec une clinique moins alar-mante. Par contre, le N 5 présente une seule délétion; or, cet enfant a perdu la marche précocement. D’où, nous laisse appuyer l’hypothèse d’absence de cor-rélation phénotype/génotype. (réf. 2) Environ 213 cas de nouvelles mutations ont été décrits, à ce jour. (réf. 6)Multiplex PCR reste insuffisante, pour le diagnostic génétique, qui ne couvre pas tout le gène; d’où, l’intérêt de compléter par les résultats de immunohistochimie, qui montrent une absence, ou un faible marquage aux anticorps Dys 1, Dys 2, Dys 3.

Exploration fonctionnelle respiratoire: faite avant l’initiation du traitement: en se basant sur les indices de la capacité vitale, VEMS et Rapport VEMS/CV.04 patients ont pu bénéficier d’une exploration fonctionnelle respiratoire, avant l’initiation du traitement: un pa-tient avait un syndrome obstructif léger, 01 présentait un syndrome restrictif, les 02 autres étaient dans les limites de la normale.L’enfant qui a un syndrome obstructif léger a, déjà, perdu la marche à l’âge de 09 ans, avant l’initiation du traitement.Exploration cardiaque: ECG et Echo-cardiographie- tous les bilans cardio-logiques étaient dans les limites de la normale.

PRISE EN CHARGEThérapeutique: les schémasLa corticothérapie est la seule médica-tion, couramment utilisée, pour décliner la faiblesse musculaire chez les DMD, qui réduit les risques de scoliose et stabilise la fonction respiratoire.Tous les patients ont initié le traitement corticoïde dès la confirmation diagnos-tique, même tardive. Certains étaient, déjà, sur chaise roulante. Pour les plus jeunes et toujours autonomes, une cor-ticothérapie quotidienne, à dose de 0,75 mg/kg/jour de prédnisone, associée aux adjuvants. Pour les plus grands, une cor-ticothérapie discontinue de 10 jours par mois (0,6 mg/kg par prise). Pour les non autonomes, dose journalière 0,3 mg/kg/j.Surveillance:Consultation tous les 02 mois, pour scorer leur MFM (réf 7); surveillance des effets secondaire du traitement; une exploration fonctionnelle respiratoire, un ECG, une échocardiographie et un den-

sitomètre osseux annuel.Résultat: Après un recul de 04 ans, 05 enfants

sont sur chaise roulante. Certes, un ré-sultat décevant, mais 3 enfants étaient, déjà, non autonomes, dès l’initiation du traitement; 02 enfants chez qui on a beaucoup hésité et donné un traitement discontinu et qui ont perdu leur auto-nomie à 11 ans; un enfant a rapidement régressé, suite à l’arrêt, volontaire, de la corticothérapie, par ses parents mal conseillés. Il n’avait que 08 ans. Les 03 autres, chez qui le traitement

a été initié précocement entre 05 et 07 ans, sont âgés, maintenant, de 12, 10, et 06 ans. Ils marchent toujours et ont obtenu un gain de 03 à 04 points de leur score Motor Function Mesure, remarqué après 06 mois de traitement, une amé-lioration de leur capacité vitale fonction-nelle à l’EFR. Les résultats densitométriques ont

été un peu décevants, avec l’apparition d’une ostéopénie chez 05 patients; ce qui nous a conduits à prescrire du cal-cium 1000 mg/jour, associé à la vitamine D, ampoule buvable 100 000 U, men-suelle.

DISCUSSION L’initiation du traitement doit être une décision personnelle du clinicien, basée sur l’état fonctionnel de son patient; de façon préférable, lors de la phase pro-gress (entre 4 et 6 ans), après avoir été immunisé contre la varicelle; Plusieurs schémas ont été publiés, de-puis cette dernière décennie. L’utilisa-tion de la prédnisone, ou le Déflazacort (non commercialisé, en Algérie) de façon journalière, à raison 0.75 mg/kg, pour la première et 0,9 mg /kg, sur une durée de 06 mois, a montré un ralentissement de la progression du déficit moteur, par rapport à de moindres doses et sur une durée discontinue (2 jours sur 7; 10 jours sur 20).Le but est de continuer le traitement, après l’arrêt de la marche, pour préser-ver une bonne force musculaire de la ceinture scapulaire, réduire la scoliose et de retarder la survenue de l’atteinte res-piratoire et cardiaque, qui sont souvent fatales. En considérant les effets secondaires (hirsutisme, acné, troubles du com-portement, gain de poids, risque de développer une cataracte…) réduire les doses, si nécessaire à 0,30 mg / kg/j, ou en shéma discontinu à forte dose, 2 jours par semaine, ou faire des fenêtres théra-peutiques de 10 à 20 jours.Les dernières études ont montré une

nette amélioration de la fraction d’éjec-tion du ventricule gauche, après 06 à 12 mois, après traitement sous IEC inhibi-teur de l’enzyme de conversion, seul ou associé aux bêtabloqueurs, des chiffres de 47% à 52%. (réf 7) Par contre, la combinaison des 02 molé-cules ne montre aucune modification des résultats; d’où, l’intérêt de les pres-crire, au patient, à partir de 10 ans. CONCLUSIONMalgré le modeste échantillon de cette étude, cela a permis de découvrir cette myopathie, qui a, longtemps, fait l’objet de nombreuses publications et de tra-vaux de recherche regroupant des cen-taines de praticiens et généticiens du monde entier, TREAT-NMD et RAND, dans l’espoir de retrouver l’issue théra-peutique de ce mal, qui tue nos enfants; et nous, en tant que cliniciens, la néces-sité de maîtriser notre clinique, pour poser le diagnostic précocement et pour une prise en charge efficace, permettant à ces enfants quelques années de plus de liberté de mouvements

Références 1) K.Bushby, J.Bourke, R.Bullok, M.Eagle, M.Gibson, J.Quinby: The Multidisciplinary mana-gement of Duchenne Muscular Dystrophy, Cur-rents Pediatrics 2005, 15, 292-300.2) Gregory A. Cox, Yoshihide Sunada, Kevin. P, Campbell et Jeffrey S. Chamberlain: Dp 71 can restore the dystrophin associated glycoproteine complex in muscle, Nature Genetics, Vol 8th, December 1994.3) Katharine Bushby, Richard Finkel, David J Birnkart, Laura E case, Paula R Clemens, Linda Cripe, Ajay Kaul et al: Diagnosis and manage-ment of Duchenne Muscular Dystrophy, part 1, Review Published on line Nov 30, 2009, D01-10-1016/S1474.4) C. Fernandez, C Halbert, A.Maves de Paula, D. Figarella-Brauger, B.Chabrol, J-f Pellissier: Dystrophies musculaires liées au gène DMD: myopathie de Duchenne, myopathie de Becker, formes féminines et atypies; EMC2010, 17-175-B-10.5) Neurology Medscape: Study co-author Dr Hugh D Allen; Reuther Health; AMJ Cardiology 2012.6) Dinesh G Nair, MD, PhD, Chief Edito Nicholas Lorenzo: Dystrophinopathies Clinical Presenta-tion, Neurology Mayo Clinic, 27 June 2012.7) Motor Function Measure Scale.

* A.I. Tatai, A. Chekiri, A. Charrallah, M. Sadibelouiz , Service de Neurologie, EHS Aït Idir,Alger.

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 3737Santé-MAGN°28 - Mars 2014 3737

DESCRIPTIONLe lupus, appelé aussi lupus érythéma-teux disséminé (LED), est un trouble inflammatoire chronique, qui peut atteindre n'importe quelle partie du corps,  y compris la peau, les articula-tions, les reins, le cœur, les poumons et le système nerveux. Parmi les maladies auto-immunes (maladies où le système immunitaire d'une personne attaque les tissus et les organes de la personne), le lupus est une des plus courantes.Le lupus est imprévisible et dure toute la vie. Il touche, habituellement, les femmes qui sont jeunes (de 18 à 40 ans), mais les personnes plus jeunes, ou plus âgées, ainsi que les hommes peuvent, aussi, en être atteintes. Le ratio est de 12  femmes, contre 1  homme, pour les personnes âgées de 15 à 40 ans. Le lupus atteint 1 homme sur 10 000, 1 femme de race blanche sur 1  000 et 1  femme de descendance africaine sur 250.Autrefois, seuls les cas les plus graves étaient diagnostiqués, et les traitements étaient très limités. En conséquence, le taux de survie était faible. De nos jours, les médecins savent reconnaître la mala-die beaucoup plus tôt, y compris les cas plus légers, et ils disposent de meilleurs traitements, pour prendre en charge cette affection. Ainsi, malgré l'absence de moyens pour guérir le lupus, le taux de survie, 10 ans après le diagnostic, se situe à près de 90 %.Néanmoins, les traitements existants comportent, tous, des risques et des effets secondaires. Les personnes, at-teintes de lupus, doivent, parfois, choi-sir entre ces risques et les effets de leur maladie. Dans certains cas, l'atteinte est modérée, et un traitement minime est requis.

CAUSESIl est, généralement, accepté que le lu-pus est causé par des altérations du sys-tème immunitaire. La fonction normale du système immunitaire est de com-battre les bactéries et les virus, consi-dérés comme des étrangers. Dans le cas du lupus, le système immunitaire ne reconnaît pas les constituants du corps de la personne et produit des anticorps, qui s'attaquent à ses tissus (des auto-anticorps). Ce phénomène est qualifié d'auto-immunité.La cause exacte du lupus reste, à ce jour,

inconnue. De multiples facteurs entrent en cause, dans l'établissement de la maladie, dont l'hérédité et certains fac-teurs environnementaux. Il est, commu-nément, admis que la lumière du soleil peut en déclencher les symptômes. Parmi les autres facteurs déclenchant, on trouve les infections virales, le stress causé par une maladie, parfois la gros-sesse et certains médicaments. Étant donné le plus grand nombre de femmes atteintes que d'hommes, il a été propo-sé que les estrogènes pouvaient y jouer un rôle.

SYMPTÔMES ET COMPLICATIONSLes symptômes du lupus peuvent res-surgir de temps à autre, puis disparaître pendant un certain temps.  La période sans symptômes est qualifiée de rémis-sion.Le lupus peut être léger, ou grave, et peut causer toute une variété de symp-tômes, y compris: une douleur articulaire, une enflure

et une rougeur, qui peuvent apparaître et disparaître. Elles affectent, couram-ment, les doigts et les poignets; des éruptions cutanées, particulière-

ment le long du nez et des joues, appe-lées « érythème en papillon »; de la fièvre; une perte de poids; une douleur à la poitrine, attribuable à

l'inflammation du cœur et des poumons (sérosite); une toux et des problèmes respira-

toires; une sensibilité aux rayons du soleil, qui

peut, parfois, se manifester en dépit de l'emploi d'un écran solaire;

une fatigue inexpliquée; le phénomène de Raynaud (les doigts

et les orteils deviennent bleus, puis blancs, quand ils sont exposés au froid; ils redeviennent rouges et chauds, au fur et à mesure que la circulation san-guine redevient normale); une perte de cheveux; des maux de tête; des pensées désordonnées, ou une

confusion; une  labilité émotionnelle  (des émo-

tions changeantes, ou incontrôlables, ou des sautes d'humeur).Les complications du lupus provoquent une inflammation, qui peut toucher d'autres parties du corps  (tels que les reins, le système nerveux central et le cœur). Si des complications se mani-festent, elles le font, habituellement, au cours des quelques premières années, qui suivent le diagnostic initial.L'inflammation rénale, causée par le lupus, n'entraîne généralement pas de symptômes, au début; par conséquent, bon nombre de personnes ne remar-queront rien, tant que le problème n'au-ra pas atteint un stade avancé. Une fois le processus en cours, d'autres signes peuvent se manifester, tels qu'un bal-lonnement, une enflure des chevilles et des analyses de sang et d'urine anor-males. Une insuffisance rénale peut finir par se développer.Le médecin exercera un suivi étroit, afin de déceler tout signe d'un début d'atteinte rénale, comme la présence de protéines dans l'urine et d'autres ano-malies.Il arrive, souvent, que le lupus accé-lère, ou aggrave le processus d'athéro-sclérose (durcissement des artères); le médecin pourrait, donc, également, sur-veiller la présence de facteurs de risque, comme l'hypertension artérielle, une augmentation du taux de cholestérol et les signes de diabète. En outre, le mé-decin pourrait vous recommander de ne pas fumer. Il est très important d'avoir un traitement contre l'athérosclérose.

DIAGNOSTICLa recherche d'anticorps antinucléaires (AAN) est l'analyse la plus importante, pour diagnostiquer le lupus, car la plu-part des personnes, atteintes du lupus, présenteront un taux élevé d'anticorps antinucléaires dans le sang. Par contre,

Lupus érythémateux disséminé (LED)

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Santé-MAG N°28 - Mars 201438

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Santé-MAG N°28 - Mars 201438

Les antipaludéens de synthèse: Traitement de fond efficace dans les formes pure-ment cutanées de la maladie, les petites poussées avec sérites, arthrite, fièvre; ils sont sans effet sur les autres localisations, en particulier rénales et cérébrales.Deux produits sont utilisés en France: L'hydroxy-chloroquine et la Chloroquine.La posologie est comprise entre 200 et 400 mg. Il existe une toxicité oculaire potentielle, avec des dépôts cornéens modérés, peu gênants, qui dis-paraissent à l'arrêt du traitement et surtout, une rétinopathie de surcharge. Avant ce traitement, il faut, donc, réaliser un exa-men de la vision des couleurs et le répéter tous les 6 mois, pendant les deux premières années. Ensuite, surveillance annuelle.

Anti-inflammatoires et antalgiques:Permettent de contrôler les phénomènes articu-laires.Corticoïdes locaux:Dans les lupus subaigus et discoïdes.

La corticothérapie:C'est la base du traitement du lupus. La posologie sera fonction de la gravité des symptômes. faibles doses: <0.5 mg/Kg

C'est la corticothérapie que l'on propose dans les poussées minimes de la maladie (sérite), mani-festation cutanée résistante aux autres traite-ments. fortes doses: de 1 mg à 2.5mg/Kg

C'est la corticothérapie réservée aux atteintes sévères rénales, ou cérébrales. A ces doses, les effets secondaires, à court terme et à long terme (risque cardio-vasculaire), sont majeurs. Les bolus cortisoniques (15 mg/Kg) sont de plus

en plus employés, pour bloquer les lésions de vas-cularite, avec un relais per os.

Les immunosuppresseurs: C'est le traitement des formes graves de LEAD. En pratique, ils ne sont utilisés que dans les formes néphrologiques graves, ou dans les formes où la corticothérapie s'avère insuffisante. Les produits utilisés sont l'azathioprine et le cy-clophosphamide. Ils nécessitent une surveillance étroite; d'autre part, le cyclophosphamide est cancérigène.

Les plasmaphérèses: Leur principe est d'éliminer de la circulation les ICC, principales causes des vascularites, en rem-plaçant le plasma du malade par un plasma, ou de l'albumine de donneur. Il faut 5 à 10 séances, sur 2 à 3 semaines. Ce trai-tement est, non seulement, lourd mais coûteux et donc, réservé aux formes graves; en particulier, rénales, neurologiques, ou myocardiques, en as-sociation avec les traitements précédents.

le diagnostic ne sera pas fondé, unique-ment, sur les résultats du test pour les AAN, parce que plusieurs personnes peuvent avoir un résultat positif sans être atteintes du lupus; en outre, le taux d'AAN peut être élevé à cause d'autres maladies auto-immunes. Dans le cas d'une personne dont le test a donné un résultat positif, mais qui ne présente aucun signe clinique, ni aucune autre anomalie aux analyses de laboratoire, la probabilité d'avoir une forme complète du lupus, au cours de la vie, est d'environ 5 %.L'analyse des antécédents médicaux et un examen physique contribueront, de façon importante, au diagnostic final. D'autres examens, tels que des épreuves de la fonction rénale, des radiographies des articulations et un examen d'image-rie par résonance magnétique (IRM), ai-deront à préciser l'étendue de l'atteinte.En outre, des examens pour le cœur et un  électroencéphalogramme  (un test qui mesure l'activité électrique du cer-veau) pourraient s'avérer nécessaires, pour déceler le  neurolupus  (lupus qui atteint le cerveau).

TRAITEMENT ET PRÉVENTIONLe traitement médicamenteux contre le lupus dépend de sa gravité. Dans certains cas, les médicaments peuvent même ne pas s'avérer nécessaires.Les médicaments couramment prescrits sont: des analgésiques, comme les anti-in-

flammatoires non stéroïdiens (AINS) certains de ces médicaments sont vendus sans ordonnance, mais consul-tez, d'abord, votre médecin, ou votre pharmacien, avant de commencer à en prendre un; l'hydroxychloroquine*, souvent em-

ployée en association avec d'autres médicaments, pour aider à maîtriser le lupus; les corticostéroïdes oraux  constituent

le principal traitement, dans la plupart des cas - ce type de médicament aide à atténuer l'inflammation et les symp-tômes associés; les immunosuppresseurs  (par ex. le

cyclophosphamide, le mycophénolate, l'azathioprine) empêchent le système immunitaire de s'attaquer aux organes et aux tissus du corps, et ils sont em-ployés quand le rein, le cerveau, ou un autre organe vital est touché.Bien que tous ces médicaments s'avèrent utiles et sauvent, parfois, la vie de la per-sonne, ils peuvent, cependant, avoir des effets secondaires très graves. Discutez,

sérieusement, avec votre médecin des bienfaits et des risques du traitement. Vous souhaiterez, peut-être, également, discuter de vos médicaments avec un professionnel de la santé, qui en connaît bien l'usage; par exemple, un rhumato-logue  (médecin spécialisé dans le dia-gnostic et le traitement de l'arthrite et d'autres maladies, qui touchent les arti-culations, les muscles et les os).

Les conseils ci-dessous pourraient aider les personnes atteintes de lupus:

Consultez un rhumatologue. Les rhu-matologues sont les médecins qui ont le plus d'expérience et de connaissances en matière de diagnostic et de prise en charge du lupus sous toutes ses formes. La grossesse déclenche, parfois, le lupus

ou peut l'aggraver s'il est, déjà, présent; par contre, il se peut que la grossesse n'ait aucun effet particulier sur le lupus. Si vous êtes atteinte de lupus et que vous planifiez une grossesse, ou si le lupus se manifeste, pour la première fois, pendant votre grossesse, vous devriez être suivie à la fois par un obstétricien - ou un gy-nécologue - expérimenté dans les gros-sesses à risque et par un rhumatologue. Accordez-vous beaucoup de temps,

pour le repos et la détente. Faites l'apprentissage de méthodes de

gestion du stress. Consultez, régulièrement, le médecin

et le dentiste. Participez, régulièrement, à des

séances d'exercice d'intensité modérée. Adoptez et maintenez un régime ali-

mentaire équilibré et bon pour la santé. Ne fumez pas. Assurez-vous que votre taux de vita-

mine  D atteint, largement, le taux re-commandé. Ne prenez aucun médicament en vente

libre sans, d'abord, demander conseil à un professionnel de la santé. Si vous prenez un corticostéroïde, ou

un autre immunosuppresseur, signalez tout signe d'infection à votre médecin. Évitez toute exposition, excessive, aux

rayons ultraviolets du soleil; portez un chapeau, des lunettes de soleil et des vêtements à manches longues, en plus d'utiliser un écran solaire, qui offre un facteur de protection solaire (FPS) d'au moins 15 et qui protège contre les rayons ultraviolets, tant A que B (UVA et UVB). Envisagez de vous joindre à un groupe

de soutien, qui vous aidera à vous adap-ter à divers aspects de la maladie. Informez-vous, le plus possible, au su-

jet du lupus

__

____________________________* Tous les médicaments ont à la fois une dénomi-nation commune (le nom générique) et un nom de marque ou marque. La marque est l'appellation qu'un fabricant choisit pour son produit (par ex. Tylenol®). Le nom générique est le nom du médi-cament en médecine (par ex. l'acétaminophène). Un médicament peut porter plusieurs noms de marque, mais il ne possède qu'un seul nom géné-rique. Cet article répertorie les médicaments par leur nom générique. Pour de plus amples rensei-gnements sur les noms de marque, consultez votre médecin ou un pharmacien.

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 3939

Dr N. Ameziane - Pr Louafi Djellali *

L’apparition de métastases osseuses constitue un évènement majeur et fré-quent dans l’évolution de plusieurs types de cancers. Le pourcentage des patientes avec un cancer du sein avancé et présen-tant des métastases osseuses est estimé entre 65-80% [1]. De toutes les tumeurs solides, le cancer du sein métastatique est celui qui présente le taux le plus élevé de complications osseuses.

L’objectif du traitement des métastases osseuses se résume en trois points essen-tiels pour le patient : le soulager en luttant contre la douleur, améliorer sa qualité de vie et prolonger la survie. Les patientes qui n’ont que des métas-tases osseuses ont davantage de com-plications que les patientes présentant des métastases viscérales associées [4]. La survie médiane des patientes ne pré-sentant que des métastases osseuses est d’environ deux ans mais elle n’est que de six mois en présence de métastases hépa-tiques [2,4]. Une étude de cohorte incluant près de 36 000 nouveaux cas de cancer du sein suivis jusqu’à neuf ans a montré que la survie médiane des patientes ayant des métastases osseuses était de 16 mois, cette médiane de survie passe à seule-ment sept mois en cas de survenue d’une complication osseuse [3,4].Les métastases osseuses peuvent engen-drer des douleurs sévères et invalidantes parfois rebelles aux traitements antal-giques faisant appel à la chirurgie et la

radiothérapie.

PLUSIEURS TYPES DE MÉTASTASES OS-SEUSESCes métastases osseuses sont très sou-vent ostéolytiques, c'est-à-dire du fait d’une destruction osseuse importante, et parfois ostéo-condensantes, et ce du fait d’un excès de formation osseuse, on peut également retrouver une association des deux, dites métastases osseuses mixtes.Cela s’explique par le fait que les cellules tumorales sécrètent différents facteurs qui perturbent le remodelage osseux. En effet, elle est un réservoir de facteurs de croissance et de calcium qui, une fois libérés de la matrice en cours de dégrada-tion, exercent une action mitogène sur les cellules tumorales [5]. Il existe donc au site de la métastase osseuse un cercle vicieux où les phénomènes de résorption/forma-tion osseuse et de prolifération tumorale s’entretiennent mutuellement. Les méca-nismes qui précèdent la survenue de ces métastases osseuses font non seulement intervenir des processus communs à toute

dissémination métastatique mais égale-ment des processus qui sont plus spéci-fiques au tissu osseux, à savoir l’invasion des cellules tumorales dans l’environne-ment osseux, nidation des cellules tumo-rales dans la moelle osseuse et ostéomi-métisme [5].

Traitements médicaux des métastases osseuses :Il existe une large gamme de médicaments antalgiques et que l’on regroupe en trois paliers, allant des antalgiques simples (1er palier) indiqués dans le traitement des douleurs légères aux antalgiques type opioïdes mineurs (2ème palier) pour les douleurs modérées et l’usage d’opioïdes majeures (3ème palier) pour les douleurs intenses et ne cédant pas aux antalgiques des deux premiers paliers. En sachant que l’on a souvent recours à des associations médicamenteuses. Les douleurs dues aux métastases osseuses sont souvent soula-gées par les anti-inflammatoires non sté-roïdiens. Devant des douleurs intenses, on peut traiter un patient par des opioïdes sans passer par les deux premiers paliers afin de soulager au plus vite le patient de sa souffrance.En plus de ces traitements antalgiques, le traitement des métastases osseuses passe par l’usage de biphosphonates et qui ont pour fonction d’agir directement au niveau de l’os. Ce qui va permettre de traiter la métastase osseuse donnant à la fois un ef-fet antalgique et réduit les complications secondaires à ces lésions osseuses. Les biphosphonates font partie de l’arse-nal thérapeutique dans la prise en charge thérapeutique des cancers.

BIPHOSPHONATESLes biphosphonates sont utilisés depuis une dizaine d’années, et leur prescription ne cesse d’augmenter.Ils sont prescrits dans des cas relativement bénins tels que la prévention de l’ostéopo-rose de la femme ménopausée, maladie de Paget, algodystrophie, mais aussi dans des cas plus sévères pour traiter des pa-tients atteints de cancer avec métastases osseuses.L’incidence des évènements osseux a nettement diminué aujourd’hui grâce à

Les Biphosphonates et leur application, dans le cancer du sein métastatique

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Santé-MAG N°28 - Mars 201440

l’usage précoce et prolongé des bisphos-phonates ainsi que le développement et l’amélioration de l’efficacité des traite-ments anti-cancéreux [4].L’efficacité des biphosphonates dans le traitement des métastases osseuses est basée sur l’incidence et le délai d’apparition des évènements osseux (EVO) et le taux de morbidité d’origine osseuse. L’événement osseux se définit comme étant la survenue d’une fracture pathologique, compression médullaire, d’une hypercalcémie maligne et la nécessité de recourir à une radiothé-rapie ou une chirurgie (cimentoplastie) [7]. Ce sont de petites molécules inorganiques dérivés de l’acide phosphorique qui se lient à une substance appelée hydroxyapatite sur la surface des os endommagés entrai-nant une puissante inhibition de la résorp-tion osseuse. Ils sont absorbés par les os-téoclastes, perturbent leur fonctionnement et induisent leur apoptose (mort cellulaire) [8]. Ils évitent donc la destruction osseuse due aux ostéoclastes. Les biphosphonates trouvent leur indication dans le traitement de l’hypercalcémie maligne, métastases osseuses associées ou non à une hypercal-cémie, en complément du traitement spé-cifique de la tumeur primitive, mais aussi dans le cadre de la prévention et le traite-ment de l’ostéoporose.Certains biphosphonates s’administrent par voie orale tels que l’Etidronate, Clordro-nate, Alendronate, Ibandronate, et d’autres s’administrent par voie intraveineuse (IV) tels que le Pamidronate, Ibandronate et l’acide Zoledronique. Un avis d’expert sur l’utilisation des biphos-phonates dans le traitement des tumeurs solides (Annals of Oncology, Mars 2008) recommande l’utilisation de la voie intra-veineuse par rapport à la voie orale du fait de ses inconvénients, à savoir, leurs effets indésirables digestifs et le risque d’une mauvaise observance. La durée du traite-ment recommandée par voie IV est généra-lement de 2 ans, cette durée pouvant être prolongée à 3 ans selon l’appréciation du praticien.

Denosumab  : Inhibition du RANK Ligand dans le traitement des métastases os-seuses :L’ostéolyse tumorale est due à une stimula-tion considérable de la résorption osseuse médiée par les ostéoclastes sous l’effet de produits de sécrétion des cellules tumo-rales. Les cellules tumorales augmentent l’expression et la sécrétion du RANKL par les cellules de la lignée ostéoblastique et les ostéocytes. Le RANKL augmente la formation, l’activité et la survie des ostéo-clastes, tandis que les produits de résorp-tion de la trame osseuse vont stimuler la croissance des cellules tumorales et leur sécrétion de facteurs ostéolytiques, engen-

drant un « cercle vicieux » impliquant les cellules tumorales, les cellules osseuses et la trame osseuse [9]. Le dénosumab est un anticorps monoclo-nal humain anti-RANKL. En neutralisant le RANKL, le dénosumab interrompt le «cercle vicieux» de l’ostéolyse tumorale.Le dénosumab inhibe tant la formation que l’activité des ostéoclastes, ce qui aboutie à une inhibition de la résorption osseuse plus marquée que celle induite par les bisphosphonates. De plus, en tant qu’anti-corps circulant, le dénosumab diffuse dans l’ensemble du tissu osseux, contrairement aux bisphosphonates dont l’affinité pour l’hydroxyapatite limite la pénétration intra-osseuse. Par contre, contrairement aux bisphosphonates, le dénosumab n’est pas incorporé dans la matrice osseuse, par conséquent son action inhibitrice sur la résorption osseuse est plus transitoire [4,9].

BIPHOSPHONATES ET CANCER DU SEIN Les biphosphonates ont prouvé leur effi-cacité dans la prise en charge thérapeu-tique des métastases osseuses de cancer du sein. Un essai rando-misé en double aveugle de phase III conduit chez 173 patientes pré-sentant des métastases osseuses d’un cancer du sein, comparant clodronate au placebo (Paterson JCO 1993) a démontré l’intérêt du clodronate et ce en

réduisant le nombre d’épi-sodes d’hypercalcémie (28 vs 52, p<0.01), d’incidence de fractures vertébrales (84 vs 124% patientes/années, p<0.025) et une réduction en nombre total d’évènement squelettique morbide (216.6 vs 304.8, p<0.001).Une méta-analyse regrou-pant neuf études randomi-sées chez 2 806 patientes ayant un cancer du sein avec métastases osseuses, com-parant ces bisphosphonates oraux ou intraveineux (clo-dronate, ibandronate, pami-dronate, acide zolédronique) versus placebo ou l’absence de bisphosphonates vient d’être récemment publiée en 2012 [10]. Par rapport à un placebo ou à l’absence de bisphosphonate, les bisphos-phonates diminuent le risque d’événements osseux, que ce soit avec le clodronate per os (RR = 0,85; IC 95 %= 0,73-

0,99; p = 0,04), l’ibandronate intraveineux (RR = 0,80; IC 95 %= 0,67-0,96; p= 0,01), le pamidronate intraveineux (RR = 0,77; IC 95 %= 0,69-0,87; p<0,001) ou l’acide zolé-dronique intraveineux (RR = 0,59; IC 95 %= 0,42-0,82; p= 0,001). L’acide zolédronique diminue le taux d’évé-nements osseux de 20 % par rapport au pamidronate (RR = 0,80; p = 0,04) et de 30 % dans le sous-groupe de patientes avec lésions ostéolytiques [8,11]. Les bisphospho-nates retardent le délai d’apparition des événements squelettiques et pour cer-tains diminuent les douleurs osseuses et améliorent la qualité de vie, mais ne modi-fient pas la survie.Les effets des biphosphonates sur la dou-leur ont également été étudiés, nous cite-rons deux études, la première publiée par Body JJ et al. (Br J Cancer 2004;90:1133-37) a démontré que le soulagement de la douleur était significatif chez les patients traités par Ibandronate IV par rapport au

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 4141

bras placébo, de même que pour la se-conde étude publiée par Kohno N, et al. (J Clin Oncol. 2005;23:3314-3321), qui retrouve également un bénéfice significatif chez des patients traités par l’Acide Zolédronique IV par rapport aux patients du bras placébo. Les essais contrôlés de phase III démontrent que le dénosumab a une efficacité supé-rieure à celle de l’acide Zolédronique no-tamment dans le cancer du sein avec mé-tastases osseuses, même si la survie n’est pas améliorée et si le rapport coût/efficacité doit être étudié davantage [12].

Une étude comparative randomisée de phase III, en double insu, ayant inclus 2 046 patientes présentant un cancer du sein métastatique au niveau squelettique, dont un bras a été traité par le dénosumab (120 mg sous-cutané toutes les 4 semaines) et le deuxième bras traité par l’acide zolé-dronique (4 mg en perfusion toutes les 4 semaines avec adaptation de la dose selon la fonction rénale). Le critère principal d’efficacité étant le délai de survenue de la première complication osseuse était pro-longé de 18% dans le groupe dénosumab par rapport au groupe zolédronate (RR = 0,82; p<0,001 par un test de non-infériorité et p = 0,01 par un test de supériorité). Le délai médian pour que survienne le premier évènement osseux était de 26,4 mois dans le groupe zolédronate et n’était pas atteint dans le groupe dénosumab. Une "analyse en événements multiples" montra que la mor-bidité osseuse globale était diminuée de 23 % dans le groupe dénosumab (p= 0,001). La survie globale était toutefois similaire entre les deux groupes de patientes [4,13]. Une aggravation cliniquement significative des douleurs osseuses était retardée chez les patientes traitées par le dénosumab par rapport au groupe zolédronate (9,7 mois versus 5,8 mois; p = 0,002) [12] avec une amélioration de la qualité de vie, indépen-damment de l’amélioration des douleurs osseuses [4,14].Effets secondaires des biphosphonates :

Généralement bien tolérés, les bisphospho-nates et le dénosumab sont occasionnel-lement associés à des effets secondaires, parfois graves. L’hypocalcémie induite par ces inhibiteurs puissants de la résorption osseuse est le plus souvent discrète et asymptomatique. Les cas d’hypocalcémie sévère sont rares en rapport généralement avec un déficit pro-fond en vitamine D. Dans les essais compa-ratifs cités ci-dessus, l’hypocalcémie a été plus souvent rapportée chez les patients traités par dénosumab que par l’acide zolé-dronique (9,6 % versus 5,0 %), reflétant une inhibition plus marquée de la résorption osseuse [4]. Il est important d’administrer des suppléments de calcium et de vitamine

D à tous les patients recevant un traitement prolongé par l’acide zolédronique et déno-sumab pour réduire le taux et le degré des hypocalcémies.Il est actuellement recommandé de mesurer régulièrement la calcémie chez les patients traités par dénosumab et l’acide zolédro-nique. Ce dernier étant potentiellement néphrotoxique nécessitant un contrôle de la fonction rénale avant chaque perfusion, la surveillance de la fonction rénale n’est pas nécessaire avec le dénosumab, dont la pharmacocinétique ne dépend pas de la fonction rénale.L’ostéonécrose de la mâchoire (ONM) est l’effet secondaire le plus redoutable d’un traitement prolongé par zolédronate ou dénosumab. La présentation clinique de l’ONM est très variable, allant d’une exposition osseuse asymptomatique à la formation de sé-questres osseux, surinfections difficilement traitables ou fistules chroniques. Selon les séries, la prévalence de l’ONM chez les pa-tients cancéreux varie entre 1% et 10% lors d’un traitement prolongé par bisphospho-nates, le risque étant plus élevé chez les patients ayant à la base un état bucco-den-taire défectueux.Elle survient typiquement après une extrac-tion dentaire mais elle peut aussi survenir sans traumatisme évident. L’inhibition pro-longée du remodelage osseux joue un rôle clé dans la pathogenèse de l’ONM, causant une absence de réparation des microfrac-tures physiologiques induites par le stress répété des forces masticatoires. Dans les études comparatives entre le zolé-dronate et le dénosumab, davantage de cas furent rapportés chez les patients traités par dénosumab, mais l’analyse intégrée des trois essais comparatifs incluant au total 5 372 patients ne montre pas de différence statistiquement significative entre les deux groupes thérapeutiques (1,8 % versus 1,3 %; p = 0,13) [4,15].Un examen dentaire complet suivi d’un trai-tement approprié doit être effectué avant d’entamer un traitement par bisphospho-nates ou dénosumab afin d’éviter autant que possible les procédures invasives en cours de traitement.

RECOMMANDATIONS PRATIQUES :Il est actuellement recommandé de débuter les bisphosphonates ou le dénosumab dès le diagnostic de métastase osseuse dans le cancer du sein au stade avancé afin de re-tarder la survenue de la première complica-tion osseuse et par conséquent de réduire la morbidité osseuse globale. La supériorité du dénosumab a été démon-trée dans le cancer du sein métastatique au niveau osseux par rapport à l’acide zolédro-nique dans différentes études conduites de façon rigoureuse et avec des critères d’effi-

cacité définis au préalable. L’arrêt temporaire de l’acide Zolédronique ou une réduction de la fréquence d’admi-nistration est recommandé par plusieurs experts chez les patients dont la maladie osseuse est bien contrôlée, mais ces re-commandations ont des bases essentielle-ment empiriques [4, 16].La pharmacocinétique du dénosumab n’est pas en faveur d’un arrêt temporaire du trai-tement. Le maintien de l’efficacité clinique du dénosumab requiert actuellement un traitement continu, des études à long terme sont en cours et elles devraient donner davantage d’informations sur le rapport bénéfices/risques d’une administration très prolongée

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* Dr N. Ameziane - Pr Louafi Djellali,Service d’oncologie médicale-CHU Oran.

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Santé-MAG N°28 - Mars 201442

Document co-rédigé par le Docteur Bouras Rym, psychiatre à l'EHS en psychiatrie DRID Hocine et le Docteur Benyakhlef Nouria, professeur en psychiatrie, chef d'unité à l'EHS DRID Hocine

INTRODUCTION L’anorexie mentale a, longtemps, été considérée comme une pathologie spé-cifiquement occidentale. En fait, elle ne l’est pas; elle est, même, de plus en plus fréquente, en Algérie.

L’approche de l’été et de sa «mode du régime estival» est le moment idéal, pour sensibiliser le public, les lectrices en particulier, à cette pathologie, qui apparaît, souvent, au décours d’un ré-gime.Mais, avant tout, définissons ce dont on parle et faisons la part des choses entre deux concepts, que les gens confondent, fréquemment; l’anorexie et l’anorexie mentale. La première est un symptôme qui consiste en une perte de l’appétit, qu’il convient d’intégrer dans un cadre noso-graphique; alors que l’anorexie mentale est une pathologie, qui consiste en une conduite de restriction active de l’ali-mentation, touchant, principalement, les jeunes femmes, entre 12 et 20 ans. Pour poser le diagnostic d’anorexie mentale, une triade de symptômes est nécessaire:

L’anorexie: la spécificité de cette ano-rexie est qu’elle ne consiste pas en une perte de l’appétit, mais d’une lutte contre la faim. La jeune femme s’oblige à ne pas manger, ou bien à manger de toutes petites quantités de nourriture, triée et choisie, pour sa valeur calorique très faible. Il est à préciser qu’au bout de plusieurs mois d’évolution, l’anorexique ne ressent plus la faim; elle va essayer de leurrer sa famille et son entourage par des réponses évasives, telles que «je n’ai pas faim» ou «j’ai mangé avant de rentrer» ou «j’ai trop mangé à midi»…donnant, ainsi, une impression de nor-malité.

L’amaigrissement: conséquence lo-gique de cette restriction alimentaire drastique, le poids est inférieur de 15% au poids normal, ou IMC (indice masse corporel) ≤ 17,5. L’aspect de la jeune

femme est cachectique et vieillot, Yeux excavés, os saillant, peau sèche et ru-gueuse, effacement des formes fémi-nines, joues creuses, cheveux ternes et secs, ongles striés et cassants. Malgré cela, l’anorexique banalise ses troubles, ne se voit ni malade, ni maigre, mais grosse. Pour maintenir ce poids, voire même pour continuer à en perdre, l’ano-rexique va avoir recours à des «straté-gies», comme des vomissements provo-qués, quasi systématiques après chaque repas, fut-il frugal, ou après une crise de boulimie (ingurgitation massive et rapide d’aliments, sans distinction dans les saveurs); mais, aussi, le recours aux laxatifs…

L’aménorrhée: c’est-à-dire interruption du cycle menstruel pendant, au moins, trois mois.Cette pathologie, qui touche, souvent, des jeunes femmes intelligentes et sen-sibles, est le reflet d’une souffrance psy-chique, qui peut avoir de graves consé-quences psychiques et somatiques,

allant jusqu’à mettre le pronostic vital en jeu. En effet, la mortalité par dénu-trition peut atteindre 10%, nécessitant, alors, leur hospitalisation en service de réanimation; puis, en second lieu, en service de psychiatrie. Malheureuse-ment, ce n’est pas toujours le cas. En effet, en raison du déni de l’ano-rexique de ses troubles et du sentiment d’impuissance de la famille, face à ces symptômes, souvent, une errance dia-gnostic s’ensuit, impliquant le gastro-entérologue, l’interniste, ou encore, l’endocrinologue, retardant, d’autant plus, la prise en charge et augmentant, par la même, les risques encourus par l’anorexique.

CONCLUSION:C’est pour cela qu’une prise en charge précoce et adaptée, auprès d’un spé-cialiste de la santé mentale, tel un psy-chiatre, est indispensable, entre autres pour guider ces jeunes femmes, en souffrance, vers l’acceptation de soi et la verbalisation de leurs émotions

Trouble du comportement alimentaire:

l’anorexie mentale

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Santé-MAGN°28 - Mars 2014 4343

RÉSUMÉLa carence en fer (CF) sans anémie reste, souvent, non diagnostiquée, car les symptômes sont attribués à l’ané-mie ferriprive. La ferritine en est le mar-queur le plus spécifique: une valeur < 10 μg/l représente des réserves épuisées, 10-30 μg/l peuvent confirmer une CF, 30-50 μg/l peuvent indiquer une CF fonctionnelle. Si les valeurs de CRP et d’ALAT sont élevées, il faut interpréter une valeur de ferritine élevée/normale avec précaution. Si un traitement oral n’apporte pas le succès escompté, ou n’est pas toléré, un traitement intravei-neux est justifié. Avec une ferritine < 10 μg/l, l’administration d’une dose cumu-lative totale de 1000 mg de fer doit être envisagée, avec une ferritine de 10-30 μg/l, une dose cumulative totale de 500 mg de fer, et avec une ferritine de 30-50 mg/l, on peut administrer une première dose de 200 mg de fer. La ferritine doit être contrôlée après trois mois; au plus tôt, deux semaines après le dernier trai-tement oral, ou huit à douze semaines après la dernière injection intraveineuse.

INTRODUCTIONLa carence en fer (CF) sans anémie semble être une condition très cou-rante, qui reste, souvent, non diagnosti-quée. Les symptômes comme la fatigue, les malaises, la faiblesse, ou la baisse de concentration sont, généralement, attribués à l’anémie ferriprive. Il existe, aujourd’hui, des preuves cliniques, se-lon lesquelles ces symptômes peuvent, également, provenir d’une CF sans ané-mie.1-4En 2004, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a identifié la CF sans anémie comme un problème de santé lié à la nutrition, qui est rencontré, cou-ramment, dans le monde.5 Si elle n’est pas traitée, elle peut affecter la santé humaine. Même en Europe, la CF a été identifiée comme l’un des principaux troubles nutritionnels.6 Pourtant, il n’existe, à ce jour, aucun critère permet-tant de diagnostiquer et de traiter la CF sans anémie.C’est pourquoi, un groupe de travail suisse a été créé et a été chargé de défi-nir des critères cliniques de la CF sans

anémie, en se basant sur des données existantes. Dès que de nouvelles don-nées cliniques seront disponibles, des mises à jour seront publiées.

PATHOPHYSIOLOGIE DE LA CARENCE EN FERRôle du ferLe rôle occupé par le fer dans l’hémo-globine, pour le transport de l’oxygène est bien connu. Cependant, le fer est, également, impliqué dans de nom-breuses autres fonctions «non hémato-logiques»: ainsi, il joue un rôle, impor-tant, dans l’utilisation de l’oxygène par les enzymes de la chaîne respiratoire dans les mitochondries et donc, dans la production d’énergie.4 Le fer est, aussi, l’atome central des enzymes régulateurs de la production de neurotransmetteurs et de la transcription de certains ARN messagers.7, 8 La CF peut, donc, influen-cer le métabolisme des tissus en divi-sion, compromettre les fonctions cogni-tives, ainsi que la croissance des enfants et des adolescents.Le corps humain contient, environ, 2,5-4 g de fer, pour l’essentiel lié à l’hémoglo-bine et à la myoglobine (~ 2,4 g), mais aussi stocké dans le foie (~ 1 g) et les macrophages du système réticulo-en-dothélial (~ 0,6 g).9 Le fer est métabolisé au rythme d’environ 1 mg, par jour. L’ab-sorption est active dans le duodénum et la partie supérieure du jéjunum. Les femmes non ménopausées connaissent une perte de fer supplémentaire, lors de la menstruation (en moyenne, environ 1-2 mg/jour).9 Il peut, également, y avoir perte de fer par le tractus gastro-intesti-nal secondairement à une maladie ou à la prise de médicaments.

Prévalence de la carence en fer sans anémieLa CF sans anémie est endémique, même parmi la population des pays développés, tels que la Suisse et est plus courante que la CF avec anémie.10 Toutefois, il semble que les statistiques, sur la prévalence de la CF sans anémie, varient en fonction des régions.6 Ces variations sont, probablement, secon-daires à une divergence des définitions de la CF et/ou des valeurs normales

appliquées dans les laboratoires.Aux Etats-Unis par exemple, on a dé-couvert que la CF sans anémie touchait quelque 11-13% des femmes non méno-pausées.2 Une étude française a mis en évidence qu’environ 20% des femmes, en âge de procréer, présentaient une CF sans anémie (ferritine < 15 μg/l), alors que 4%, seulement, étaient concernées par une CF avec anémie.11En Europe, la prévalence de la CF sans anémie a été étudiée par Hercberg, en 2001 et les résultats ont varié de 4-33%, les populations étudiées, dans certains cas, étant petites.6En Suisse, les chiffres sur la prévalence de la CF sans anémie proviennent d’une étude menée sur, environ, 8000 des 11 322 soldats de l’école de recrue, du pre-mier semestre 2004. Dans cette popula-tion, à prédominance masculine, 7% des recrues ont présenté une CF sans ané-mie, basée sur une ferritine < 30 μg/l. Par comparaison, 0,1% seulement pré-sentait une CF associée à une anémie.10

Preuves, signes et symptômes cli-niques de la carence en fer sans anémieDes études cliniques contrôlées ont mis en évidence un lien, possible, entre la CF sans anémie et la fatigue, 1une fonc-tion cognitive diminuée3, 12 et les capa-cités physiques.2 Récemment, il a été suggéré que la CF sans anémie jouait un rôle dans le syndrome des jambes sans repos.13 Des observations multiples portent sur le rôle que semble jouer la CF sans anémie sur l’alopécie et la fra-gilité des cheveux (cheveux cassants), la labilité émotionnelle et l’aggrava-tion des dépressions, surtout chez les patientes postpartum.14-16 Une relation avec la perlèche et la koïlonychie est anecdotique et associe, souvent, ces affections à l’anémie.

FatigueDans le cadre d’une étude, Verdon et coll. ont administré du fer sous forme de sulfate ferreux (80 mg de fer élé-mentaire/jour; n=75), ou un placebo (n=69), par voie orale, à 144 femmes non anémiques, présentant une fatigue non expliquée.1 Une majorité (85%) pré-sentait une ferritine ≤ 50 μg/l, et 51%

Diagnostic et traitement de la carence en fer sans anémie

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présentaient, même, une ferritine ≤ 20 μg/l au début du traitement. La fatigue a été évaluée sur une échelle analogique de dix points. Après un mois de traite-ment, environ 29% des femmes, qui recevaient une préparation orale de fer, ont relevé une diminution sensible de la fatigue, contre 13% dans le groupe pla-cebo. Une analyse des sous-groupes a montré que seules les patientes, ayant démarré le traitement avec une ferritine faible (≤ 50 μg/l), ont vu leur état de santé s’améliorer, suite au traitement. A la fin du traitement, la ferritine était, nettement, plus élevée dans le groupe ayant reçu un traitement oral, que dans le groupe de contrôle.

Fonction cognitive diminuéeBruner et coll. ont étudié une population urbaine d’adolescentes aux Etats-Unis (CF sans anémie définie par une ferri-tine ≤ 12 μg/l).3 L’administration orale de fer a eu une influence, significative, sur l’apprentissage oral et la mémoire, mais aussi, sur la ferritine moyenne (27,3 contre 12,1 μg/l dans le groupe placebo). Murray-Kolb a étudié une population similaire, qui présentait des CF sans anémie et des CF avec anémie.12 Le traitement de fer a, considérablement, augmenté la ferritine et amélioré les fonctions cognitives, dans la population féminine étudiée. Les effets de la CF sur la cognition ne semblent, donc, pas être limités au cerveau en croissance.

Adaptation aérobieUne étude randomisée, en double aveugle et contrôlée par placebo, me-née sur 41 femmes, a suggéré que la CF sans anémie modifiait l’adaptation aéro-bie, ainsi que l’adaptation à l’effort. Ces deux facteurs, qui influencent la capa-cité physique, étaient améliorés par un apport complémentaire de fer, par voie orale.2, 17

Syndrome des jambes sans reposLe rôle, possible, de la CF dans le syn-drome des jambes sans repos a été analysé.13 Le syndrome peut être dû à d’autres causes, mais une corrélation avec une ferritine basse a été évoquée.18 Un traitement de ce syndrome, par du fer, est toujours à l’étude.

AlopécieDeux études récentes ont suggéré qu’une ferritine basse pouvait consti-tuer un facteur de risque, pour la chute des cheveux, chez les femmes non ménopausées.14, 19 Une autre étude, ré-

cente, menée sur des femmes en bonne santé, par ailleurs, n’a pourtant mon-tré aucune corrélation entre la ferritine et la chute des cheveux. Les groupes avec une ferritine de 10-30 μg/l et > 30 μg/l ont montré une chute des cheveux identique.20 D’autres études sont néces-saires, pour confirmer une relation entre l’alopécie et la CF.

DIAGNOSTICLe diagnostic d’une CF sans anémie repose sur deux points: la relation tem-porelle des symptômes associés à la maladie (fatigue, fonction cognitive et capacité physique diminuées) et les analyses biologiques. Il faut, par ailleurs, écarter les autres causes possibles de ces symptômes, pour la plupart non spécifiques.Le critère de référence, pour une esti-mation de la quantité de fer, est la colo-ration de la moelle osseuse. L’aspiration, ou la biopsie, de moelle osseuse est une procédure médicale assez lourde et dou-loureuse, réservée à des cas spécifiques et cette procédure n’est disponible que dans certains centres spécialisés.L’analyse sanguine initiale devrait in-clure un hémogramme complet, la fer-ritine, la CRP et l’ALAT.5 La ferritine est le marqueur le plus spécifique d’une diminution des stocks de fer et permet d’évaluer l’efficacité du traitement.21 Des valeurs de CRP et d’ALAT normales in-diquent que la ferritine mesurée reflète l’état des réserves en fer. Des valeurs élevées indiquent que la concentration de ferritine peut avoir été influencée par une inflammation, une infection, ou une maladie hépatocellulaire concomitante. Dans ce cas, il faut interpréter avec pré-caution une valeur de ferritine élevée, ou normale, chez un patient symptoma-tique.22

Pour l’instant, aucune valeur limite, per-mettant de diagnostiquer une CF, n’a été définie. Le débat, actuel, porte sur la valeur de ferritine optimale, qui peut, par ailleurs, varier d’un patient à l’autre. Une ferritine < 10 μg/l représente des réserves totalement épuisées. Une ferri-tine < 30 μg/l peut confirmer une CF.10 Une ferritine entre 30-50 μg/l peut indi-quer une CF fonctionnelle.1Un MCHC (concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine), et un MCV (volume globulaire moyen) réduits (taux normaux 330-360 g/l et 80-100 fL) sont les marqueurs, respectifs, de l’hypochromie et de la microcytose et signalent une érythropoïèse com-promise, due à une CF. Leurs valeurs

s’obtiennent, généralement, par l’inter-médiaire d’un hémogramme complet. Les érythrocytes hypochromes (> 2%) et réticulocytes hypochromes (MCHC< 30 pg) ont montré qu’ils étaient des marqueurs sensibles de la CF, mais ne peuvent être mis en évidence que par certaines cellules de Malassez automatisées.Récemment, une analyse des récepteurs solubles à la transferrine a fait l’objet de discussions, afin de déterminer si leur valeur sanguine pouvait confirmer le diagnostic de CF sans anémie, chez les patients présentant une inflammation.22 L’utilisation des récepteurs solubles à la transferrine, dans cette population de patients, requiert confirmation et, pour l’instant, aucune valeur de référence ne fait l’objet d’un consensus. Si le patient présente une fatigue, ou une diminution de sa capacité physique et qu’une CF est soupçonnée, ou sug-gérée par des résultats biologiques, le médecin est, d’abord, tenu de recher-cher, soigneusement, une autre cause à la fatigue; somatique ou psychosociale, par exemple. Avant de commencer le traitement, il est indispensable de rechercher et, dans la mesure du possible, de traiter les causes possibles de la CF telles qu’une hémorragie gastro-intestinale (secon-daire à une tumeur maligne, à des mé-dicaments, ou à des hémorroïdes, par exemple), une maladie cœliaque, ou d’autres syndromes de malabsorption (achlorhydrie gastrique, gastrite auto-immune, infections à H. pylori), des menstruations plus fortes, ou des dons du sang. Quant au style de vie du pa-tient, un régime végétarien est, en soi, rarement suffisant, pour expliquer une CF sans anémie. Néanmoins, chez les personnes ayant un besoin en fer accru (comme les enfants, les adolescents, les femmes non ménopausées, ou les spor-tifs actifs), un régime végétarien peut favoriser le développement d’une CF.

TRAITEMENTL’augmentation du taux de ferritine, par un complément de fer, a permis d’amé-liorer les symptômes liés à la CF, dans diverses populations de patients. Le traitement martial ne doit intervenir que lorsque le diagnostic est confirmé et que toutes les causes potentielles sont investiguées et traitées. On dispose, actuellement, de préparations de fer, pour administration orale ou intravei-neuse; elles diffèrent dans leur compo-sition et leurs propriétés. Les deux types

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d’administration – intraveineuse et orale – ont conduit à des taux d’hémoglobine comparables, chez les patients ané-miques.

Traitement par voie oraleL’administration de fer, par voie orale, est la thérapie de base, pour traiter les symptômes de CF et obtenir une aug-mentation de la ferritine. Le traitement est économique et peut être efficace, s’il est bien observé sur une période suffisamment longue; généralement, plusieurs mois. Toutefois, même si les patients ont reçu des instructions dé-taillées, la longueur du traitement (né-cessaire à cause d’une faible absorption intestinale du fer) et les effets secon-daires peuvent diminuer l’observance. Une méta-analyse récente a montré que l’administration d’une préparation de Fe3+ est, sensiblement, mieux tolérée que les préparations de Fe2+ et facilite l’observance par le patient.23 On ne sait, toutefois, pas si l’absorption du Fe3+ est moins efficace que celle du Fe2+, ou si l’absorption du fer, par les érythrocytes, peut s’en trouver affectée; des discus-sions et des études à ce propos sont, toujours, en cours.

Traitement intraveineuxSi un traitement oral n’apporte pas le succès escompté, ou n’est pas toléré par le patient, un traitement intraveineux est justifié. Si le patient ne répond pas au traitement oral, malgré une bonne observance, le diagnostic de la CF et de ses causes doit être revu, avant de pas-ser au traitement intraveineux.Chez les patients présentant des stocks de fer très faibles (ferritine < 10 μg/l), l’administration d’une dose cumulative totale de 1000 mg de fer doit être envi-sagée. Chez les patients présentant une fer-ritine de 10-30 μg/l, on préconise une dose cumulative totale de 500 mg de fer. Chez les patients symptomatiques présentant une ferritine 30-50 μg/l, on peut administrer une première dose de 200 mg de fer. La CF est uniquement confirmée si le patient réagit au traite-ment sinon ce dernier doit être inter-rompu et le diagnostic révisé.Le dosage doit être adapté à la situation clinique du patient, c’est-à-dire à son poids, à ses préférences, à une maladie sous-jacente, à une possible hémorra-gie chronique et à la préparation de fer intraveineuse utilisée.

Contrôle et suivi

L’objectif primaire de la substitution martiale chez les patients présentant une CF est le soulagement des symp-tômes. Si cet objectif ne peut être at-teint, le patient doit se soumettre à des examens complémentaires afin de révi-ser le diagnostic initial. Pour assurer une reconstitution adéquate des stocks de fer, il faut cibler une ferritine de 50-100 μg/l en tenant compte de la situation clinique.La ferritine des patients qui suivent un traitement par voie orale doit être contrôlée après trois mois. Avant le contrôle, le traitement doit avoir été interrompu pendant deux semaines au moins. Chez les patients recevant un traitement par voie intraveineuse, la ferritine doit être contrôlée au plus tôt huit à douze semaines après la dernière injection. Un contrôle prématuré peut montrer des valeurs faussement élevées même si un tel dosage peut s’avérer né-cessaire si les symptômes ne régressent pas, voire s’aggravent après quelques semaines. Dans tous les cas, la ferritine doit être mesurée à la fin du traitement pour exclure des pertes de fer chro-niques.Les patients qui présentent une perte martiale chronique peuvent avoir be-soin d’un complément de fer après la thérapie initiale. Cette décision reste tri-butaire de l’appréciation du médecin et de la situation clinique

Références

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Dr Z. Behourah, Dr K. Rekai, Pr Djellali Louafi*

RÉSUMÉDans le monde, le cancer colorectal est le troisième cancer le plus fréquent, chez l’homme et le deuxième, chez la femme. En Algérie, il occupe le troi-sième rang, après le cancer du pou-mon et de la vessie, chez l’homme et le cancer du sein et du col utérin, chez la femme (INSP2007). Le cancer colorectal est la seconde cause de mortalité, dans le monde, par cancer, chez les deux sexes.Son pronostic a été transformé par le développement des traitements chirur-gicaux et médicaux plus actifs. La sur-vie globale des patients, atteints par un cancer colorectal métastatique (mCRC), a augmenté de façon significative, pour atteindre presque deux ans, en moyenne, aujourd’hui.Cet article résume les nouvelles théra-peutiques, dites ciblées, dans le cancer colorectal métastatique.

INTRODUCTIONAu cours de ces dernières années, nous avons été témoins d’une évolution, majeure, dans le traitement des can-cers colorectaux, d’une part par des progrès chirurgicaux, notamment dans le domaine de la chirurgie hépatique et de la radiologie interventionnelle, permettant de réaliser des métasta-sectomies hépatiques et d’autre part, par l’introduction des traitements, dits ciblés, grâce à l’identification de struc-tures moléculaires comme l’epidermal growth factor receptor (EGFR) et le vas-cular endothelial growth factor (VEGF), ainsi que le développement d’anticorps et d’inhibiteurs de ces structures, parmi lesquelles le bévacizumab, le cétuximab et le panitumumab. Ces agents ont été, progressivement, introduits aux diffé-rentes étapes de la stratégie thérapeu-tique. D’autres molécules sont en cours de développement.Le bévacizumab (Avastin) n’est pas un agent de chimiothérapie, mais fait par-tie des thérapies dites ciblées. Il s’agit d’un anticorps monoclonal humanisé, dirigé contre le VEGF. Le VEGF est une molécule fortement impliquée dans la

stimulation de la néo-angiogenèse des tumeurs (figure1). Tant dans les modèles précliniques que chez les patients, l’ad-ministration de bévacizumab provoque une régression vasculaire rapide. Son utilisation a été approuvée dans le can-cer colorectal métastatique, en 2004. Le bévacizumab est, en général, très bien toléré, mais il est nécessaire de contrô-ler l’apparition d’une hypertension arté-rielle, ou d’une protéinurie en cours de traitement. Une augmentation du risque thromboembolique existe, notamment, chez des patients âgés et son utilisation, chez des patients avec des antécédents cardiovasculaires, doit être considérée avec soin.Figure 1: mécanismes d’action du bévacizumab

Le cétuximab (Erbitux) est, aussi, une thérapie ciblée. C’est un anticorps mo-noclonal murin chimérique, dirigé contre l’EGFR. Administré, seul, le cétuximab a une activité anti-tumorale (figure2). Il potentialise l’effet cytotoxique de la chimiothérapie et de la radiothérapie.Dans un essai thérapeutique, sur une po-pulation sélectionnée de malades ayant un cancer colorectal métastatique, avec un gène KRAS de type sauvage, le cé-tuximab, associé à une chimiothérapie, a permis une amélioration, significative, du taux de réponse objective et de la survie globale.L’effet secondaire le plus invalidant est cutané, avec l’apparition d’une éruption acnéiforme. Il ne s’agit pas d’une acné classique. Son traitement nécessite une prise en charge utilisant, parfois, des tétracyclines systémiques. D’autres ma-nifestations cutanées gênantes sont la xérose et les paronychies douloureuses. Le cétuximab est, actuellement, indiqué dans le traitement du cancer colorectal métastatique, avec gène KRAS de type sauvage, exprimant le récepteur du fac-teur de croissance épidermique (EGFR), en association à une chimiothérapie, ou en monothérapie.Le panitumumab (Vectibix) est un nou-vel anticorps contre l'EGFR, complète-ment humanisé. Comme le cétuximab,

Thérapie ciblée, dans les cancers colorectaux métastatiques

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le panitumumab a une efficacité anti-tumorale chez 8-13% des patients souf-frant de cancer colorectal récidivant, ou réfractaire aux traitements standards et il a un effet positif sur la survie sans pro-gression. En recherchant les marqueurs biologiques permettant d'identifier les patients pouvant profiter des anticorps anti-EGFR, il est apparu que la muta-tion du gène KRAS était présente dans 30-50% des tumeurs colorectales et conférait une résistance au traitement. Le bénéfice semble être réservé aux patients dont la tumeur ne présente pas de mutation du gène KRAS. Du fait du caractère humain de cet anticorps, la tolérance est tout à fait bonne, sur le plan du risque allergique et il n’est pas associé à l’apparition d’anticorps anti-panitumumab. La principale toxi-cité reste l’apparition d’un rash cutané. Le développement du panitumumab se poursuit en cancérologie digestive, pour les cancers colorectaux KRAS sauvage, à des stades moins avancés de la maladie et en association avec des cytotoxiques conventionnels.

Figure 2: mécanismes d’action du cétuximab et du panitumumab

L’afliberecpt est le deuxième agent anti-angiogénique (figure3) à obtenir une AMM, en deuxième ligne, dans une étude de phase III, pour des patients avec CCRm. Son indication est, cepen-dant, limitée à la deuxième ligne, en

association avec une chimiothérapie de type FOLFIRI, exclusivement chez des patients ayant reçu, en première ligne, une chimiothérapie à base d’oxa-liplatine. D’autres études sont en cours et notamment, en première ligne, pour évaluer ce médicament, dans le CCRm. Comme pour le bevacizumab, il n’existe pas de facteur prédictif d’efficacité de l’aflibercept. Des études permettront, probablement, d’individualiser des fac-teurs prédictifs d’efficacité de cet agent anti-angiogénique.

Figure 3: mécanisme d’action de l’aflibercept

Le régorafénib, Le régorafénib est un agent oral, qui bloque de multiples pro-téines kinases, y compris les kinases impliquées dans l’angiogenèse tumorale (VEGFR1, 2, 3, TIE2), l’oncogenèse (KIT,

RET, RAF-1, BRAF, BRAFV600E) et le microenvironnement tumoral (PDGFR, FGFR). Le régorafénib a montré son efficacité, en termes de survie sans pro-gression, survie globale et contrôle de la maladie, dans une étude internationale de phase III, dans laquelle, les patients avaient un PS 0 ou 1, au moment de l’in-clusion, étaient en échec de chimiothéra-pie à base de fluoropyrimidine (en asso-ciation avec l’oxaliplatine ou l’irinotecan), d’un traitement par anti-VEGF (béva-cizumab) et par anti-EGFR (cetuximab ou panitumumab), si porteurs de KRAS de type sauvage. Une AMM européenne a été délivrée le 26 août 2013, pour son utilisation chez des patients porteurs de cancer colorectal prétraités.Conclusion:Les progrès, obtenus durant ces dix der-nières années, dans le traitement sys-témique du cancer colorectal, sont très encourageants. Ils sont la conséquence d'une meilleure utilisation des substances classiques de chimiothérapie; mais, éga-lement, de l'utilisation de nouveaux agents ciblant des structures molécu-laires précises, comme le bévacizumab, le cétuximab et le panitumumab.Il existe des indicateurs prédictifs de ré-ponse au traitement (KRAS sauvage pour les AC anti-EGFR), mais la validation de nouveaux marqueurs de réponse permet-tra un véritable traitement «à la carte»

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* Dr Z. Behourah, Dr K.Rekai, Pr Djellali Louafi Service Oncologie Médicale - CHU Oran.

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RECHERCHES MÉDICALES

Santé-MAG N°28 - Mars 201448

Par Rania Hamdi

Si la congélation des gamètes date de la fin des années 60 et des embryons des années 80, celle des ovocytes est une in-novation; notamment, depuis le dévelop-pement de la technique de vitrification. Le procédé est important, car il préserve le capital reproductif des personnes, qui risquent de souffrir de stérilité, pour cause de maladie (cancers), ou l’âge. Le Dr. Nedir Chérif, gynécologue, nous en parle, dans cette entrevue, accordée à Santé Mag.

Certains types de cancers impactent négativement sur la fertilité masculine, en raison d’une atteinte importante des gonades, notamment après le trai-tement par radiothérapie et chimio-thérapie. Pour ne pas compromettre les chances des jeunes patients, qui se remettent de la maladie, d’avoir, un jour, des enfants, la clinique Feriel, spé-cialisée dans la procréation médicale-ment assistée, a institué une banque de spermes. «Nous proposons à ces jeunes la vitrification de leur patrimoine repro-ductif afin de ne pas compromettre leurs chances d’avoir un enfant, une fois mariés. Ils signent, avec la clinique, un contrat valide de trois années, à raison de 3000 DA et on leur garde, pendant cette durée, leurs spermatozoïdes» ex-plique Dr. Cherif Nedir, gynécologue et directeur général de cette clinique.De la même manière, la structure pro-pose aux jeunes femmes, non mariées et ayant atteint un certain âge, la lati-tude de congeler leurs ovocytes, en vue de les récupérer et les féconder avec les spermatozoïdes de leurs fu-turs conjoints. «Il faut savoir que plus on avance dans l’âge, plus la qualité de l’ovocyte est mauvaise. Même si on transfère des embryons de qua-lité, il y a, toujours, risque de ce qu’on appelle l’aneuploïdie, c’est-à-dire, des embryons qui ne sont pas bien formés génétiquement. On peut faire, aussi, la vitrification des parenchymes ovariens; mais, techniquement, ce n’est pas, encore, au point», soutient le gynéco-logue. En clair, à partir de 35 ans, la qua-lité des gamètes décroît. Cela entraîne

une baisse, progressive, de la fertilité et aussi, les possibilités d’obtenir une grossesse, menée à terme. En vitrifiant des ovules avant l’entame du proces-sus de la détérioration des ovules, l’on préserve leur qualité. Cette opération est, aussi, particulièrement, utile pour les femmes atteintes de cancer. «Si les ovules sont vitrifiés, avant de recevoir le traitement par chimiothérapie et ra-diothérapie, les possibilités d’avoir un enfant, après la maladie, augmente de façon exponentielle», s’accorde-t-on à assurer. Autant celle des ovules que des sper-matozoïdes, la vitrification est une technique de cryoconservation pour les maintenir à base de froid, en réali-sant une congélation ultrarapide, par submersion dans du nitrogène liquide, à -196 ºC. En se vitrifiant, les ovocytes et les spermes gardent les caractéris-tiques qu’ils ont, au moment de leur congélation. En Algérie, la technique est dûment autorisée. Il n’en demeure pas moins que le Docteur Nedir estime qu’il est temps d’engager un débat éthique sur la congélation et la gestion des em-bryons, et dans un sens plus large, sur la procréation médicalement assistée, pratiquée, dans le pays, depuis plus de vingt ans. «Il y a quelques années, j’ai posé la question à un ancien ministre, pour savoir quel statut donner à un em-

bryon congelé. S’il y a décès d’un des deux conjoints, ou divorce, comment faire pour le détruire. Il a invoqué, alors, l’obligation de réserve. Ce n’est pas une réponse scientifique. Nous devons avoir un cadre légal, pour la destruction des embryons congelés. On doit, donc, leur donner un statut juridique», recom-mande notre interlocuteur. Jusqu’alors, la PMA est codifiée par des textes règlementaires, qui énumèrent quatre interdictions. Il est, de ce fait, proscrit de faire un don de spermes ou d’ovocytes, les mères porteuses et le diagnostic préimplantatoire, pour le choix du sexe. Au-delà de ces quatre points, la PMA n’est encadrée par au-cune loi spécifique. «Le ministère de tutelle n’a jamais réuni les profession-nels de la PMA, pour discuter des pro-cédures légales et éthiques. Cela fait 14 ans que je pratique la PMA. J’ai eu l’agrément n°1, à la fin des années 90», poursuit le praticien. Pourtant, eu égard au taux important de stérilité et infer-tilité - environ 20% des couples mariés n’arrivent pas à concevoir un enfant, na-turellement -, la PMA est très sollicitée. D’autant que l’on estime la proportion de réussite à, environ, 30% des tenta-tives. En dix ans, l’équipe de la clinique Feriel a obtenu près de 1500 naissances, par assistance médicale

Pour prévenir la stérilité, induite par les effets

de chimiothérapie et radiothérapie: Vitrification des gamètes et ovocytes

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